Panama: Face à la montée des eaux, des indigènes quittent leur îlot

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PanamaFace à la montée des eaux, des indigènes quittent leur îlot

C’est une toute petite île face aux côtes du Panama. Mille Kunas s’y entassent dans des conditions très précaires. La hausse inexorable du niveau de la mer les fera s’installer sur la terre ferme.

Avec la montée des eaux, l’îlot de Carti Sugdupu aura disparu au plus tard en 2050.

Avec la montée des eaux, l’îlot de Carti Sugdupu aura disparu au plus tard en 2050.

AFP

Vu du ciel, c’est un enchevêtrement de toits rouges, bleus et gris, entre lesquels on devine des ruelles en terre et, ici ou là, quelques rares arbres. Tout autour, la mer. Carti Sugdupu est l’une des 365 îles de l’archipel de la comarque indigène Guna Yala, dans le nord-ouest du Panama. Une cinquantaine, toutes entre 50 centimètres et un mètre au-dessus du niveau de la mer, sont habitées. Et comme le niveau de la mer monte, des habitants vont devoir partir sur la terre ferme.

Car certaines de ces îles sont minuscules, comme Carti Sugdupu, de la taille de cinq terrains de football. Ses habitants y vivent de la pêche, du tourisme et de la production, sur le continent, de manioc et de bananes. Les conditions de vie y sont très précaires : il n’y a pas d’eau potable, pas d’installations sanitaires et l’électricité y est intermittente.

L’eau est récupérée sur le continent, directement des rivières, ou achetée dans les magasins. L’électricité provient d’un générateur public qui ne fonctionne que quelques heures la nuit. Rares sont ceux qui disposent d’un générateur privé ou de panneaux solaires. De simples cabines posées au bout d’un ponton font office de toilettes.

«On pense à nos enfants»

Le sol des habitations est en terre battue, les murs et les toits en bois ou tôle. Et pour couronner le tout, la mer ne cesse donc de monter. «Nous avons remarqué que la marée monte», raconte Magdalena Martinez, une enseignante à la retraite de 73 ans, tout en tissant un vêtement traditionnel dans la maison familiale. «On pense qu’on va couler, on sait que ça va arriver, dans de nombreuses années encore, mais on pense à nos enfants, nous devons trouver quelque chose où ils pourront vivre en paix.»

«J’aimerais partir rapidement, parce que je sais que là-bas, nous aurons l’électricité 24 heures sur 24, il y aura des ventilateurs, l’air conditionné…»

Braulio Navarro, enseignant de l’école primaire de Carti Sugdupu

Le gouvernement et la communauté indigène travaillent depuis plus de dix ans sur un projet visant à reloger 300 familles sur le continent. Le problème de la «montée des eaux» s’ajoute à celui de la «surpopulation», souligne Marcos Suira, un responsable du ministère panaméen du Logement.

Carti Sugdupu aura disparu d’ici à 2050

«Avec la montée du niveau de la mer, conséquence directe du changement climatique, presque toutes les îles seront abandonnées d’ici la fin du siècle», assure Steven Paton, un scientifique du Smithsonian Tropical Research Institute (basé au Panama). «Certaines des îles les plus basses sont inondées à marée haute chaque mois», note-t-il. Selon le gouvernement, Carti Sugdupu aura disparu au plus tard en 2050.

La saison des pluies aggrave encore la situation. «L’île flotte presque à ce moment-là, il y a des inondations, cela nous affecte», se plaint Braulio Navarro, un professeur de l’école primaire de l’îlot. Âgé de 62 ans, l’homme s’apprête à déménager avec sa famille sur le continent. «J’aimerais partir rapidement, parce que je sais que là-bas, nous aurons l’électricité 24 heures sur 24, il y aura des ventilateurs, l’air conditionné. Ce sera un grand bénéfice pour ma famille.»

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Entre soulagement et nostalgie

Les 300 familles seront relogées d’ici début 2024, non loin de leur ancien îlot, sur un terrain de 22 hectares pris sur la forêt. Chaque famille disposera d’un terrain de 300 m², d’une maison de 49 m² avec deux chambres, une salle de bains, une salle à manger et une cuisine, ainsi que de l’eau potable et de l’électricité. Elles pourront agrandir leur maison et avoir un potager. Une école sera construite.

«Nous sommes contents», assure Nelson Morgan, la plus haute autorité indigène de la communauté. Magdalena Martinez rêve, elle, d’une maison où elle pourra «vivre dignement», bien qu’elle sait que son île va lui manquer. «Je suis contente, mais aussi nostalgique. Parce que j’ai appris à vivre sur l’île et j’y laisse beaucoup de rêves et de larmes.»

(AFP)

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