TaïwanLe président Lai appelle la Chine à «cesser ses intimidations»
Lai Ching-te, considéré par la Chine comme un «dangereux séparatiste», a prêté serment lundi en tant que nouveau président de Taïwan
Le nouveau président de Taïwan Lai Ching-te a prêté serment lundi, succédant à Tsai Ing-wen dont les huit années de mandat ont été marquées par une détérioration des relations avec Pékin.
Lai Ching-te a effectué sa prestation de serment au palais présidentiel de Taipei, selon les images d’un pool vidéo officiel, de même que la nouvelle vice-présidente, Hsiao Bi-khim.
Le nouveau président de Taïwan a appelé la Chine à «cesser ses intimidations politiques et militaires» dans son discours d’investiture lundi et remercié les Taïwanais d’avoir résisté à l’influence «des forces extérieures». «Je tiens également à remercier mes concitoyens d’avoir refusé de se laisser influencer par des forces extérieures et d’avoir résolument défendu la démocratie», a-t-il déclaré, affirmant que «l’ère glorieuse de la démocratie taïwanaise est arrivée».
Issu du Parti démocrate progressiste (PDP), le même mouvement que sa prédécesseure, Lai Ching-te s’est décrit par le passé comme un «artisan pragmatique de l’indépendance de Taïwan». Il a depuis adouci son discours, défendant le maintien du «statu quo» dans le détroit de Taïwan et affirmant désormais qu’un processus d’indépendance n’est pas nécessaire car l’île dispose de facto de ce statut, selon lui.
Ire de Pékin
Son franc-parler et sa posture lui attirent l’ire de Pékin, qui l’a qualifié de «dangereux séparatiste» conduisant Taïwan sur le chemin «de la guerre et du déclin». Lai Ching-te a tenté de rouvrir le dialogue avec la Chine, que Pékin a rompu en 2016, mais les experts estiment qu’il risque d’être rabroué.
Le nouveau président doit prononcer son discours d’investiture, qui sera écouté avec attention pour connaître ses positions sur la gestion des relations délicates entre Taipei et Pékin, devant des milliers de personnes rassemblées pour l’occasion.
Parmi les 51 délégations internationales invitées, (dont les Etats-Unis, le Japon et le Canada), huit chefs d’Etat ont été conviés pour marquer leur soutien à la démocratie taïwanaise. Taïwan souffre d’un manque de reconnaissance diplomatique, ne disposant que de 12 alliés sur la scène internationale.
Identité propre
L’île jouit pourtant de ses propres institutions, d’une armée et bat monnaie: le nouveau dollar de Taïwan. La majorité des 23 millions d’habitants estime également disposer d’une identité propre taïwanaise, distincte de la Chine.
Plus d’un millier d’artistes doivent interpréter des danses et opéras traditionnels lors de cette cérémonie, tandis que le ciel de Taipei accueillera un défilé militaire aérien.
S’inscrivant dans la continuité de sa prédécesseure, Lai Ching-te devrait augmenter les dépenses militaires et renforcer les liens avec certaines puissances, dont les Etats-Unis qui sont le principal fournisseur d’armes à Taïwan.
Pékin menace depuis longtemps de recourir à la force pour placer Taïwan sous son contrôle, en particulier si l’île déclare son indépendance, et le président chinois Xi Jinping a multiplié les déclarations selon lesquelles l'«unification» est «inévitable».
Avant l’investiture de Lai Ching-te, le bureau des affaires taïwanaises de Pékin, qui gère les questions liées au détroit, a déclaré que «l’indépendance de Taïwan et la paix dans le détroit» sont «comme l’eau et le feu».
Les garde-côtes taïwanais ont indiqué dimanche avoir intensifié leurs patrouilles au cours du week-end, en amont de la cérémonie de lundi, dans les eaux proches de l’archipel où les navires chinois ont accru leur présence.
Défis nombreux
En plus de la menace chinoise, Lai Ching-te devra faire face à de nombreux autres défis au cours de son mandat. Le PDP a perdu sa majorité au parlement, où une bagarre a éclaté vendredi entre des élus des trois partis qui y sont représentés, ce qui pourrait compliquer la tâche de Lai Ching-te pour faire adopter ses réformes.
Lai Ching-te espère séduire les jeunes électeurs, dont beaucoup sont déçus après huit ans de pouvoir au PDP, et a promis d’augmenter les salaires, de réduire les impôts et de créer davantage de logements sociaux.