«La petite fille au napalm» a reçu son dernier traitement

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Symbole«Je ne suis plus la petite fille au napalm»

Cinquante ans après la prise du célèbre cliché lors d’un bombardement au Vietnam, la survivante Kim Phuc vient de recevoir son dernier traitement.

Jonathan Zalts
par
Jonathan Zalts
Kim Phuc a détesté la célèbre photo pendant de longues années, avant de finir par l’accepter.

Kim Phuc a détesté la célèbre photo pendant de longues années, avant de finir par l’accepter.

AFP

C’est l’une de ces images que l’on oublie jamais: prise le 8 juin 1972 lors d’un bombardement sur le village de Trảng Bàng, la photo en noir et blanc de la «petite fille au napalm» témoignait au monde des horreurs de la guerre au Vietnam.

«En tant qu’enfants, nous étions autorisés à jouer près de l’abri anti-bombes situé dans la cour du temple, souvient Kim Phuc Phan Thi, la fillette de la photo, aujourd’hui âgée de 59 ans. Puis, je me souviens qu’après le déjeuner, les soldats sud-vietnamiens ont crié aux enfants de courir.»

Au micro de CBS Miami, elle raconte avoir couru aussi vite que possible, alors qu’elle n’avait que 9 ans. «J’ai levé les yeux et j’ai vu l’avion et quatre bombes qui tombaient», décrit la survivante. Quelques secondes plus tard, l’essence gélifiée brûlait sa peau.

«Je me souviens encore de ce que j’ai pensé à ce moment-là: «Mon Dieu, j’ai été brûlée, je vais être laide, les gens vont me regarder différemment.»

«Elle sourit toujours»

Après des années de souffrance due à ses blessures, Kim Phuc vient toutefois de franchir une étape importante de son processus de guérison: la Vietnamienne a reçu la semaine dernière à Miami son dernier traitement au laser pour soigner ses brûlures. «Elle a l’air mieux, elle est si heureuse, elle sourit toujours», confie le photographe Nick Ut, qui était présent lors de la séance.

C’est lui qui, en 1972, avait immortalisé l’horreur sur cette route près de Trảng Bàng. Un cliché qui lui a notamment valu le prix Pullitzer. «Je tenais mon appareil, j’ai pris la photo d’un garçon pendant une seconde et il est mort devant l’objectif, raconte-t-il à CBS Miami. Mais mon œil s’est tourné vers la pagode et j’ai vu Kim courir avec ses bras comme ça.»

Kim Phuc (à g.) et Nick Ut (au centre tenant la photo), lors d’une récente visite au Vatican.

Kim Phuc (à g.) et Nick Ut (au centre tenant la photo), lors d’une récente visite au Vatican.

AFP

Nick Ut, alors âgé de 20 ans, s’était lui-même chargé d’emmener Kim Phuc ainsi que d’autres enfants à l’hôpital. «Même le médecin a dit qu’elle allait mourir, qu’elle n’était déjà plus en vie. Je leur ai demandé trois fois [de la soigner] et ils ont dit non, se souvient le photographe de l’AP. Alors j’ai pris ma carte de presse et j’ai dit que si elle mourait, ma photo serait en première page de tous les journaux. Ils se sont alors inquiétés et l’ont emmenée tout de suite à l’intérieur.»

Enfants démunis

Kim Phuc et Nick Ut n’ont depuis jamais perdu contact et le photographe continue à documenter sa vie, même des années après la guerre. «Il m’a sauvé la vie et il est devenu un membre de ma famille», explique Kim Phuc, qui ajoute avoir détesté pendant de longues années la célèbre photo qu’il a prise d’elle, avant de finir par l’accepter.

Installée au Canada depuis 1992, elle a aujourd’hui créé sa propre association, la Fondation Kim, qui vient en aide aux enfants démunis. Quant à son traitement, il ne lui reste à subir que de légères interventions. «Cinquante ans plus tard, je ne suis plus une victime de la guerre, je ne suis plus la fille au napalm, confie-t-elle. Je suis maintenant une amie, une aide, une grand-mère et une survivante qui appelle à la paix.»

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