FootballComment le Barça «femeni» a changé de dimension
Auteures d’un récital vendredi face à Wolfsburg (5-1), les Catalanes ont fait un grand pas vers la finale de la Ligue des championnes. Mais leur suprématie est toute récente.
Une 45e victoire, toutes compétitions confondues. Voilà ce qu’a remporté le Barça contre Wolsburg vendredi – en plus du nouveau record d’affluence pour un match de football féminin – , en demi-finales aller de la Ligue des championnes (5-1). Notamment au terme d’une première période qui a tourné à la démonstration. «C'est la meilleure première période que j'ai vue depuis que je suis à la tête de l'équipe tant au niveau de notre niveau de jeu qu'au niveau du match», a commenté l’entraîneur catalan.
Titularisée, Ana-Maria Crnogorcevic a livré une grande performance, comme l’illustre son travail sur le 2e but blaugrana. Malgré de nombreuses occasions, la Bernoise n’est cependant pas parvenue à trouver le chemin des filets. A part à la 50e, mais la VAR est intervenue pour signaler un hors-jeu.
Une supériorité partagée par Tommy Stroot, le coach des Louves qui restaient pourtant sur 17 matches sans revers. «Le Barça a fait un excellent match, on n’a pas rivalisé. Il est assez clair qu’il peut commencer à planifier son voyage vers Turin (ndlr: lieu de la finale, le 21 mai).» Vainqueur de la Coupe et du championnat cette année (146 buts inscrits, 8 encaissés), le club catalan est bien parti pour se succéder à lui-même en C1 et réaliser le triplé, comme l’an dernier.
«Différence abyssale»
Une écrasante supériorité qui est pourtant très récente. «Il y a deux ou trois ans encore, on était quelques crans en-dessous de Lyon, de Wolfsburg et des meilleures équipes d’Europe, confie Patri Guijarro, milieu de terrain catalane . Le changement a été brutal, et très rapide, en l’espace de quelques saisons. Surtout physiquement. Notre transformation physique a été énorme. La différence avec il y a trois ans est abyssale.»
Devenue professionnelle en 2015, l’équipe féminine du FC Barcelone s’est transformée en moins de dix ans, avec nouveaux sponsors, formation et infrastructures flambant neuves.
Une professionnalisation tardive
Née sous le nom de Seleccion Ciudad de Barcelona pour un match amical, l’équipe a pris un an plus tard le nom de Peña Femenina Barcelonista et, dans les années 1980, s’est convertie en Club Femeni Barcelona. Ce n’est qu’en 2002 qu’elle est officiellement devenue la section féminine du FC Barcelone.
Dans un reportage diffusé par El Pais l’an dernier, Natalia Astrain, entraîneuse de 2002 à 2006, et Sheila Sanchon, ex-joueuse, se rappellent : «On s’entraînait sur un terrain qui servait de parking le week-end», «on percevait environ 700 euros par mois», et «on faisait les déplacements dans nos voitures individuelles».
Le stade Cruyff
L’équipe devient professionnelle en 2015, et en 2017, le Barça lance la construction du stade Johan-Cruyff (6000 places), destiné à l’équipe réserve masculine et à l’équipe féminine. Un investissement de 12 millions d’euros qui sera rentable dès la livraison, à l’été 2019, et qui aidera le «Femeni» à attirer des joueuses de calibre international, comme la Néerlandaise Lieke Martens, meilleure joueuse du monde 2017 selon l’UEFA et la FIFA, recrutée cette année-là.
Le sponsor Stanley
Parallèlement, en 2018, la firme de bricolage Stanley injecte 3,5 millions d’euros par saison jusqu’en 2022 pour devenir le sponsor principal de l’équipe féminine, qui arbore un partenaire différent de l’équipe masculine. L’année précédente, les dirigeants avaient décidé de ne pas inclure l’équipe féminine dans l’accord avec Rakuten précisément pour tenter de séduire un sponsor séparé pour les féminines, à moindre coût.
En 2018-2019, l’équipe féminine est la seule section du FC Barcelone à être économiquement rentable. Cet été, Stanley cèdera sa place à Spotify, qui a scellé un colossal accord de sponsoring avec le club blaugrana.
La finale perdue de C1 en 2019
Le 18 mai 2019 est la date qui va faire basculer le Barça au féminin dans une nouvelle mentalité. Plusieurs joueuses internationales sont arrivées dans le vestiaire et le niveau de jeu a considérablement bondi, et sous la houlette de Lluis Cortes, le Barça atteint la finale de la Ligue des champions. Mais les Catalanes sont écrasées 4-1 par les Lyonnaises, alors indétrônables. Sur le chemin du retour, à l’aéroport de Budapest (ville hôte de la finale), une discussion entre l’entraîneur et les capitaines va tout changer.
«On avait été tellement dominées qu’on avait dit à Lluis qu’on voulait vraiment progresser sur tous les plans, pour revenir et gagner cette finale. Et c’est ce que l’on a fait. On s’est entraîné beaucoup plus dur, et on s’est préparé mentalement pour atteindre à cet objectif», avait détaillé la joueuse Vicky Losada.
L’ouverture de la Masia
Pour changer de dimension, le Barça a certes dû attirer quelques joueuses internationales, à l’instar de Lieke Martens, des Norvégiennes Caroline Graham Hansen et Ingrid Engen, toujours au club, ou encore des Françaises Kheira Hamraoui et Elise Bussaglia (désormais parties). Mais il s’est aussi beaucoup appuyé sur sa formation, avec des stars comme Gemma Font, Aitana Bonmati ou la superstar Alexia Putellas.
Et cela continue: l’été dernier, neuf pionnières ont intégré à plein temps la Masia, le prestigieux centre de formation du Barça, qui était jusque-là fermé aux filles.
Les fruits des efforts
Tous ces efforts fournis ont porté leurs fruits. En 2020-2021, le Barça a réalisé un incroyable triplé Coupe d’Espagne – Championnat d’Espagne – Ligue des champions, soulevant la première C1 de son histoire.
Les Catalanes ont survolé l’Espagne et ont dominé l’Europe. Alexia Putellas a conquis le Ballon d’Or 2021 et le titre de meilleure joueuse UEFA de l’année, une cérémonie qui a propulsé ses coéquipières Jennifer Hermoso et Lieke Martens sur les deux autres marches du podium.