Tunisie: L’opposant Rached Ghannouchi placé sous mandat de dépôt

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Arrêté lundi, le chef du parti islamo-conservateur Ennahdha, Rached Ghannouchi, a été placé sous mandat de dépôt jeudi en Tunisie.

Rached Ghannouchi, à Tunis, le 21 février 2023.

Rached Ghannouchi, à Tunis, le 21 février 2023.

AFP

Le chef du parti islamo-conservateur Ennahdha, Rached Ghannouchi, principal opposant au président Kais Saied en Tunisie, a été placé sous mandat de dépôt jeudi, trois jours après son arrestation.

Rached Ghannouchi, 81, avait été interpellé lundi soir sur la base de déclarations dans lesquelles il avait affirmé que la Tunisie serait menacée d’une «guerre civile» si les partis de gauche ou ceux issus de l’islam politique comme Ennahdha y étaient éliminés.

Selon ses avocats, un juge d’instruction a décidé d’émettre un mandat de dépôt tôt jeudi pour formellement incarcérer le chef islamiste à l’issue d’un interrogatoire de plus de 9 heures. Le Front de salut national (FSN), coalition d’opposition dont fait partie Ennahdha, a affirmé que le juge a invoqué notamment le motif de «complot contre la sécurité de l’État» pour écrouer Rached Ghannouchi.

«Effondrement des libertés»

Le FSN a dénoncé «un effondrement des libertés dans le pays», soulignant que Rached Ghannouchi n’avait fait qu’émettre «une opinion dans un séminaire organisé par le FSN». Pour le FSN, le pouvoir «a fini par criminaliser la liberté d’expression et d’activité politique pacifique, preuve de son échec à préparer un dossier judiciaire sérieux».

Dans un communiqué, Ennahdha a rejeté toute intention de Rached Ghannouchi d’appeler à la guerre civile, disant «condamner fermement une décision injuste qui a pour but de couvrir l’échec total du pouvoir à améliorer les conditions économiques des citoyens». Rached Ghannouchi est l’opposant le plus en vue à être arrêté depuis le coup de force du président Kais Saied qui s’est emparé des pleins pouvoirs en juillet 2021.

Les États-Unis ont dénoncé mercredi soir «une escalade inquiétante» en Tunisie, où, outre M. Ghannouchi, une vingtaine d’opposants ainsi que de personnalités dont des hommes d’affaires et le directeur de la radio la plus écoutée du pays ont été arrêtés depuis début février. L’Union européenne avait exprimé sa grande «inquiétude» dès mardi après le placement en garde à vue de Rached Ghannouchi, rappelant l’importance du «principe fondamental du pluralisme politique».

«Ingérence flagrante»

Kais Saied a fermement rejeté ces critiques dans une vidéo diffusée par la présidence jeudi soir. «Certaines capitales ont exprimé leur inquiétude. Pourquoi le font-ils alors qu’il s’agit d’un appel à la guerre civile et la loi a été appliquée par des juges honnêtes», a-t-il dit.

«Cette ingérence flagrante dans nos affaires est inacceptable. Nous sommes un pays indépendant et souverain et nous n’acceptons pas que quiconque s’ingère dans nos affaires», a-t-il averti. «Nous ne sommes ni un État colonisé ni sous mandat».

La veille, le ministère des Affaires étrangères avait affirmé que les critiques «ne peuvent qu’affecter les efforts intenses du pays pour redresser une situation économique et financière sous grande tension du fait, en grande partie, de la mauvaise gouvernance et de l’amateurisme ayant caractérisé la décennie écoulée», pendant laquelle le parti de Rached Ghannouchi a été le faiseur de rois de presque toutes les coalitions gouvernementales.

(AFP)

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