ÉconomieLe profit de Jelmoli s'est transformé en perte
L’annonce de la fermeture de Jelmoli à Zurich suscite l’incompréhension en Suisse alémanique. Comment le bénéfice du grand magasin a-t-il pu se transformer en perte tandis que sa valeur immobilière doublait pratiquement?
Depuis que la société immobilière Swiss Prime Site (SPS) a annoncé son intention de fermer Jelmoli à Zurich, un débat a éclaté outre-Sarine, rapporte la «SonntagsZeitung»: un grand magasin dans le centre-ville peut-il encore être exploité de manière rentable ou les sociétés immobilières deviennent-elles des fossoyeurs de commerces par pure avidité du profit? SPS justifie la fermeture du grand magasin zurichois par les pertes de 45 millions de francs qui se sont accumulées ces dernières années. Or, un ancien patron de Jelmoli contredit avec véhémence cette explication. Le grand magasin était très rentable, selon Peter Leumann, ancien CEO de Jelmoli.
Dans les années 1990, Jelmoli a subi de plein fouet les effets de la récession et a dû fermer toutes ses succursales à l’exception du «Palais de verre» à Zurich. À la fin de la récession en 1996, les ventes ont repris l’ascenseur et en un an, la perte de 20 millions de francs s'est transformée en un bénéfice de 40 millions. Mais du fait du doublement du loyer – qui a augmenté de 13 millions de francs - le profit a disparu d'un coup à partir de 2004.
«Pratiquement tous les bénéfices de l'activité de Jelmoli ont été transférés en interne sous forme de loyer. Les bénéfices durement gagnés par le grand magasin au cours des années précédentes lui ont été volés et attribués à l’immobilier», explique Peter Leumann. Selon lui, l’augmentation du loyer était totalement injustifiée et non conforme au marché. Après avoir gonflé la valeur comptable de la propriété de 400 millions de francs à 670 millions par an, la société de participations Pelham Investments, actionnaire majoritaire, a vendu la maison à ce prix à SPS. «Il s’agit-là d’un tour de passe-passe classique des jongleurs de la finance», déplore l’ancien CEO.