Italie: Après la mort de Silvio Berlusconi, son parti joue sa survie

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ItalieAprès la mort de Silvio Berlusconi, son parti joue sa survie

Forza Italia, créé par il Cavaliere en 1994 et membre de la coalition de Giorgia Meloni, pourrait bien ne pas survivre au décès de son «père». Car «c’est un parti conçu par le chef et pour le chef».

Le Forza Italia de Silvio Berlusconi a connu un lent déclin, passant de près de 30% des voix, aux législatives de 2001, à 8% en 2022.

Le Forza Italia de Silvio Berlusconi a connu un lent déclin, passant de près de 30% des voix, aux législatives de 2001, à 8% en 2022.

AFP

Un parti créé par Berlusconi, pour Berlusconi: après la mort du milliardaire, Forza Italia (FI), force d’appoint de la coalition ultraconservatrice de Giorgia Meloni, risque de voir son déclin s’accélérer. À telle enseigne que la Première ministre surveille comme le lait sur le feu la situation au sein de la formation dont les députés et sénateurs, peu nombreux, sont néanmoins indispensables à sa majorité.

Décédé lundi, à 86 ans, d’une leucémie, Silvio Berlusconi a fondé Forza Italia en 1994, quand il s’est lancé en politique, remportant dans la foulée les législatives et devenant chef du gouvernement. Le parti, au cœur du jeu quand son chef dirigeait l’exécutif (1994/1995, 2001-2006, 2008-2011), a depuis connu un lent déclin, passant de près de 30% des voix, aux législatives de 2001, à 8% en 2022.

«Forza Italia, c’est Berlusconi», résume Vera Capperucci, professeure de l’histoire des mouvements et partis politiques à l’Université Luiss, à Rome. «C’est un parti conçu par le chef et pour le chef. Pour continuer à le faire exister, ça va être très compliqué», renchérit le politologue français Marc Lazar, spécialiste de la politique italienne.

Le parti n’a pas de successeur désigné et plusieurs factions s’affrontent. «C’est un peu dans la nature des personnages dominants, il n’était pas du genre à penser à sa succession», a justifié son ancien ministre de l’Économie, Giulio Tremonti.

Un exil des électeurs?

Fidèle entre les fidèles, Antonio Tajani, cofondateur de FI, vice-Premier ministre et chef de la diplomatie, en expédie les affaires courantes. «Forza Italia ne peut pas disparaître», a-t-il assuré. «Nous suivrons la route qu’il nous a indiquée, nous irons de l’avant, en soutenant ce gouvernement», a-t-il dit en marge d’une visite officielle à Washington.

Mais la carte Tajani ne fait pas l’unanimité. «Il n’a pas de charisme politique», estime Franco Pavoncello, président de la John Cabot University, à Rome. Il prédit «un départ des électeurs de FI vers d’autres partis de la droite». «Forza Italia va fortement rétrécir…»

«C’est un peu dans la nature des personnages dominants, il n’était pas du genre à penser à sa succession.»

Giulio Tremonti, ancien ministre de l’Économie de Silvio Berlusconi

«On peut penser qu’une grande partie des électeurs et cadres de FI risquent d’être attirés par la Ligue ou Fratelli d’Italia (la formation de Giorgia Meloni, ndlr)», pense aussi Marc Lazar. Giorgia Meloni et son parti d’extrême droite pourraient ainsi «se recentrer». «Mais ça n’a rien d’évident, parce qu’elle est fidèle à ses racines politiques, le Mouvement social italien (MSI, postfasciste), et il y aurait des résistances internes», souligne-t-il.

Grâce à une garantie bancaire

D’autres cadres et électeurs du parti parmi les plus «modérés» pourraient être tentés de chercher asile au centre gauche, et donc dans l’opposition, selon lui. Impensable, a affirmé un responsable de Forza Italia, à l’issue d’une réunion, mardi, de la direction du parti. «Dans cette phase, personne ne peut se permettre de s’en aller, ce serait absurde», a-t-il estimé, sous couvert d’anonymat.

Restent des questions de fond(s): que feront ses héritiers? FI reste en vie grâce à une garantie bancaire de 100 millions d’euros souscrite par… Silvio Berlusconi. Sera-t-elle maintenue par ses enfants? Que fera sa compagne?

«Les crises vont être de plus en plus aiguës»

Au sein de Forza Italia, «les crises et les luttes de pouvoir vont être de plus en plus aiguës», avance la professeure Vera Capperucci. Un avis partagé par les grands quotidiens italiens qui, comme «La Repubblica», qualifient de «séisme» la mort de Berlusconi pour sa formation. «Le parti n’a jamais eu une ligne de commandement normale. Les postes de responsabilité pouvaient apparaître ou disparaître en un clin d’œil, par simple vouloir de Berlusconi», rappelle «Il Corriere della Sera». «Le berlusconisme sans Berlusconi, personne n’est capable de l’inventer», souligne «La Stampa».

(AFP)

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