FOOTBALLAu FC Sion, serait-on plus «fainéant» qu’ailleurs?
Au moment où le club valaisan s’enfonce dans la crise, Fabio Celestini doit d’abord s’attacher à réveiller des valeurs de solidarité enfouies. Où l’on reparle de l’état d’esprit évanescent d’un groupe qui peine à se faire violence sur la durée.
- par
- Nicolas Jacquier
Sait-on ce qui se passe dans la tête d’un joueur du FC Sion quand il retrouve Tourbillon? De la trouille? Pourquoi ne parvient-il pas à y exprimer son supposé potentiel, ce pour quoi il a d’ailleurs été engagé? Peu importent les raisons, le blocage, sans doute psychologique, est là, aussi bien individuel que collectif pour une équipe incapable d’offrir à son public ce qu’il vient chercher: ces trois points qui, depuis bien trop longtemps, filent systématiquement et avec obstination chez le visiteur, désormais assuré de passer une après-midi des plus paisibles chaque fois qu’il passe les tunnels de Saint-Maurice.
Ce dimanche, Sion, qui avait pourtant l’occasion rêvée d’effacer la pénible impression laissée une semaine plus tôt à la Praille - contre Servette, les Valaisans avaient sauvé un point mais pas les apparences -, n’a pas réussi à masquer les insignes faiblesses d’une équipe désormais en crise autant de jeu que de résultats. Parce que les chiffres sont têtus. Contre Zurich, Sion s’est ainsi incliné pour la sixième fois de la saison devant son public (0-1).
Un bilan indigne du caractère qu’on lui a longtemps prêté et dans lequel beaucoup de ses fans pouvaient encore se reconnaître. La vérité, c’est que le feu de la passion s’est aujourd’hui éteint parce que cette équipe dans laquelle le public valaisan aimait à s’identifier ne dégage plus grand-chose en termes d’émotions – faute de posséder une véritable âme. Ce que l’on peut en déduire, c’est que l’ambitieux projet Fabio Celestini - avec un seul point récolté en trois parties - n’a toujours pas décollé. Alors que le Vaudois avait eu l’habitude jusque-là de réaliser immédiatement des résultats avec ses nouvelles équipes, les progrès ici tardent cette fois à se manifester au classement.
Ce qu’il faut retenir
À Tourbillon, il a beaucoup été question d’une VAR à géométrie variable dans ces interventions comme ces silences. Si Reto Ziegler a justement été rattrapé par la patrouille pour une main plutôt évidente, pourquoi M. Tschudi, préposé à la surveillance des seize mètres avec son acolyte M. Turkes, est-il resté de marbre sur la main zurichoise de Hornschuh quelques secondes plus tôt, sur l’occasion d’Itaitinga détournée par Brecher? Quand elle remplace une injustice par une autre, le système ne résout rien. Que l’on soit bien d’accord, Sion a certes été floué sur ce coup-là mais cela n’efface au demeurant en rien la pauvreté du «spectacle» présenté
Jeudi passé à Riddes, lors du point presse précédant le match contre Zurich, Fabio Celestini avait insisté sur les valeurs du travail. «Le FC Sion, avait-il martelé en substance, doit retrouver une culture du travail pour être performant.» De deux choses l’une, soit les joueurs qui défilent à la Porte d’Octodure depuis des années, prenant chaque fois un mauvais pli, travaillent mal dès lors qu’ils enfilent le maillot valaisan; soit ils ont tendance à saboter le boulot en se contentant du strict minimum. Tombés dans une sorte d’embourgeoisement, deviendraient-ils tous alors des footballeurs paresseux, peinant à se faire violence autrement que par les mots? Osons l’hypothèse: à Sion, serait-on plus «fainéant» qu’ailleurs? Devant les médias ce dimanche, on a été assez estomaqué d’entendre son nouvel entraîneur se féliciter de la bonne «mentalité» affichée par ses protégés. Euh… parce qu’un état d’esprit et un devoir de solidarité, cela ne devrait pas aller d’office avec la fiche de paie? On commence à être lassé de ses joueurs qui, le week-end venu, ne parviennent pas à s’arracher pour les couleurs qu’ils sont censés défendre. Alors qu’un sentiment d’urgence commence à se faire bigrement sentir, on attend toujours une vraie révolte dans les actes. Et peut-être moins de bla-bla.
On peut s’interroger sur les raisons qui ont poussé Fabio Celestini à changer de système. Il y a bien sûr le poids des suspendus: devoir se priver de quatre joueurs cadres, ce n’est pas rien et cela a forcément dû peser au moment du choix. Mais pourquoi ne pas avoir conservé le même système en y incluant «simplement» d’autres acteurs, quitte à l’interpréter autrement? Et pourquoi vouloir absolument faire d’Ilyas Chouaref le centre-avant qu’il n’est pas? Relégué sur le banc, le banni Gaëtan Karlen ne joue même plus les utilités. Moins de deux ans après avoir été pour beaucoup dans le maintien du FC Sion en Super League, l’attaquant semble avoir épuisé tout son crédit aux yeux des différents techniciens. Le voir être condamné au banc (tout comme Sio du reste) alors même que les solutions offensives étaient rares avait tout d’un camouflet.
Le meilleur joueur sédunois
Heinz Lindner. Lui a correctement effectué son boulot, sauvant deux fois devant Dzemaili en première période. Devenu papa d’un petit Noah le 1er février avec son épouse Anna Christina, l’international autrichien ne s’est pas dérobé. Tous ne peuvent en dire autant.
Les moins bons
Le retour de Reto Ziegler en Valais est en train de tourner à la débandade. Déjà impliqué sur les trois buts encaissés contre Lugano voici deux semaines, le défenseur de 37 ans, promu pour l’occasion capitaine, a coûté un nouveau but ce dimanche. Ce n’est bien évidemment pas ce que l’on attend d’un renfort… La performance de Kevin Bua interpelle aussi tant celui-ci a été transparent passé le feu de paille des 270 premières secondes.
La décla’
Un avenir teinté de flou
Le retrait financier confirmé de Christian Constantin au 30 juin 2024 d’un club qu’il n’aura eu cesse de soutenir sans compter durant plus d’un quart de siècle ne va pas manquer de peser sur le FC Sion ces prochains mois, sans doute dans des proportions que l’on peine à imaginer. Et sans doute cela commence-t-il déjà à se faire sentir insidieusement.
Chez les fidèles existe déjà le sentiment d’assister à une fin de règne. Comme s’il fallait solder les affaires courantes dans un environnement en train de devenir, sinon malsain, du moins un peu moins épanouissant que sous d’autres cieux. Avec cette histoire de nouveau stade dans lequel il se dit prêt à mettre 50 millions de francs, l’intéressé a certes allumé un pare-feu afin d’atténuer le choc. Mais ce projet, compte tenu des oppositions qu’il va susciter et du risque de votation populaire, semble mort-né. D’ailleurs CC lui-même y croit-il vraiment? Sans doute beaucoup moins qu’à l’époque où il projetait de construire un stade le long du Rhône, peu importe où.
La question en pensant à demain
Attendu samedi soir à Saint-Jacques où il ne s’est plus imposé en championnat depuis l’été 1997, Sion criera-t-il enfin victoire à Bâle? Ce choc de deux équipes en crise vaudra quoi qu’il en soit très cher. En cas d’exploit, le visiteur pourrait même déboulonner Alex Frei d’un siège d’entraîneur toujours plus branlant…