Hockey sur glaceImmersion aux Vernets avec les fans de Genève et Bienne
En s’imposant lors de l’acte III de la finale des play-off, Bienne a fait le break contre GE Servette. Retour sur la soirée vécue par les supporters des deux camps.
- par
- Ruben Steiger Genève
19 h aux Vernets. À une heure du lâcher de puck, le Prime’s est bien rempli et les files devant les buvettes de la patinoire atteignent déjà plusieurs mètres. Parmi tout ce monde, quelques supporters cherchent désespérément des billets pour cet acte III entre GE Servette et Bienne. C’est le cas de Jo qui avait même prévu une pancarte pour l’occasion. «Cherche 2 places pour supporters malheureux et malchanceux». Un message qui fait mouche puisqu’il trouve les deux précieux sésames.
Outre les fans en quête d’une entrée, le parvis de la patinoire offre un spectacle mêlant légères inquiétudes mais surtout beaucoup d’excitation sur le déroulement futur de la rencontre. «Tu te rends compte, si on fait le titre, c’est le premier dans l’histoire du club», déclare un jeune supporter euphorique à son ami. Dans le camp genevois, la confiance est de mise avant la partie.
«Je suis confiant, d’autant plus avec les retours de Vatanen et Praplan, lance Aurélien, 32 ans, qui a trouvé des billets grâce à un tweet, relayé par d’autres à la billetterie du GSHC. Ils vont faire du bien et on va passer l’épaule ce soir. Je soutiens le club depuis que j’ai six ans, j’ai vu toutes les finales. Je suis toujours aussi stressé, mais bien plus serein cette année. J’ai le sentiment qu’on possède une équipe plus complète.»
Dans le camp seelandais, la sérénité est également présente. «Le match va être serré, mais j’ai confiance. Si on gagne aujourd’hui, on commencera à croire de plus en plus au titre. C’est à peine croyable en tant que Biennois, témoigne Simon, 61 ans. J’ai vécu les trois titres, mais je me souviens surtout des litres de bière qui ont suivi. Un sacre cette année serait impossible à comparer car j’ai quarante ans de plus. Avec nos années difficiles en ligue B et notre préparation catastrophique, on n’aurait jamais pu rêver d’une telle chose.»
Un sentiment confirmé par Vera (23 ans). «J’ai commencé à suivre le club en ligue B et la progression s’est faite étape par étape, donc je n’aurai jamais pu imaginer un titre.» «Dès son plus jeune âge, environ cinq ans, je l’ai amenée au match», glisse Simon avec le sourire.
Après le premier tiers (0-0), tout aussi indécis que les deux premiers duels de la finale, on retrouve Jimmy, 33 ans, fans des Aigles. «Ça ne m’arrive pas souvent, et encore moins depuis le début des play-off, mais ce soir je suis vraiment serein. Les retours de Vatanen et Praplan m’ont mis un coup de boost.»
Avec son maillot de Teemu Hartikainen, il avoue vivre cette finale différemment des précédentes. «Beaucoup de choses ont changé dans ma vie. J’ai vu beaucoup de hockey depuis et cette année, on a la chance de voir l’équipe la plus incroyable de l’histoire du club. On est mûrs pour un titre. Ce serait un truc de fou. Vingt ans que je supporte le GSHC et que j’espère vivre quelque chose de grand. Un triomphe serait un accomplissement.» Rendez-vous est fixé avec Jimmy pour échanger au terme de l’affrontement.
Dans le deuxième tiers, les Grenat dominent mais concèdent le 0-1 sur un tir précis de Toni Rajala (31e). Une réussite célébrée par Reto, presque 50 ans, dans la tribune principale, au milieu des spectateurs servettiens. «L’accueil des Genevois est incroyable. Ici, contrairement à d’autres patinoires en Suisse, tu peux te permettre d’applaudir et soutenir ton équipe.»
Le Biennois, qui a vécu absolument tous les matches sur place du HCB cette saison, vit cette finale comme un rêve éveillé. «Après notre préparation, je n’y aurai jamais cru. Je suis ce club depuis 35 ans donc je n’ai malheureusement pas vécu les trois titres. Gagner cette année représenterait donc le plus grand bonheur. Même en ligue B, pendant les années difficiles, j’étais présent, je suivais les matches avec la même ferveur pour vivre un jour des moments comme aujourd’hui.»
L’expérimenté supporter ne cache pas que l’avantage de ses joueurs sort un peu de nulle part. «Honnêtement, c’est presque un miracle de mener 0-1 après 40 minutes. Joren (ndlr: van Pottelberghe) fait un match incroyable. En discutant avec un collègue à midi, on était sûrs qu’il allait jouer. Ce n’est quand même pas si mal d’avoir un aussi bon deuxième gardien (rires).»
Les années de supporterisme de Reto contrastent avec Perrine (26 ans), fan du GSHC depuis seulement une saison. Pourtant, la même passion les habite. «Je suis tellement stressée, l’ambiance est incroyable mais je dois encore apprendre quelques règles. Il faut vraiment qu’on égalise.»
Les souhaits de Perrine sont entendus par Sami Vatanen. Le Finlandais envoie les deux équipes en prolongation d’un maître tir dans la lucarne en jeu de puissance (55e). Le temps supplémentaire est outrageusement dominé par les hommes de Jan Cadieux. Mais, sur une perte de puck de Vatanen, Mike Künzle sert Yanick Stämpfli qui peut crucifier Robert Mayer (78e).
Malgré l’immense déception, Jimmy tient sa promesse et vient débriefer cette douloureuse défaite. «Je suis dépité mais j’y crois encore. Tant qu’on n’en aura pas perdu quatre, ça sera toujours possible. On l’a vu avec Zoug l’an dernier.» Plus que le revers, c’est le scénario de celui-ci qui fait mal. «Bienne a une chatte intersidérale, celle de Deschamps à côté, c’est un matou de salon. Ils ont été archi-dominés toute la prolongation et ils marquent sur une petite erreur. Ils ont peut-être la chance du futur champion.»
Cette réussite a irradié de bonheur les fans Biennois. «On n’aurait jamais misé sur un but décisif de Stämpfli. Ni de personne d’ailleurs. On imaginait que Genève allait inscrire le deuxième», admet Raphaël, 40 ans. Avec Gabriel (36 ans), les deux hommes attendent leurs héros et racontent comment ils ont vécu ce but au milieu des spectateurs genevois. «C’était fantastique. Il faut dire qu’on a été très bien accueillis. On a rencontré des gens hypersympas. Il faut le dire, ils ont été très fair-play, on n’a reçu aucune insulte lorsqu’on a bruyamment célébré la victoire. C’était vraiment une belle soirée, il manque juste de la bière sans alcool aux Vernets.»
Raphaël a d’ailleurs une belle anecdote à raconter pour montrer cette sympathie entre les deux camps. «J’ai rencontré des Genevois qui ne peuvent pas être là samedi et j’ai pu avoir leurs billets. Un geste incroyable. Je serai présent samedi pour fêter le titre.»
«C’est une belle histoire, mais il faut aussi dire que je leur ai payé des saucisses frites avant, rigole Gabriel. Personnellement, je ne peux pas venir samedi. J’ai le mariage de mon meilleur ami, mais si Bienne fait le titre, on ira fêter en ville. Mais gardons les pieds sur terre.»