Attentats de janvier 2015Vingt ans de réclusion requis contre un des accusés
Mardi, la justice française a demandé vingt ans de prison à l’encontre de l’un des hommes accusés d’avoir participé aux attentats de janvier 2015, à Paris.
Près de huit ans après les attentats jihadistes contre «Charlie Hebdo» et l’Hyper Cacher, l’accusation a requis mardi vingt ans de réclusion à l’encontre d’Amar R., un des deux accusés rejugés en appel pour leur rôle présumé dans ces attaques. Le ministère public prendra ses réquisitions à l’égard du principal accusé, Ali Riza P., dans l’après-midi.
Dans la première partie de ce réquisitoire à deux voix, l’avocate générale Delphine Thibierge a demandé à la cour d’assises spéciale de Paris, qui rejuge l’affaire depuis le 12 septembre, de condamner Amar R. à vingt ans de réclusion criminelle, assortis d’une période de sûreté des deux tiers.
En première instance, en décembre 2020, les juges avaient condamné ce proche du tueur de l’Hyper Cacher Amedy C. à cette même peine de vingt ans de prison, allant plus loin que les réquisitions du parquet national antiterroriste qui avait sollicité dix-sept ans à son encontre.
Il nie les faits
Amar R., qui est rejugé à 41 ans pour association de malfaiteurs terroriste criminelle, a toujours contesté tout lien avec les attentats de janvier 2015. Lors des débats, souvent vifs, il a répété n’avoir «rien à voir avec les armes, rien à voir avec l’islam, rien à voir avec le terrorisme», avançant une simple «relation amicale» avec Amedy C., un ancien «pote de prison» avec lequel il «rigolait bien».
Ses explications sur plusieurs déplacements dans la région lilloise dans les mois précédant les attaques, liés selon lui à un trafic de stupéfiants et non pour récupérer des armes, ou encore ses rencontres avec Amedy C. la veille et l’avant-veille du début des attentats pour le «remboursement d’une dette de 200 euros», n’ont pas convaincu l’accusation.
«Duplicité»
Pendant toute la durée du réquisitoire, comme il l’a souvent fait pendant le procès, l’accusé a gardé la tête baissée dans son box, donnant l’impression pour le ministère public qu’il voulait «faire oublier qu’il a apporté un soutien majeur» à Amedy C.
L’avocate générale a mis en avant la «capacité à la dissimulation» et la «duplicité» d’Amar R., et brocardé sa «stratégie de défense», qui est «finalement «Je n’ai rien vu, je n’ai rien entendu». Mais pour Delphine Thibierge, Amar R. a bien fourni les armes qui ont «servi à tuer» la policière municipale Clarissa Jean-Philippe à Montrouge et quatre hommes dans un supermarché Hyper Cacher de l’est parisien, les 8 et 9 janvier 2015, ainsi qu’un soutien financier à Amedy C.
Reprenant les propos d’une avocate de parties civiles, la représentante du parquet général a souligné: «pas d’armes, pas de balles, pas de balles, pas de morts». Sans aveux et sans traces ADN reliant Amar R. aux armes, l’accusation s’est fondée sur les nombreux échanges téléphoniques entre l’accusé et Amedy C., dont il était devenu le «correspondant privilégié» avant les attaques.
Electrochoc
Compte tenu de cette «proximité», Amar R. ne «pouvait ignorer» la «radicalisation» et la nature du projet d’Amedy Coulibaly, qui avait coordonné ses attaques avec les frères Saïd et Chérif K., auteurs du massacre à la rédaction de «Charlie Hebdo» le 7 janvier 2015, a estimé l’avocate générale.
Ces attentats, visant la liberté d’expression, les forces de l’ordre et la communauté juive, avaient fait 17 morts et créé un électrochoc en France. À l’issue du premier procès, à l’automne 2020, onze hommes avaient été condamnés pour leur participation à ces attaques, notamment en fournissant des armes. Seuls Amar R. et Ali Riza P., les plus lourdement condamnés, avaient fait appel.
En première instance, Ali Riza P. avait écopé de trente ans de réclusion criminelle pour complicité d’assassinats terroristes, échappant à la peine maximale, la perpétuité, requise par le ministère public. Ce Franco-Turc de 37 ans conteste également les accusations. La défense aura la parole mercredi. Le verdict est attendu jeudi soir.