FinanceQuels risques de contagion après la faillite de la banque SVB?
Des analystes financiers restent optimistes après la faillite monumentale de l’établissement bancaire américain. On n’est pas dans la même situation que lors de la crise de 2008.
La fermeture de la Silicon Valley Bank (SVB), plus grande faillite bancaire aux États-Unis depuis la crise financière de 2008, va-t-elle faire tache d’huile? Des analystes financiers interrogés, lundi, par l’AFP restent pour l’instant plutôt optimistes, en raison des mesures prises par les autorités américaines, mais les marchés s’inquiètent.
Va-t-on revivre la grande crise financière de 2008?
«On n’est pas dans la même situation, c’est beaucoup plus circonscrit, avec un certain type de banques et une clientèle d’un certain secteur (ndlr: des banques régionales travaillant beaucoup avec le secteur technologique)», indique Éric Dor, directeur des études économiques à l’école de commerce IESEG.
SVB reste «un cas assez particulier», renchérit Lionel Melka, associé chez la société d’investissement Swann. Selon lui, la tendance a pu être accentuée par la «soudaineté» de la faillite, mais «ça va se calmer», et la crise bancaire est déjà «circonscrite» avec les mesures des autorités américaines.
Ces dernières ont annoncé ces mesures pour rassurer sur la solidité du système bancaire américain et vont notamment garantir l’intégralité des dépôts de la banque en faillite. La Banque centrale américaine (Fed) s’est également engagée à prêter les fonds nécessaires à d’autres banques, qui en auraient besoin pour honorer les demandes de retraits de leurs clients.
«Les banques sont dans une position beaucoup plus solide qu’elles ne l’étaient avant la crise financière» de 2008, juge également DWS, le plus grand gestionnaire d’actifs en Allemagne. À court terme, «il y aura deux choses à surveiller: si les actions des autorités réussissent à maintenir ou restaurer la confiance dans le système bancaire américain, et s’il y a d’autres institutions avec des vulnérabilités similaires à SVB tapies dans l’ombre, aux États-Unis ou dans d’autres économies», tempère Neil Shearing, économiste principal de Capital Economics.
Même son de cloche chez Paul Dales, chef économiste de Capital Economics, qui voit des éléments rassurants dans la façon dont «les autres banques sont régulées ou ont passé des tests de résistance», mais prévient «du risque que d’autres banques se retrouvent en difficulté si les gens retirent des fonds et que cela pousse à une perte de confiance plus grande, qui serait difficile à rattraper».
Lundi, les actions du secteur bancaire mondial ont souffert, rongées par les risques de contagion. Les Bourses européennes ont clôturé nettement dans le rouge, mais Wall Street a redressé la barre dans l’après-midi.
Le relèvement des taux par la Fed a-t-il joué un rôle?
Le resserrement monétaire à marche forcée de la Banque centrale américaine a participé à fragiliser les banques commerciales et à ralentir l’activité économique. Il a incité des clients à placer leur argent dans des produits financiers mieux rémunérés que les comptes courants, et bousculé le secteur des nouvelles technologies, gourmand en cash, en augmentant le coût de ses emprunts.
«Comme chaque fois, c’est une augmentation des taux d’intérêt par la Fed qui révèle les fragilités du système», estime Éric Dor. La hausse des taux brutale depuis un an a également «révélé les excès post-Covid» qui sont «en train d’être corrigés», notamment pour les acteurs «ayant mal géré leurs positions» dans le nouvel environnement financier, ajoute Alexandre Baradez, analyste d’IG France.
Qui va payer l’addition?
Après l’annonce de la prise de contrôle de SVB par l’Agence de garantie des dépôts (FDIC), vendredi, beaucoup s’étaient inquiétés du sort des dépôts bloqués par la défaillance de l’établissement. Plus de 95% d’entre eux n’étaient en effet pas couverts par la garantie traditionnelle des dépôts. «Les garanties apportées par la Fed sont importantes, et elle a ouvert une fenêtre pour apporter des liquidités supplémentaires», met en avant Alexandre Baradez, analyste d’IG France. Paul Dales (Capital Economics) estime que «le coût du soutien de la Fed sera en fin de compte payé par les banques» cotisant à la FDIC, et qui «pourraient au final le répercuter sur leurs clients. Mais je pense que ce serait faux de dire que ce sont les contribuables qui paient».
En revanche, les actionnaires de SVB et de Signature Bank, qui a elle aussi fait faillite, «vont tout perdre», a indiqué, ce week-end, un responsable de la Fed.