Asie centraleTrêve fragile entre le Kirghizistan et le Tadjikistan, 24 morts
Des affrontements meurtriers à la frontière entre le Kirghizistan et le Tadjikistan ont fait au moins 24 morts, côté kirghiz, vendredi.
Le Kirghizistan a annoncé vendredi un cessez-le-feu avec le Tadjikistan après des affrontements meurtriers à la frontière entre ces deux pays d’Asie centrale, les deux parties s’accusant toutefois de violations mutuelles de cette trêve.
Dans la nuit de vendredi à samedi, le ministère kirghiz de la Santé a indiqué que ces violences avaient fait au moins 24 morts côté kirghiz, dans la région de Batken, située au sud-ouest du Kirghizistan et frontalière du Tadjikistan.
Plus tôt dans la journée, le président kirghiz Sadyr Japarov et son homologue tadjik Emomali Rakhmon se sont entretenus en marge d’un sommet régional de l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) en Ouzbékistan. Ils ont «convenu de donner pour instruction aux institutions concernées de cesser le feu et de retirer les forces et les équipements de la ligne de contact», selon un communiqué de la présidence kirghize.
Cessez-le-feu
Un cessez-le-feu est entré en vigueur à 16h00, heure locale (12h00, heure suisse) vendredi, mais les gardes-frontières kirghiz ont rapidement accusé l’armée tadjike «d’avoir ouvert le feu à nouveau». Dans la soirée, ils jugeaient la situation «tendue», affirmant toujours «repousser les attaques de l’ennemi» qui bénéficie de renforts «en équipements lourds et automobiles».
Leurs homologues tadjiks ont répliqué dans un communiqué, dénonçant «les tirs de la partie kirghize» en direction «de trois villages du Tadjikistan». Lors de leur entretien, les présidents du Kirghizistan et du Tadjikistan avaient pourtant appelé leurs troupes à un cessez-le-feu, premier signe de désescalade après plusieurs heures de combats intenses à la frontière.
Sadyr Japarov et Emomali Rakhmon se sont entendus pour «créer une commission chargée d’enquêter sur la cause des incidents», soulignant l’importance de résoudre leurs différends «par des moyens politiques et diplomatiques», a rapporté l’agence de presse tadjike Khovar.
87 hospitalisations
Si des heurts ont régulièrement lieu à la frontière entre ces deux ex-républiques soviétiques empêtrées depuis de longues années dans des disputes territoriales, les dernières violences ont marqué une aggravation notable. La Russie a exprimé vendredi sa «préoccupation». Le président russe Vladimir Poutine a, lui, jugé la situation «tendue».
Selon Bichkek, les forces tadjikes ont bombardé vendredi la ville kirghize de Batken, située près d’une zone contestée entre les deux pays. Le ministère kirghiz de la Santé a annoncé que 87 personnes avaient été hospitalisées vendredi, selon un nouveau bilan.
Le Comité d’État pour la sécurité nationale du Kirghizistan a rapporté vendredi matin que des «affrontements intenses» et «violents» se déroulaient dans la zone frontalière, accusant le Tadjikistan de «bombarder le territoire kirghiz avec tout son arsenal disponible». Il a rapporté l’utilisation de «blindés lourds, de lance-roquettes multiples et de l’aviation» par le Tadjikistan.
19’000 personnes évacuées
«Le Kirghizistan n’a pas traversé la frontière, tout a commencé lorsque (les Tadjiks) sont entrés sur notre territoire», a appuyé le chef du Comité, Kamtchybek Tachiev, dans la soirée. Les habitants de plusieurs villages frontaliers ont fui la zone de combats, a indiqué le ministère kirghiz des Situations d’urgence, qui évoque des dizaines de milliers de déplacés.
La branche locale du Croissant-Rouge a elle indiqué qu’au moins 19’000 personnes habitant près de Batken avaient été évacuées. Douchanbé a accusé les forces kirghizes d’avoir ouvert le feu tôt vendredi sur des postes frontaliers tadjiks, sans faire état dans l’immédiat de victimes dans ses rangs.
Des affrontements entre les deux pays en début de semaine avaient fait deux morts dans les rangs des gardes-frontières tadjiks et plusieurs blessés de part et d’autre. La frontière entre le Tadjikistan et le Kirghizistan est le théâtre d’affrontements meurtriers réguliers. Près de la moitié des 970 kilomètres de frontière commune est contestée et les progrès en termes de délimitation ont été lents ces dernières années.