SénégalL’opposant Sonko «suspend» plus d’un mois de grève de la faim
Ousmane Sonko avait cessé de s’alimenter le 30 juillet, deux jours après son arrestation et son inculpation visant, selon lui, à l’empêcher de se présenter au scrutin présidentiel.
L’opposant sénégalais Ousmane Sonko, détenu depuis fin juillet sous divers chefs d’inculpation dont appel à l’insurrection, a «suspendu» samedi sa grève de la faim entamée depuis plus d’un mois mais sa participation à la présidentielle de 2024 reste compromise par une condamnation dans une affaire de moeurs.
Placé en détention puis transféré à l’hôpital
Ousmane Sonko, dont le rapport de force avec le pouvoir et la justice tient le Sénégal en haleine depuis plus de deux ans, avait annoncé avoir entamé sa grève de la faim le 30 juillet, deux jours après son arrestation suivie de son inculpation et son placement en détention le 1er août à Sébikotane, près de Dakar où il avait ensuite été transféré le 6 août dans un hôpital. Candidat à la présidentielle de février 2024, Ousmane Sonko, 49 ans, troisième de la présidentielle de 2019, accuse le président Macky Sall, qui s’en défend, de vouloir l’écarter du scrutin par des procédures judiciaires. Macky Sall, élu en 2012 pour sept ans et réélu en 2019 pour cinq ans, a annoncé début juillet ne pas se représenter.
«Ousmane Sonko vient de suspendre sa grève de la faim», a annoncé le responsable de la communication du parti d’Ousmane Sonko, El Hadji Malick Ndiaye, dans un message sur sa page Facebook et sur X (ex-Twitter), transmis également samedi matin à l’AFP.
«Je confirme l’information», a annoncé à l’AFP Bamba Cissé, un avocat membre du Collectif de la défense d’Ousmane Sonko.
«Il n’a jamais été dans une tendance suicidaire»
Ousmane Sonko «a accédé à la demande du khalife» général Serigne Mountakha Mbacké, le chef de la puissante confrérie musulmane des mourides, a affirmé samedi à l’AFP un membre de son entourage. Le 22 août, le khalife des mourides avait reçu à Touba (centre) une délégation de la coalition à laquelle appartient Ousmane Sonko. Il lui avait demandé de transmettre à l’opposant un appel pour qu’il recommence à s’alimenter, avait indiqué à l’AFP une membre de cette délégation. Plusieurs appels, émanant notamment de chefs religieux très influents au Sénégal, pays majoritairement musulman où ils mènent souvent des médiations politiques, ont été ces derniers jours lancés pour qu’Ousmane Sonko arrête sa grève de la faim.
Un autre avocat d’Ousmane Sonko, Ciré Clédor Ly, a cité à l’AFP «deux raisons» expliquant la décision de son client. «Il ne pouvait pas rester insensible à l’appel de millions de personnes que cette suspension soulage». En outre, «il n’a jamais été dans une tendance suicidaire, il ne fallait pas qu’il épuise ses organes vitaux. Il était donc indiqué qu’il suspende» sa grève de la faim, a dit Me Ly à l’AFP.
Multiples inculpations
Les avocats d’Ousmane Sonko avaient lancé plusieurs alertes sur la dégradation, selon eux, de son état de santé. Dans un communiqué transmis vendredi soir à l’AFP, ils affirmaient que la vie de leur client, «admis en réanimation» depuis le 17 août, était «en péril» et invitaient l’Etat «à prendre en urgence toutes mesures nécessaires pour éviter un drame». Les autorités sénégalaises avaient mis en doute cette grève de la faim.
Ousmane Sonko a été déclaré coupable le 1er juin de débauche de mineure et condamné à deux ans de prison ferme. Ayant refusé de se présenter au procès qu’il dénonçait comme un complot pour l’écarter de la présidentielle, il a été condamné par contumace. Il a depuis été écroué fin juillet pour d’autres chefs d’inculpation, dont appel à l’insurrection, association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste et atteinte à la sûreté de l’Etat. Ousmane Sonko a par ailleurs été condamné en appel à six mois de prison avec sursis en mai pour diffamation contre un ministre, un dossier dans lequel il n’a pas épuisé ses recours. Plusieurs centaines de ses militants et sympathisants sont en prison, selon son parti.