Hockey sur glace«Si GE Servette ravale ses émotions, je pense que ça ira au bout»
Olivier Keller, ex-joueur, livre son regard avant l’acte V de la finale entre les Aigles et Bienne. Il évoque aussi sa vilaine «louche», qui avait précipité la perte du titre en 2008.
- par
- Simon Meier
Olivier Keller, 52 ans, a été formé au GE Servette avant de faire carrière ailleurs (Lausanne, Fribourg, Lugano), à une époque où les Aigles ne planaient pas très haut. Puis l’ex-défenseur international a rallié les Vernets sur le tard (2006-2009), le temps de passer juste à côté d’un titre de champion. Quinze ans plus tard, il porte un regard gourmand sur la finale en cours entre les Grenat et Bienne, dont le cinquième acte a lieu ce samedi soir à Genève.
Quel est votre degré d’implication émotionnelle dans cette finale: la suivez-vous avec flamme ou distance?
Comme tous les Genevois et comme tous les Romands, même si Bienne est à 70% suisse-allemand, je suis ça avec beaucoup d’attention. À part le premier à Bienne, je suis allé voir tous les matches à la patinoire et c’est génial de suivre cette finale. Ça fait du bien d’avoir d’autres équipes par rapport à d’habitude.
Personne ne pourra dire qu’il s’agit d’une finale au rabais, en tout cas…
C’est sûr que non! Le jeu est hyper rapide et technique, on voit trois gardiens d’exception et c’est très fort aussi sur le plan des émotions. Franchement, niveau qualité, c’est une très grande et belle finale, même si certains trouvent que le jeu est un peu trop fermé. Mais à ce niveau de compétition, tu es obligé de fermer, de jouer serré! Parce que le but, c’est de soulever la coupe, même sur un but crado.
Qu’est-ce qui pourrait faire tourner ce duel, selon vous?
Tout le monde me parle de ces fameux petits détails dans le jeu… Moi, je pense que ça se joue avant tout sur le plan émotionnel. Si GE Servette arrive à rester calme et à ravaler ses émotions, je pense que ça ira au bout. Mais il faudra précisément éviter les pénalités à la con comme celle que Tanner Richard – par ailleurs excellent - a prise pour un coup de canne jeudi à Bienne. Genève devra se gérer sur ce plan et limiter ces sorties de zone risquées, à l’image de celles de Sami Vatanen par moments – mais bon, c’est son jeu. Bienne, qui défend très bien et attend l’erreur, me semble plus en maîtrise là-dessus. Mais ils commettent aussi des erreurs, comme Luca Hischier qui perd ce puck sur Richard sur le 2-1 de jeudi. Est-ce que le momentum a tourné? On va voir ce soir (ndlr: samedi).
2-2dans la série avant l’acte V aux Vernets… Désolé, ça nous rappelle la finale de 2008 que vous aviez fini par perdre contre Zurich. Un commentaire monsieur Keller?
Le commentaire, c’est que rien n’est jamais fini jusqu’à ce que l’horloge affiche 60:00. On l’a encore vu l’autre soir, quand Damien Brunner a mis le but de la victoire à 7 secondes de la fin (ndlr: acte II de dimanche à Bienne). Genève a trop reculé, comme nous avions trop reculé en 2008. Et puis je me suis loupé sur cette relance, j’ai voulu faire une louche, Ryan Gardner a levé sa canne, Zurich a égalisé et voilà, c’était quine (ndlr: les Lions ont remporté le match en prolongation puis la finale, deux jours plus tard aux penalties lors de l’acte VI). Donc le commentaire, c’est qu’il faut être concentré à 110% de la première à la dernière seconde. Ne jamais se dire «ça va aller, on va gérer». Non ça ne va pas aller, il faut aller la chercher.
Cette louche, elle vous trotte encore dans la tête, parfois?
Un peu plus quand GE Servette est en finale du championnat et qu’on m’en reparle. Bien sûr qu’il m’arrive d’y repenser. Pourquoi j’ai fait ça? Pourquoi je n’ai pas tiré ce puck plus fort? Pourquoi la canne de Gardner était-elle juste là? Pourquoi, pourquoi, pourquoi? Cette erreur-là m’a rappelé qu’on apprenait toujours. Après, tu peux aussi te dire: pourquoi les penalties lors du match suivant? Pourquoi toute une année de travail se décide-t-elle sur une loterie, hors du jeu? Oui, tu as des images qui te remontent de ces moments-là, malgré la prescription.
Pour finir sur une note plus positive, que vous inspire la possibilité de voir GE Servette décrocher son premier titre de champion?
Ce club mérite vraiment de soulever une fois cette coupe et j’espère qu’il y arrivera - je suis Genevois. Là, on est bien. Il y a tout pour y arriver. Alors on espère. Tout un canton espère, derrière son équipe, avec un engouement incroyable. Ça fait vraiment plaisir de vivre ça, surtout quand on pense aux 150 spectateurs qu’il y avait aux Vernets quand j’étais gamin.