FootballMario Balotelli ferait-il du bien au football suisse?
Que penser de la possible arrivée de Super Mario au FC Sion? Pour le développement du championnat, que pourrait-il lui apporter? Deux journalistes en débattent.
- par
- Nicolas Jacquier
Rien n’est fait, aucun contrat n’a encore été signé, mais tout reste encore faisable. Le possible transfert de Mario Balotelli au FC Sion nourrit toutes les discussions, pas seulement celles du Café du Commerce. Actuellement lié à Adana Demirspor par un contrat courant jusqu’en juin 2024, le fantasque attaquant italien n’exclut pas l’idée de jouer en Suisse.
Alors que Christian Constantin poursuit les discussions entamées avec Murat Sancak, son homologue turc, quel pourrait être l’impact d’un tel joueur sur la Super League helvétique? Devrait-on se réjouir d’un tel transfert ou plutôt s’en inquiéter?
Deux spécialistes de Sport-Center débattent autour d’une question simple mais fondamentale: la possible arrivée de Balotelli à Sion serait-elle une bonne chose pour le football suisse?
OUI (Nicolas Jacquier)
L’arrivée de Mario Balotelli serait une bénédiction non seulement pour Sion mais pour l’ensemble du foot suisse. Car de quoi se nourrit-on hormis de ce qui peut faire rêver? L’international italien est de ceux qui ne laissent personne indifférent et c’est bien de cela qu’il s’agit en premier lieu.
En mal de star, notre championnat aurait réellement besoin d’un tel joueur hors-norme, imprévisible parce que différent. Non pour que le supporter lambda puisse s’y identifier, mais pour s’évader d’un quotidien souvent morose. Et qu’importe si Balotelli, que l’on dit calmé sinon assagi, débarque en Valais avec ses frasques et tous les excès ayant façonné le personnage… C’est aussi ce que l’on aime en lui et qui a fabriqué sa légende urbaine.
Soyons francs plutôt que de jouer les pisse-vinaigre: dans notre «petite» Super League, de qui se souvient-on après chaque mercato? Dans la galaxie des transferts d’été, lequel vous a durablement marqués ces dernières années? Nous, franchement, hormis quelques exceptions, aucun… Dans l’immense majorité des cas, les clubs engagent des joueurs inconnus au bataillon, des seconds voire des troisièmes couteaux, parfois des éléments en devenir porteur d’espoirs.
Et là au milieu de tous ces «anonymes» débarquerait une megastar planétaire… Voilà qui rappellerait le temps glorieux lorsque Servette, Xamax ou Lausanne pouvaient s’offrir un Karl-Heinz Rummenigge, un Uli Stielike ou un Giancarlo Antognoni.
Dix ans après Gattuso, qu’il avait réussi à amener à Tourbillon, Christian Constantin se démène pour refaire le même coup avec Balotelli. Chic… Formidable, renchérirait Ogi. Au lieu de se montrer circonspect et dubitatif, il y aurait tout lieu de s’en réjouir. Peu importe au fond de savoir si son apport sera réellement bénéfique au développement du football helvétique – au final, qu’a-t-on vu d’ailleurs de ceux supposés y avoir participé? –, la possible arrivée de Super Mario boosterait un football suisse en ayant bien besoin. Quand bien même cela venait à doubler le prix du café matinal de son président à la Porte d’Octodure!
NON (Daniel Visentini)
Christian Constantin n’en est pas à son coup d’essai, avec plus ou moins de bonheur (surtout moins que plus). Il a déjà fait le pari de la star en fin de cycle à plusieurs reprises. Sion a eu droit, entre autres, à un Seydou Doumbia fantomatique, un Valon Behrami désabusé, un Guillaume Hoarau sans énergie, un Alex Song transparent, un Gennaro Gattuso sans impact ou, encore avant, un Darko Pancev vide de toute lumière. Aujourd’hui, cela pourrait donc être au tour de Mario Balotelli. Avec les mêmes désillusions?
Franchement, on croiserait presque les doigts pour que «Super Mario» éclabousse de son talent le championnat de Suisse. Je ne sais pas si cela suffirait à faire de la Super League un championnat en vue ou, surtout, à élever son niveau global. Cela aurait de la gueule sur le papier, c’est certain, mais au-delà?
On n’en est pas encore là. Il faudrait d'abord que Balotelli signe à Sion et qu’ensuite il y brille. Sur le terrain, pas en dehors avec les frasques qui lui font cortège depuis toujours ou presque. A moins que cela aussi ne fasse partie du projet?
Parce qu’il y a cette impression étrange qui flotte dans l’air, comme à chaque fois que la rumeur enfle du côté de Sion: on ne sait plus trop si elle gonfle les espoirs sportifs ou l’ego de son président.
Le championnat de Suisse n’a pas pour vocation à devenir le mouroir des stars en fin de carrière, comme à Sion ces dernières années ou façon Zambrotta à Chiasso, à l’époque. Et cela n’a rien à voir avec les Rummenigge ou Stielike dans les années 80: eux arrivaient en Suisse, à Servette et à Xamax, en étant encore au sommet de leur art ou presque, suffisamment au moins pour être décisifs. Serait-ce vraiment le cas de Balotelli, sur la durée d’une saison entière? On aimerait y croire, mais par-delà le coup médiatique, on doute.