Affaire Narumi«Le seul et unique suspect, c’est Nicolas Zepeda»
Le policier français en charge de l’enquête sur la disparition de Narumi Kurosaki a livré, jeudi à la barre, un récit accablant pour l’accusé, jugé en appel pour l’assassinat de l’étudiante japonaise.
L’officier de police judiciaire responsable de l’enquête sur la disparition de l’étudiante japonaise Narumi Kurosaki en 2016 à Besançon (Jura français) a livré, jeudi, un récit précis et détaillé, accablant pour Nicolas Zepeda, qui comparaît en appel devant la Cour d’assises de Vesoul pour assassinat.
«C’est une faiblesse dans un dossier criminel de ne pas avoir de corps», reconnaît devant les jurés David Borne, brigadier-chef à la PJ de Besançon. «Mais ça nous a permis de pousser les investigations au plus profond de ce qu’on pouvait faire, pour répondre à tout.»
Il commence en évoquant les premiers soupçons, portés sur Arthur Del Piccolo, le petit ami de Narumi au moment de sa disparition. «C’est vrai que son comportement est particulier. Il intellectualise tout, il fait une enquête avec ses amis», explique David Borne. Mais les enquêteurs orientent rapidement leurs recherches vers un autre suspect, Nicolas Zepeda, le précédent petit ami de l’étudiante japonaise.
Déposition clé
En première instance, la déposition de l’enquêteur avait fait basculer le procès, qui avait abouti à la condamnation du Chilien à 28 ans de réclusion criminelle. Alors les avocats de la défense, Renaud Portejoie et Sylvain Cormier, contestent qu’il dépose à la barre en s’appuyant sur des notes. «Il lit intégralement sa déposition, c’est interdit en Cour d’assises», s’agace Renaud Portejoie.
Mais le policier poursuit sans ciller. Il revient sur les «cris d’horreur» entendus dans une résidence universitaire dans la nuit du 4 au 5 décembre 2016. «On se rend compte que ce soir-là, il y a vraiment quelque chose de grave qui s’est passé à proximité de la chambre de Narumi», expose l’enquêteur.
Il prend en photo la résidence où vit la victime
Plus tôt dans la soirée, Narumi Kurosaki avait dîné au restaurant avec Nicolas Zepeda. La police judiciaire a fait la lumière sur le déroulé du séjour du Chilien en France, ses déplacements et ses achats. «Il achète des articles pour le moins troublants: une boîte d’allumettes, cinq litres de produit inflammable et un spray de produit détergent», détaille David Borne: «Ça nous surprend.»
La vidéosurveillance a mis en évidence un individu au visage dissimulé qui «s’intéresse à la résidence universitaire» quelques jours plus tôt: «Il la prend en photo, essaie d’entrer par la porte de la buanderie.» Les apparitions de l’individu devant les caméras de surveillance correspondent exactement aux heures et jours où Nicolas Zepeda s’est rendu sur le campus.
Maladivement jaloux
L’officier décrit aussi comment l’accusé avait «pris possession» des réseaux sociaux de la victime. «Jaloux», il «n’accepte pas que Narumi puisse s’être fait des amis masculins sur le territoire français», observe-t-il. «Il a une obsession particulière pour Arthur Del Piccolo».
L’officier précise aussi que Nicolas Zepeda s’était arrêté de nuit le 1er décembre dans une zone forestière «absolument pas touristique», à proximité d’une rivière. Il y retourne le 6, après la disparition, aux petites heures du jour, toujours dans l’obscurité.
Battues et recherches en bateau sont restées sans effet
Pour l’accusation, ces arrêts correspondent à des «repérages», puis à l’abandon du corps. «On a fait venir les brigades fluviales, les maîtres-chiens. On a fait des battues, des recherches en bateau, mais on ne l’a pas retrouvée», regrette David Borne.
Narumi Kurosaki «n’est pas partie d’elle-même, et on ne peut pas imaginer qu’elle s’est suicidée», termine-t-il. «La seule solution qu’on ait, c’est qu’elle se soit fait assassiner. Et le seul et unique suspect, c’est Nicolas Zepeda.»