IrakLégislatives: une abstention record depuis Saddam Hussein
L’affluence aux bureaux de vote, dimanche, est restée très limitée. Les résultats doivent être annoncées ce lundi, mais des candidats ont célébré par avance leur victoire cette nuit.
Les législatives anticipées en Irak ont été marquées par une forte abstention d’électeurs exaspérés par une corruption endémique, des services publics aux abonnés absents et un système qu’ils jugent incapable d’améliorer leurs conditions de vie, selon des chiffres officiels, lundi.
Dans la nuit, à Bagdad ou encore à Nassiriya dans le sud, des candidats ont célébré par avance leur victoire à grand renfort de feux d’artifice, même si les résultats officiels du scrutin de dimanche doivent être annoncés plus tard lundi par la commission électorale.
Quelque 25 millions d’électeurs étaient appelés aux urnes pour choisir parmi plus de 3200 candidats. La commission électorale a annoncé un taux de participation «préliminaire» de 41%, se basant sur les résultats dans 94% des bureaux de vote.
Une abstention record depuis 2003 et le renversement du dictateur Saddam Hussein dans le sillage de l’invasion de l’Irak par les troupes américaines.
Dans la capitale Bagdad, le taux a évolué entre 31% et 34%, selon les quartiers. Dans des bureaux de vote visités par l’AFP, l’affluence est restée très limitée.
En 2018, la participation s’est établie à 44,52%. A l’époque les opposants, mais aussi des experts avaient estimé ces chiffres officiels gonflés.
Les élections de dimanche étaient initialement prévues en 2022. Elles ont été avancées pour calmer la contestation née fin 2019, expression d’un immense ras-le-bol populaire contre une corruption tentaculaire et une économie en panne dans un pays riche en pétrole.
Réprimé dans le sang -au moins 600 morts et 30’000 blessés-, le mouvement s’est essoufflé après quelques mois. Des dizaines de militants ont été victimes d’enlèvements et d’assassinats, imputés aux factions armées fidèles à l’Iran, au rôle incontournable en Irak.
Manque de légitimité
«La faible participation était à prévoir», a expliqué à l’AFP le politologue Sajad Jiyad. «Les gens ne sont pas convaincus que les élections entraîneront un changement, et une amélioration des performances du gouvernement ou dans la prestation des services publics».
«Ce n’est pas seulement la légitimité du prochain Premier ministre qui sera remise en cause. Mais aussi la légitimité du gouvernement, de l’Etat et du système entier», selon lui.
Selon des experts, les grands blocs traditionnels devraient préserver leur représentation dans un Parlement fragmenté, où l’absence d’une majorité claire devra obliger à négocier des alliances.
Le turbulent mais influent clerc chiite Moqtada al-Sadr, dont le courant est considéré comme favori, s’est félicité du «succès» du processus électoral.
En cas de victoire avérée, le courant sadriste devra encore composer avec les grands rivaux pro-Iran du Hachd al-Chaabi, entrés au Parlement pour la première fois en 2018 en surfant sur la victoire contre le groupe jihadiste Etat islamique (EI).
Si la scène politique reste polarisée sur les mêmes dossiers sensibles -que ce soit la présence des troupes américaines ou l’influence du grand voisin iranien- les partis entameront de longues tractations pour s’accorder sur un nouveau Premier ministre, poste qui revient traditionnellement à un musulman chiite.