AlpesL’année 2023 s’annonce mauvaise pour les glaciers suisses
Le manteau neigeux recouvrant les glaciers suisses est inférieur d’environ 30% à la moyenne des dix dernières années, une «situation très spéciale».
Comme tous les ans en avril, lorsque le manteau neigeux atteint son maximum, Matthias Huss, le responsable du Réseau suisse de relevés glaciologiques (GLAMOS) et son équipe, ont procédé à une campagne de mesures sur une quinzaine de glaciers suisses. «Cette année les conditions sont assez similaires à l’année 2022, qui avait des pertes de glace records. On a encore une fois très peu de neige», a expliqué le glaciologue suisse dans un entretien à l’AFP. «Ce n’est pas dans toutes les régions que c’est aussi dramatique qu’en 2022, mais on est quand même fortement sous la moyenne», a-t-il dit.
Si les quantités de neige recouvrant les glaciers suisses ont atteint cette année un niveau environ 30% inférieur à la moyenne des dernières dix années, «il y a même des régions avec un déficit allant jusqu’à 50%», a indiqué Matthias Huss. «Cela nous dit que les préconditions pour l’été à venir sont mauvaises pour le moment. Mais on ne peut pas dire si on aura de nouveau des records de fonte durant le prochain été», a-t-il décrypté. Tout dépendra des températures à venir.
Le manteau neigeux est doublement important pour les glaciers car la neige permet à la fois de les «nourrir» et leur offre une couche protectrice en été. Pour la première fois cette année, des mesures du manteau neigeux ont été effectuées sur un glacier situé à environ 4100 mètres d’altitude. «On avait une épaisseur de neige de 0 cm. Il n’y avait vraiment rien du tout. C’était surprenant», a observé le glaciologue. La situation est «grave pour les glaciers quand, même à 4000 m, il n’y a pas de neige vers la fin de l’hiver.»
«Situation très spéciale»
Selon l’Organisation météorologique mondiale (OMM) des Nations unies, les huit dernières années ont été les plus chaudes observées et la température moyenne de la planète en 2022 était supérieure de 1,15°C à celle de l’époque préindustrielle (1850-1900). Dans les Alpes, les glaciers ont battu des records de fonte en raison d’une combinaison de faible enneigement hivernal, de l’arrivée de poussière saharienne en mars 2022, et de vagues de chaleur entre mai et début septembre.
En Suisse, la situation était particulièrement dramatique, les glaciers ayant perdu 6% de leur volume de glace entre 2021 et 2022, contre un tiers entre 2001 et 2022. Matthias Huss est frappé par la rapidité avec laquelle le volume des glaciers diminue d’année en année. «2022 était un record absolu. Et ce qui me frappe c’est que maintenant, à la fin de l’hiver, on a encore une fois une situation qui est très spéciale.»
Sauver un tiers du volume
Selon l’OMM, la fonte des glaciers ne peut être stoppée à moins de créer un moyen d’éliminer le CO2 de l’atmosphère. La disparition des glaciers est un «symbole du changement climatique», a fait valoir Matthias Huss, mais leur disparition aura également de multiples effets sur les populations à court terme, en termes notamment de tourisme et de dangers naturels, mais également à plus long terme, car ils alimentent les fleuves et les barrages hydroélectriques. Une partie importante de l’eau qui alimente le Rhône et le Rhin dans un été chaud et sec provient ainsi des glaciers alpins, permettant à la population de mieux affronter les sécheresses estivales.
Mais Matthias Huss veut garder espoir. «Si on arrive à limiter le réchauffement climatique à 1,5°C ou 2°C, on peut encore sauver environ un tiers du volume des glaciers alpins. Par contre, si le changement climatique dépasse les quatre degrés, il y aura une perte presque totale des glaciers vers 2100», a-t-il conclu.
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