GymnastiqueDe Tokyo à Anvers, la renaissance de Simone Biles
L’Américaine se présente comme favorite aux championnats du monde qui commencent ce samedi en Belgique. Retour sur ses deux dernières années, où elle est passée du cauchemar au rêve.
Après s’être effondrée aux Jeux olympiques de Tokyo en 2021, la superstar américaine de la gymnastique Simone Biles a passé deux ans loin des compétitions, occupée notamment à solder un lourd passé lié au scandale d’agressions sexuelles Nassar.
Août 2021: le cauchemar de Tokyo
Dans la bulle Covid-19 de la capitale japonaise, Biles débarque avec un statut de star des Jeux, où on attend pour elle une pluie de médailles. Mais l’Américaine sait, au fond d’elle-même, qu’elle ne peut plus assumer ce poids. «J’aurais dû abandonner bien avant Tokyo», expliquera-t-elle.
Lors du concours général par équipes, elle renonce brutalement, victime de «twisties», pertes de repères dans l’espace pendant ses acrobaties. Au nom de sa santé mentale et physique, la gymnaste renonce à plusieurs épreuves avant de décrocher, au courage, le bronze de la poutre en toute fin de programme.
Sa transparence face à ses problèmes consacre définitivement le sujet de la santé mentale dans le sport de haut niveau.
Septembre 2021: le Congrès
«On nous a laissées tomber et on nous doit des explications», déclare Simone Biles, la voix brisée par l’émotion. En septembre 2021, l’Américaine témoigne avec plusieurs autres gymnastes devant une commission du Sénat chargée de se pencher sur les «manquements au devoir» du FBI dans l’enquête sur Larry Nassar.
L’ex-médecin de l’équipe féminine américaine a été condamné en 2017 et 2018 à la réclusion à perpétuité pour des agressions sexuelles commises pendant deux décennies sur plus de 250 jeunes athlètes, dont la superstar texane. «Je rends responsable Larry Nassar et je rends responsable un système entier qui a permis et a perpétré ces abus, la Fédération américaine de gymnastique et le Comité olympique américain», accuse-t-elle.
En décembre de la même année, les victimes reçoivent 380 millions de dollars (environ 353 millions de francs suisses au cours de l’époque) après un accord conclu avec la Fédération, le Comité olympique et paralympique (USOPC) américain et leurs assureurs.
En juin 2022, Biles et 90 autres gymnastes américaines réclament en justice un milliard de dollars à la police fédérale, accusée de «négligence».
Fin 2021: la tournée
«Un show pop, gymnique et spectaculaire», résume Biles, qui lance fin 2021 un projet de longue date de spectacle qui célèbre «la performance dans la joie», résume-t-elle, loin de toute compétition.
Entourée de plusieurs des meilleures gymnastes du monde, dont la Française Mélanie de Jesus dos Santos, Biles enchaîne une trentaine de dates dans tout le pays entre le 21 septembre et le 7 novembre.
Un tableau du show, titré «surmenée», aborde même le combat intérieur de Biles, au milieu des strass, acrobaties et paillettes.
Juillet 2022: les honneurs
«Voilà aujourd’hui une nouvelle médaille à votre palmarès», sourit le président des États-Unis Joe Biden, alors qu’il remet le 7 juillet 2022 la médaille présidentielle de la Liberté à la gymnaste, déjà 32 fois récompensée aux Mondiaux et aux Jeux olympiques.
Biles reçoit la plus haute distinction civile américaine en compagnie de la footballeuse Megan Rapinoe, de l’acteur Denzel Washington ou encore, à titre posthume, du créateur d’Apple Steve Jobs, pour leur «contribution exceptionnelle» à la prospérité et aux valeurs des Etats-Unis, à la paix dans le monde ou à d’autres projets d’importance.
Avril/mai 2023: l’anneau
«Je suis (émoji cœur) officiellement Owens (émoji cœur)», poste la championne sur son compte Instagram, désormais au nom de Simone Biles Owens.
La gymnaste épouse en avril Jonathan Owens (alors 27 ans), joueur de football américain aux Houston Texans (désormais aux Packers de Green Bay). La cérémonie se déroule le 8 mai sur une plage de sable blanc de Cabo, au Mexique, entre couronnes de fleurs, violoncelle et repas de gala.
Août 2023: le retour de la reine
Pour sa première compétition depuis les Jeux olympiques de Tokyo, Biles électrise le public le 5 août lors de l’US Classic de Chicago avec une performance époustouflante, créditée de 59,100 points au concours général (la Brésilienne Rebeca Andrade a été sacrée championne du monde en 2022 avec 56,899 pts).
«Je suis surprise, choquée. Tout s’est super bien passé. J’ai beaucoup travaillé sur moi, et je crois en moi un peu plus», apprécie-t-elle, précisant qu’elle continue de suivre une thérapie pour l’aspect «mental». La reine du praticable triomphe ensuite pour la huitième fois aux championnats des États-Unis le 27 août à San Jose (Californie).
Après avoir éludé plusieurs fois la question, elle assume viser de nouveau l’or olympique à Paris en 2024, dans une interview à la chaîne NBC le 7 septembre. Un chemin qui passe par les Mondiaux d’Anvers et la Belgique dès ce samedi.