Football – Pourquoi Yakin a-t-il appelé Imeri et Okoh?

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FootballPourquoi Yakin a-t-il appelé Imeri et Okoh?

Le Genevois de 21 ans et le Vaudois de 18 ans ont une expérience très limitée du haut niveau. Et pourtant, les voilà déjà en équipe de Suisse.

Valentin Schnorhk Lugano
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Valentin Schnorhk Lugano
Bryan Okoh a découvert l’équipe de Suisse à Lugano lundi.

Bryan Okoh a découvert l’équipe de Suisse à Lugano lundi.

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En tant que sélectionneur national, aucune décision n’est anodine. Chaque choix est sujet à l’interprétation et au commentaire. Murat Yakin n’a pas de raison de ne pas le savoir. Encore plus lorsqu’il s’agit de joueurs. Le patron de l’équipe de Suisse n’est bien sûr pas servi par la chance, et il doit parfois se creuser quelque peu le crâne pour trouver des noms à ajouter sur sa liste. Encore plus lorsqu’il se retrouve avec Gregor Kobel, Nico Elvedi, Christian Fassnacht et Breel Embolo forfaits (avant l’annonce de celui de Zuber) au lendemain d’avoir communiqué sa sélection pour affronter l’Italie (vendredi à Rome) et la Bulgarie (lundi prochain à Lucerne). Mais en appelant Philipp Köhn, et surtout Bryan Okoh et Kastriot Imeri, Yakin s’expose forcément aux questionnements, alors que la Suisse s’est réunie lundi à Lugano.

Si le choix de Köhn comme 3e gardien a un caractère légitime (il dispute la Ligue des champions avec le RB Salzbourg), ceux d’Okoh et Imeri sont forcément surprenants. Le premier (18 ans) n’était même pas de piquet (mais convoqué avec les M21 de Mauro Lustrinelli) et n’a disputé que 33 minutes de Coupe d’Autriche avec Salzbourg cette saison. Le second (21 ans) s’impose en tant que réel titulaire avec Servette, a marqué 4 buts et a brillé avec les M21, mais avec une expérience du haut niveau encore très relative. Là où parmi les joueurs de piquet il y avait – entre autres – Becir Omeragic (présent dans le groupe à l’Euro et indiscutable à Zurich), Sandro Lauper (habitué des Coupes d’Europe avec YB), Cedric Itten ou encore Jordan Lotomba, dans des rôles différents.

«Ce match contre l’Italie représentera un défi important pour nous. Nous devons chercher des solutions, mais le cadre est assez large pour les trouver»

Murat Yakin, sélectionneur de l’équipe de Suisse

«Ce match contre l’Italie représentera un défi important pour nous, entrevoit le sélectionneur. Nous devons chercher des solutions, mais le cadre est assez large, avec assez de qualités, pour les trouver. À nous ensuite de travailler les relations tactiques au cours de la semaine.» Parmi les possibilités qu’il s’est choisies, Yakin a donc inclus Okoh et Imeri dans sa liste. Sont-ils des options viables? Des questions se posent. En les appelant, le technicien délivre obligatoirement un message. Mais lequel?

Faire découvrir l’équipe A

Il y a peut-être celui de rajeunir son effectif. Au-delà même de leurs performances, le Vaudois et le Genevois incarnent l’avenir de l’équipe de Suisse. Sans que rien ne permette d’affirmer qu’ils seront là pour une décennie au moins. Le football est trop incertain pour cela. Mais l’expérience a déjà montré que faire découvrir le groupe à des jeunes talents pouvait finir par être probant. En juin 2017, pour affronter la Biélorussie à Neuchâtel, Vladimir Petkovic avait appelé Gregor Kobel, Ulisses Garcia, Florent Hadergjonaj, Djibril Sow et Anto Grgic. Ils avaient un passif très limité en club, mais chacun présentait des dispositions intéressantes pour l’avenir. Quatre ans plus tard, trois éléments appartiennent au cadre de Yakin, alors que Hadergjonaj (qui avait joué contre la Biélorussie) est international kosovar et Grgic un honnête joueur de Super League.

Kastriot Imeri a rejoint l’équipe de Suisse A lundi.

Kastriot Imeri a rejoint l’équipe de Suisse A lundi.

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Avec Imeri ou Okoh, Yakin prépare d’une certaine manière le terrain. Pour aujourd’hui, demain ou après-demain. Ou peut-être jamais. Car l’un et l’autre ne connaissent pour l’instant rien du haut niveau, là où ils devront durer. Sauf ce qui est du football des moins de 21 ans, en ce qui concerne Imeri. L’appeler, c’est considérer ses prestations avec la sélection de Mauro Lustrinelli, dont il est devenu un leader évident. Et c’est reconnaître l’impact qu’il peut avoir sur une équipe, même sur de courtes périodes (comme lorsqu’il était remplaçant lors de l’Euro M21 en mars dernier).

Une déclaration d’intention?

Mais valoriser les M21, c’est aussi ne pas les délester. En sélectionnant Okoh, Yakin sait qu’il cause un tort très relatif à sa «réserve»: Becir Omeragic ou Marco Bürch (sachant que Stergiou est blessé) auront un rôle prépondérant dans les deux rencontres contre la Moldavie et le Pays de Galles. Okoh n’y aurait été qu’un remplaçant. Et le retenir en A représente un risque limité, sachant que même en l’absence d’Elvedi, Yakin a du choix en défense centrale: Akanji, Schär, Cömert, voire Fabian Frei passent devant l’ancien Lausannois.

Et puis, au-delà des considérations sportives, Imeri et Okoh pourraient un jour ou l’autre jouer pour une autre équipe nationale: l’Albanie ou le Kosovo pour le Servettien, les États-Unis pour le joueur de Salzbourg. Même s’ils n’ont jamais manifesté le désir de tourner le dos à la Suisse, il faut le noter. Reste que les retenir, c’est leur faire une déclaration d’intention: la Suisse compte vraiment sur eux. Et s’ils devaient jouer, alors ce serait les bloquer définitivement. Cela a-t-il pu peser dans la réflexion de Yakin et de l’ASF?

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