VaudPapa accusé d’avoir frappé ses petits: les autorités ont tardé
L’homme de 34 ans répond de ses actes présumés devant le Tribunal de La Côte ce mercredi. Le Service de protection de la jeunesse (SPJ) a mis un an et demi pour le dénoncer.
- par
- Evelyne Emeri
2 ans et demi et pas même un an. C’est à ces âges respectifs, dès fin 2017, que les deux enfants du prévenu ont appris les coups, les gifles, les objets qui volent et qui blessent, les menaces de mort, le dénigrement, les humiliations, les hématomes camouflés au fond de teint, l’absence d’hygiène et les logements insalubres. L’acte d’accusation que viendra soutenir la procureure Marlène Collaud devant le Tribunal correctionnel d’arrondissement de La Côte, à Nyon (VD), fait frissonner. 32 pages où l’on découvre la longue liste des infractions retenues contre Musa*, actuellement en exécution anticipée de peine. Un papa séparé auquel l’on a confié l’autorité parentale et la garde de ses garçons en octobre 2018, alors que ses comportements violents avaient déjà commencé.
Des cris et des supplications
Il aura fallu deux alertes au Service de protection de la jeunesse (SPJ) pour que le ressortissant africain soit enfin confondu et cesse les maltraitances qui s’étendent de fin 2017 à mars 2020. La première alerte, c’est une voisine qui la donne en septembre 2018: elle évoque des cris et des supplications de jeunes enfants. Un second signalement survient en décembre 2019: un anonyme affirme que les bambins sont négligés et violentés physiquement. Dans l’intervalle, le SPJ constate que les deux petits présentent des blessures que l’accusé ne peut expliquer. Nous sommes en septembre 2019. Le service vaudois ne le dénoncera à la police que le 20 mars 2020. Le Nigérian, âgé aujourd’hui de 34 ans, est placé en détention provisoire quelques jours plus tard.
Hématomes et énurésie à l’école
Il est notamment reproché à cet individu d’avoir envoyé ses gosses à l’école avec des hématomes au visage. Au dire du corps enseignant, le cadet y serait même arrivé en boitant et souffrant d’énurésie dans la cour de récréation. L’accusation atteste que Musa n’a pas pris soin de ses enfants et ne leur a pas donné l’éducation minimale pour s’assurer de leur plein épanouissement. Il les aurait ainsi logés dans un box de dépôt de son entreprise et vêtus de vêtements sales, voire souillés. Il aurait été réticent à les emmener chez le médecin et à suivre les traitements. Et, plutôt que de s’en occuper, préféré les laisser devant la télévision. Il serait arrivé qu’il les laisse seuls à la maison, à 3 et 4 ans. Une consommation régulière d’alcool est également mentionnée.
Sexe et baby-sitters
Dès juin 2019, le prévenu - qui purgeait une peine sous le régime de la semi-liberté (ndlr. nuit en prison) - a préféré confier ses deux garçons à de jeunes babysitters sans expérience et sans papiers plutôt qu’à leur mère, prétend toujours la procureure. Il aurait, à ces occasions, parlé de sexe en présence de ses fils et même expliqué comment s’y prendre avec les filles. Il aurait alors visionné un film pornographique et leur aurait fait boire de l’alcool. Les deux mineurs auraient encore été transportés dans un fourgon Ford par leur père qui n’était pas détenteur d’un permis de conduire. Compte tenu de tous ces manquements éducationnels soutenus par le Ministère public vaudois, il s’avère que leur développement physique et psychique a été concrètement mis en danger.
Étranglement et photos dénudées
À parcourir l’acte d’accusation, le palmarès délictueux de Musa ne s’arrête pas là. Le parquet accuse le trentenaire d’avoir calomnié gravement le nouveau compagnon de la mère des garçons, le traitant de «pervers […] car il leur touche les zizis». Et ce juste avant son placement en détention, lorsque la maman saisit la Justice de paix afin de récupérer la garde des petits. Le papa va jusqu’à dénoncer le beau-père aux autorités judiciaires. Le même s’en serait aussi pris à son ex-compagne (ndlr. pas la mère des petites victimes) venue s’occuper des bambins qu’il aurait menacée, frappée au visage et étranglée. Il se serait également introduit dans sa boîte mail pour accéder à des photos d’elle dénudées.
Usurpation d’identité
Dans le cadre professionnel et promettant à ses futures proies de s’associer à ses entreprises actives dans les travaux généraux et l’immobilier (ndlr. en faillite depuis l’automne 2020), l’individu aurait produit de faux documents et de faux certificats dans le but évident de mener grand train de vie. Insolvable et endetté, il aurait ainsi falsifié des signatures (de baby-sitters, d’employés…) et créé de fausses adresses email pour obtenir des logements luxueux - dont une villa à 6650 francs par mois - et une Audi Q8. Il aurait encore usurpé des identités, en particulier pour toucher le chômage. Enfin, géré ses sociétés de manière fautive (AVS, comptabilité…).
Infractions sans fin
La procureure Marlène Collaud a retenu contre Musa une série de qualifications sans fin: lésions corporelles simples qualifiées (sur un enfant dont il avait la garde/avec un objet dangereux), voies de fait qualifiées (violence psychologique), remise à des enfants de substances pouvant mettre en danger leur santé, pornographie, violation du devoir d’assistance ou d’éducation, violation des règles de la circulation routière (conduite sans autorisation, sans permis, sans assurance responsabilité civile, usage abusif de permis et de plaques), calomnie, dénonciation calomnieuse, menaces, accès indu à un système informatique, escroquerie par métier, faux dans les titres, faux dans les certificats, gestion fautive, violation de l’obligation de tenir une comptabilité, infraction à la Loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants et infraction à la Loi fédérale sur les étrangers et l’intégration.
*Prénom d’emprunt