FootballGranit Xhaka à cœur ouvert: «Mes sacs étaient faits»
Dans un fort témoignage livré à The Players’ Tribune, le capitaine de l’équipe de Suisse est revenu sur ses moments difficiles passés depuis son arrivée à Arsenal.
La vie n’est pas un long fleuve tranquille. Aussi lorsqu’on est joueur de football. Et encore plus pour Granit Xhaka. À ses grands regrets. Il ne s’en cache pas.
«C’est une des pires choses lorsqu’on est connu. Les gens ne peuvent pas être vrais avec toi, et je souhaiterais vraiment que ce soit différent. Je suis une personne normale, comme vous. Vous le savez? Oui, pendant 90 minutes, je suis Granit Xhaka, milieu d’Arsenal. Mais le reste de la semaine, je suis simplement un Suisse vivant à Londres avec sa femme et ses deux enfants. Je ne veux pas vivre différemment. Je ne me fais pas livrer toute ma nourriture à la maison. Je ne sors pas avec dix gardes du corps. Non, non, non, non. Juste parce que je suis connu, je dois tout changer? Aucune chance. Si je vais à une fête, je serai au milieu de celle-ci. Si ma famille veut sortir manger au restaurant, je suis là. Si mes enfants ont besoin de nourriture, je vais à Sainsbury’s (ndlr: une firme de supermarché britannique). C’est comme ça que je veux vivre.»
Cet extrait est tiré du fort témoignage que le capitaine de l’équipe de Suisse a accordé au site The Players’ Tribune. Une vidéo de 26 minutes dans laquelle le milieu de terrain raconte surtout les moments difficiles qu’il a pu vivre à Arsenal depuis son arrivée en 2016. Avec forcément un point fort: sa sortie du terrain lors d’un match contre Crystal Palace à l’automne 2019. Alors capitaine des Gunners, il est hué par les fans de l’Emirates Stadium. Il craque, et jette son maillot au sol. Une rupture.
«De la pure haine»
«Ce jour-là, les choses ont dépassé les bornes. Nous menions 2-0, avant de se faire égaliser à 2-2, et j’ai été sorti après une heure. Je commençais à peine à me diriger vers le banc, lorsque j’ai entendu les huées. Ce n’était pas seulement quelques gars dans un coin, mais énormément de personnes. J’étais choqué. Je n’avais jamais vécu quelque chose du genre. Quand je me suis approché du tunnel, j’ai levé les yeux vers les fans assis là, et c’est ce dont je me souviendrai toujours. Quand je ferme mes yeux aujourd’hui, je peux encore voir leurs visages, voir leur colère. Ce n’est pas qu’ils ne m’aimaient pas. Non, c’était différent. C’était de la haine. De la pure haine.»
Pour le Bâlois de 29 ans, ce moment aurait dû tout changer. Ses parents étaient là. «Mon père m’a dit quelque chose que je n’aurais jamais pensé qu’il puisse me dire. Il m’a dit: Il est temps de partir.» Message reçu. Xhaka concède qu’il s’était fait une raison. Tout était prêt. «Mes sacs étaient faits. Les passeports étaient prêts. J’en avais fini avec Arsenal. Terminé. Il y avait un contrat d’un autre club qui était sur la table, et je n’avais qu’à le signer. J’en avais parlé avec ma femme, Leonita, et nous avions décidé de partir.» Le temps simplement de saluer une dernière fois Mikel Arteta, lequel venait d’être nommé au poste d’entraîneur d’Arsenal.
Arteta l’a convaincu
Cette discussion-là, raconte l’international helvétique, a tout changé. «Quand je prends une décision de cette importante, c’est très difficile de me faire changer d’avis. Mais Mikel a commencé à m’expliquer à quel point j’étais important pour ses plans. J’ai aimé sa chaleur. Il était honnête, direct. Des plans clairs. J’ai senti que je pouvais lui faire confiance. Il m’a dit de lui donner six mois pour me prouver que j’avais tort, et qu’ensuite, si je voulais encore partir, il n’y aurait pas de problème.»
Discours convaincant: «Je lui ai dit OK». J’ai appelé ma femme et mes parents, pour leur dire que nous restions. Ils étaient là à me dire «Pas question». J’ai dit que oui, que l’on défaisait les valises. C’était un nouveau défi. Soit vous m’accompagnez, soit j’y vais seul, parce que je veux affronter ça.» Question d’orgueil. Et sans doute de sentiment: «Ma tête avait quitté Arsenal, mais pas mon cœur. Mon cœur me disait: «Tu ne peux pas quitter ce club comme ça.» Et Arteta et Xhaka ne sont plus revenus sur le sujet.
Deux ans plus tard, le premier est parvenu à replacer les Gunners dans le haut du tableau de la Premier League. Quant au second, s’il n’est toujours pas le chouchou des supporters d’Arsenal, il a au moins retrouvé une crédibilité qui symbolise sa grande rédemption.