YémenLe premier vol commercial depuis Sanaa depuis 2016 ajourné
L’aéroport de Sanaa, aux mains des rebelles Houthis, est fermé aux vols commerciaux depuis août 2016 après des frappes aériennes de la coalition saoudienne.
- par
- Fabien Le Floch
Le premier vol commercial depuis six ans prévu au départ de la capitale yéménite aux mains des rebelles Houthis a été ajourné dimanche à défaut d’avoir obtenu les autorisations nécessaires, sur fond d’accusations de contournement de la trêve en vigueur depuis début avril.
L’avion devait transporter dimanche matin des passagers de plus de 40 ans ayant besoin d’un traitement médical de Sanaa à Amman, en Jordanie. Mais, quelques heures avant, la compagnie aérienne Yemenia a déclaré sur sa page Facebook qu’elle n’avait «pas encore reçu les permis» et a exprimé «ses profonds regrets» aux voyageurs.
L’un des passagers a déclaré à l’AFP avoir reçu un appel d’un responsable de la compagnie lui demandant de ne pas se rendre à l’aéroport. Yemenia a ajouté espérer que «tous les problèmes seraient surmontés dans un avenir proche» pour pouvoir assurer le vol.
Un responsable de la compagnie a déclaré à l’AFP que «l’autorisation nécessaire de la coalition n’est pas arrivée». La coalition militaire menée par l’Arabie saoudite, qui soutient militairement le pouvoir contre les rebelles Houthis, proches de l’Iran, depuis 2015, n’a pas réagi dans l’immédiat.
Accusations
Selon le ministre yéménite de l’Information Moammar Al-Eryani, ce vol «a échoué en raison du non-respect par la milice terroriste Houthi de l’accord stipulant l’approbation des passeports émis par le gouvernement légitime», a-t-il déclaré à l’agence de presse gouvernementale SABA.
D’après lui, les Houthis ont tenté «d’imposer (60) passagers sur le vol avec des passeports peu fiables délivrés par (eux), à la lumière d’informations confirmant (leur) projet d’exploiter les vols pendant les deux mois de la trêve pour faire passer des dizaines de leurs dirigeants et experts des Gardiens de la révolution iraniens et du Hezbollah libanais, avec de faux noms et de faux documents».
Moammar Al-Eryani a demandé à la communauté internationale, aux Nations Unies et à leur envoyé spécial au Yémen Hans Grundberg de «mettre la pression sur la milice terroriste Houthi afin qu’elle cesse de manipuler cet enjeu humanitaire». Le directeur adjoint de l’aviation civile à Sanaa, Raed Talib Jabal, a, pour sa part, affirmé que «les pays de la coalition d’agression ont refusé d’accorder à (la compagnie aérienne) la permission de laisser atterrir le vol».
Raed Talib Jabal a déclaré à l’agence de presse Houthie que la coalition «répudi(ait) ses obligations en refusant d’accorder aux compagnies aériennes yéménites l’autorisation de laisser atterrir le vol», estimant qu’il s’agit d’une «violation de la trêve annoncée par l’émissaire de l’ONU». La coalition «cherche délibérément à doubler la souffrance du peuple yéménite, tout en trompant l’opinion publique internationale sur le dossier humanitaire», a-t-il ajouté.
Enjeu humanitaire
La coalition saoudienne contrôle l’espace aérien et maritime, y compris dans les zones aux mains des rebelles, la capitale Sanaa et une grande partie du nord du pays. L’aéroport de Sanaa est fermé aux vols commerciaux depuis août 2016 après des frappes aériennes de la coalition. Seuls les vols humanitaires étaient jusqu’à présent autorisés à y atterrir, avec des interruptions périodiques; un «blocus» dénoncé par les Houthis.
La coalition accuse les rebelles de faire usage de l’aéroport pour des «opérations hostiles et transfrontalières utilisant des missiles balistiques, des drones et des avions piégés». Arrachée par l’ONU, une trêve de deux mois renouvelable est entrée en vigueur le 2 avril, au premier jour du ramadan, mois sacré du jeûne musulman.
Elle prévoit l’arrêt des opérations militaires ainsi que la réouverture partielle de l’aéroport de Sanaa, offrant un rare répit à des millions de Yéménites durement éprouvés par la guerre dans le pays le plus pauvre de la péninsule arabique. Des vols quotidiens au départ d’Aden (sud) et de Seiyun (centre), également sous contrôle du gouvernement, assurent des liaisons intérieures et avec d’autres pays de la région.