Décès de Jane BirkinLe couple Birkin-Gainsbourg, de chien et chat à chic et choc
De leur rencontre en 1968 sur le tournage du film «Slogan», à leur rupture avec fracas en 1981, retour sur une relation aussi explosive qu’iconique.
Birkin-Gainsbourg, couple mythique, c’est entendu. Pourtant l’histoire avait mal commencé. Et ne finira pas mieux. Même si le lien restera indéfectible. Flashback, après le décès de Jane Birkin à 76 ans ce dimanche.
Rencontre sur un tournage
En 1968, le cinéaste Pierre Grimblat choisit Serge Gainsbourg pour incarner, dans son film «Slogan», un réalisateur de pub d’âge mûr, cynique et arrogant, qui s’éprend d’une jeune beauté. Pour l’actrice, il hésite. Son premier choix se fixe sur une amie, la mannequin-star américaine Marisa Berenson. Gainsbourg, qui vient de se faire larguer par Brigitte Bardot, est ravi.
Mais le réalisateur la juge finalement trop sophistiquée et part à la recherche du «petit chat sauvage» dont il rêve. A Londres, on lui présente 14 actrices. L’une d’elles retient son attention : une Anglaise, filiforme, entraperçue, à moitié nue, dans une scène du film «Blow Up», d’Antonioni, sorti l’année d’avant. Jane Birkin, donc, débarque à Paris pour un essai. Malgré un français balbutiant, elle est engagée. Gainsbourg, déjà célèbre, est furieux. Cette inconnue n’a rien à voir avec la mégastar qu’il espérait...
«C’est un salaud !»
Les prises de vues commencent, le couple est déjà en guerre. «Tu aimes pas moi?», demande la débutante. Il se moque, cinglant. «Je l’ai trouvé compliqué, arrogant. Il n’avait aucune gentillesse envers moi. Il me mettait très mal à l’aise», dira Jane. L’ambiance sur le plateau se détériore. «La première semaine, elle pleurait tous les soirs dans sa loge et criait: ‘’c’est un salaud, un salaud !’’», se souvient Grimblat. Serge continue à «faire la gueule».
Le metteur en scène a alors une idée: les inviter à dîner dans un très bon restaurant parisien et leur faire faux bond. Afin qu’ils puissent crever l’abcès dans un tête-à-tête forcé. Ce soir-là, Gainsbourg se détend. «Je la trouvais pas terrible et j’ai changé d’avis», admettra-t-il. «En une seule soirée, le personnage avait radicalement changé et j’étais tombée amoureuse de lui. J’ai compris que cette arrogance était de la timidité. Finalement, c’était un chou. Drôle, charmant, prévenant», dira Jane.
Couple iconique
De retour sur le plateau, ils se tiennent par la main. Débutent 12 années, dans le Paris des seventies, de passion, de glamour, de scandales (la suggestive «Décadanse»), entre la femme enfant/femme fatale, et le musicien hors-pair. L’odeur de soufre dont aime à se parfumer Gainsbourg leur vaut d’entrée un succès planétaire sur disque avec «Je t’aime moi non plus» et ses fameux râles.
«Histoire de Melody Nelson», album-concept bâti autour de Jane, sera en revanche un fiasco à sa sortie (1971), avant d’être réévalué, adulé et copieusement samplé dans les décennies suivantes. Devant les objectifs, le couple devient iconique, lui avec son négligé-chic chemises largement ouvertes/vestes cintrées/clope au bec, elle avec son combo-cool jean/t-shirt blanc/panier en osier.
«Des pleins et des déliés»
La fin de l’histoire est connue. Jane étouffe face à celui qui est devenu «Gainsbarre», enfermé dans ses excès qui se doublent parfois d’accès de violence. En 1981, elle fuit leur appartement de la rue Verneuil à Paris, avec ses filles Kate (née de son union avec John Barry) et Charlotte, et refait sa vie avec le cinéaste Jacques Doillon. Les hauts et les bas, Jane y reviendra même dans le détail dans son journal intime, «Munkey Diaries» (2018). Gainsbourg avouait dès 1989 dans les Inrocks «des pleins et des déliés», regrettant d’avoir été «brutal» sur la fin.
Mais après leur séparation, ils ne sont jamais restés loin de l’autre. Serge a notamment continué à écrire pour celle qui l’a toujours chanté. «Les dessous chics» (1983) fut ainsi la chanson préférée de Jane, pourtant composée par Serge après leur rupture.