Bande dessinéeOn a marché dans le monde de Tintin
Lausanne accueille une grande aventure immersive dans l’univers du héros d’Hergé, les dessins venant envelopper le spectateur au son de la musique pop. Magique!
- par
- Michel Pralong
Voilà une expérience que vous n’êtes pas près d’oublier! Dès vendredi 13 octobre et jusqu’au 11 février, la halle 35 de Beaulieu à Lausanne accueille «Tintin l’aventure immersive». Il s’agit d’une plongée dans l’univers du héros d’Hergé, comme cela a été fait par exemple avec les peintures de Van Gogh et de Frida Kahlo. Mais Tintin est le premier personnage de BD au monde à avoir droit à un tel spectacle. Et c’est nettement plus amusant!
L’ayant droit des œuvres d’Hergé, Moulinsart, a changé de nom pour devenir Tintinimaginatio. Car il en faut de l’imagination pour continuer à faire vivre un héros dont le dernier album complet remonte à 1976. Yves Février, en charge du numérique chez Tintinimaginatio a lancé le projet d’une aventure immersive en 2021. Il a choisi Culturespaces, pionnier français d’expo numériques de ce type, pour réaliser cette expérience, qui a pour la première fois été projetée à Paris en octobre et qui maintenant a lieu dans plusieurs endroits en Europe.
C’est Opus One Expo qui a fait venir cette aventure immersive à Lausanne, elle qui y avait déjà réalisé l’exposition immersive de Frida Kahlo. Mais Yves Février aime à le répéter sur le modèle du «Ceci n’est pas une pipe» de son compatriote Magritte, ceci n’est pas une expo. Et pour l’avoir testé, c’est en effet bien plus. Lui la qualifie d’«Aventure jubilatoire» et c’est tout à fait cela. C’est 35 minutes de pure magie.
Dans la grande halle, où ont été construit un cylindre creux dans lequel le visiteur peut entrer et un grand cube, plus de 2000 images exclusivement tirées des albums sont projetées sur tous les murs et le sol. On peut s’asseoir, mais le mieux est de déambuler en admirant les cases d’Hergé qui sont ici au moins 100 fois plus grandes que les originales. Il ne s’agit pas de dessin animé, mais d’une forme d’animation des dessins, nous présentant les couvertures, l’évolution graphique du personnage, les bons, les méchants, l’aventure, les moyens de transport, les voyages jusqu’au happy end.
Les Beatles, Pink Floyd et Rascar Capac
C’est beaucoup plus pop que les autres immersions artistiques. D’ailleurs, élément crucial de ce spectacle magique: la musique. Les Beatles, David Bowie ou Pink Floyd («The Dark Side of the Moon» pour le voyage sur la Lune, bien sûr) confirment ce que rappelle Yves Février: Tintin est un héros de la pop culture. «Et ces artistes que nous avons choisis en bande-son figuraient tous dans les disques que possédait Hergé, qui avait même un album de Police». Sans oublier le fameux air des bijoux, en vrai, qui finit en fracas. Pas besoin de boucher les oreilles des enfants pour les jurons de Haddock, ils se déversent à flot, mais par écrit.
C’est brillamment imaginé et monté. On rit, on sourit, on est émerveillé à tout instant. On frissonne même quand la momie de Rascar Capac, qui a effrayé plus d’un jeune lecteur, s’introduit une nouvelle fois par la fenêtre pour jeter une boule de cristal au sol. C’est encore plus terrifiant sur ces murs, avant d’enchaîner sur une séquence des cauchemars de Tintin. Avertissement aux arachnophobes, ils devront se frotter aux araignées géantes de «L’étoile mystérieuse».
Reste que l’aventure est tout public, même plus large que les 7 à 77 ans des lecteurs du journal «Tintin». «Les enfants peuvent y bouger comme ils veulent, sans besoin qu’on leur tienne la main et j’en ai vu qui essaient de carrément entrer dans les images», sourit Yves Février.
51 projecteurs pour 2500 m²
Accueillis par une fusée de Tintin de 6 mètres de haut, les visiteurs découvrent dans un vestibule un résumé de la vie d’Hergé face à l’une de ses cartes de vœux sur laquelle il avait presque dessiné tous ses personnages. Ensuite, dans la grande halle, les 51 projecteurs diffusent les images sur 2500 m², une installation qui a nécessité 21 jours de montage et 10 semi-remorques de matériel. Comme pour toutes ces aventures immersives, les billets (www.tintin.opus-one.ch) sont assez chers, dès 19 francs pour les 5-15 ans et dès 29 francs pour les adultes, mais vous pouvez rester pour plus d’une projection pour mieux voir un détail qui vous aura échappé (et il y en a beaucoup). Des milliers de tickets ont déjà été réservés, précise Opus One.
C’est franchement une expérience ébouriffante, qui vous ferait presque en sortir avec la houppe de Tintin, tant on a l’impression d’être entré dans son monde comme jamais auparavant. On a même tenté de suivre Tintin et Haddock quand ils marchent dans l’allée du château de Moulinsart pour s’inviter à un thé avec eux.
Le visiteur sort ensuite par une très belle boutique débordant d’objets «tintinesques» tous plus beaux les uns que les autres. Et si vous n’avez pas encore acheté le récent journal «Tintin» spécial 77 ans, profitez-en, il y est en vente alors qu’il est quasi épuisé ailleurs. Quant à la prochaine création numérique de Tintin, ce sera la sortie le 7 novembre d’un jeu vidéo qui promet: «Les cigares du pharaon».