Motocyclisme - MotoE: autopsie d’un final gaché

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MotocyclismeMotoE: autopsie d’un final gâché

En estimant que l’ultime attaque de Dominique Aegerter sur Jordi Torres était une action «irresponsable», les commissaires ont mis fin à ce qui était une belle histoire.

Jean-Claude Schertenleib
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Jean-Claude Schertenleib

L’article 1.19, comme base légale

Après discussions et tour d’honneur pour rien du côté de Dominique Aegerter, les commissaires ont sévi, se basant sur l’article 1.19 des règlements de la Coupe F.I.M. MotoE. Que dit-il, ledit article? Sous le titre: «Procédure pour des pénalités spéciales en course», il rappelle que parmi ces différentes pénalités, ils peuvent notamment appliquer celle de «ride through» (passage à vitesse limitée par le couloir des stands, sans arrêt) (1.19.1).

Or, au moment où les juges ont estimé qu’Aegerter avait piloté de manière irresponsable, la course était terminée. Ce cas de figure est néanmoins prévu, toujours dans l’article 1.19.1 : «Au cas où l’organisation serait incapable d’appliquer la pénalité de «ride through» avant la fin de la course, une pénalité en temps sera signifiée au pilote coupable, pénalité déterminée par la direction de course MotoE et correspondant au temps qu’aurait nécessité l’accomplissement du «ride through»; ce temps est notifié aux teams avant la course.» C’est dire que l’équipe de Dominique Aegerter savait, avant le départ, qu’il y avait un risque potentiel de pénalité de 38 secondes.

A qui la plus grave faute?

La base légale existant, aucun recours ne devenait possible – de la première place sous le drapeau à damier, Dominique Aegerter s’est retrouvé douzième. De vainqueur de la Coupe F.I.M. de MotoE 2021, il en est devenu le dauphin de Jordi Torres. Verdict au goût amer pour le camp suisse, soulagement total pour le camp espagnol.

«Quand il a vu que je m’infiltrais, pourquoi n’est-il pas resté à l’extérieur? Les autres – qui allaient se retrouver sur le podium – étaient trop loin de nous, la cause étant entendue. Je gagnais la course, Torres le titre»

Dominique Aegerter, 2e du championnat de MotoE

Car c’est bien le désormais double détenteur du titre qui a commis la faute (sportive) la plus grave: «Si je gagnais la course devant lui, je ne reprenais que 5 points à Torres; il lui en restait 3 d’avance et il était de toute façon champion. Alors, quand il a vu que je m’infiltrais, pourquoi n’est-il pas resté à l’extérieur? Les autres – qui allaient se retrouver sur le podium – étaient trop loin de nous, la cause étant entendue. Je gagnais la course, Torres le titre», rappelle Aegerter.

La preuve: la réaction de Torres

Quelle est la réaction attendue – naturelle – d’un pilote qui perd un titre à trois virages de la fin, sur une action «irresponsable» d’un adversaire direct? Désolé de devoir tomber dans les clichés à bon marché, mais dans un tel cas, la «victime» doit être folle de rage, avec l’envie d’aller immédiatement dire son fait à son bourreau (voire plus, si mésentente…)

Or, qu’avons-nous vu? Un Torres en larmes, sanglots longs des violons d’un automne sur la côte adriatique. Inconsolable. Pourquoi? Simple, parce qu’avant de récupérer sur le tapis vert quelque chose dont le système a estimé qui lui appartenait, Jordi Torres, un charmant garçon à la très grande expérience, a compris que c’était bien lui qui avait commis la plus grande erreur, en entrant dans le jeu de Dominique Aegerter – pour le Bernois, c’était la seule tactique à utiliser – plutôt que de se contenter de suivre le plus confortablement possible le Suisse. Jusqu’à la deuxième place de la course et au titre!

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