Hockey sur glace – Quand l’espace vient à manquer, il faut penser beaucoup plus vite

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Hockey sur glaceQuand l’espace vient à manquer, il faut penser beaucoup plus vite

S’adapter à une surface de jeu plus petite et étroite aux Jeux olympiques de Pékin reste un challenge pour l’équipe de Suisse. Elle affronte la Tchéquie vendredi à 9h40.  

Cyrill Pasche Pékin
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Cyrill Pasche Pékin
Le tournoi olympique se joue sur des patinoires plus petites de format NHL.

Le tournoi olympique se joue sur des patinoires plus petites de format NHL.

AFP

Leonardo Genoni tablait sur une dernière rencontre de préparation sur sol chinois, laquelle aurait dû avoir lieu dimanche dernier à Pékin, pour trouver les bons repères sur les patinoires olympiques de format NHL (60 m sur 26 m, soit quatre mètres de moins en largeur) avant l’ouverture du tournoi. Ce match test initialement programmé contre la Finlande n’a finalement jamais eu lieu, notamment pour des raisons logistiques. 

Rien ne vaut la compétition pour bien comprendre ce qui change sur une patinoire plus petite que celles du championnat de National League (60 m sur 30 m). «Je dois encore apprendre à reconnaître à quel moment les situations deviennent vraiment dangereuses», expliquait Genoni avant l’entrée en lice de la Suisse au tournoi olympique de Pékin contre le ROC (Comité olympique russe). «C’est quelque chose qui est très difficile à simuler à l’entraînement. Les angles sont un peu différents sur une petite patinoire, mais la clé est vraiment de comprendre quels tirs sont dangereux et comment ces situations de but se développent. Est-ce qu’elles proviennent d’erreurs individuelles, de déviation, de jeu dans lesquels le puck circule rapidement de bas en haut dans la zone? Ce sont des points que je devrai, en tant que gardien, vite assimiler.»

Berra, gardien hyperactif

Le gardien du EV Zoug jouera son premier match du tournoi vendredi contre les Tchèques (9h40), qu’il avait déjà battu en mai dernier à Riga (Lettonie) lors des championnats du monde. Reto Berra, envoyé au casse-pipe contre les Russes du ROC mercredi (défaite 1-0 sur un but contre son camp d’Enzo Corvi), n’a pas connu trop de difficultés à saisir les nouveaux enjeux d’une patinoire plus petite. Et grâce à la qualité de son jeu de passes avec sa canne, le portier de Fribourg-Gottéron a sans cesse soulagé sa défense à la relance. Son activité autour de son filet, un peu comme un troisième défenseur, a été extrêmement précieuse pour la Suisse. 

Reto Berra, qui a longtemps joué en Amérique du Nord, a brillé lors du premier match du tournoi olympique contre les Russes.

Reto Berra, qui a longtemps joué en Amérique du Nord, a brillé lors du premier match du tournoi olympique contre les Russes. 

AFP

«On a beaucoup moins de temps, il faut sans cesse rester en alerte.».

Reto Berra, gardien de la Suisse

Le gardien de Fribourg-Gottéron avait un avantage: il a passé une bonne partie de sa carrière sur les surfaces de glace nord-américaines entre 2013 et 2018 (76 matches de NHL avec Calgary, Colorado, Florida et Anaheim ainsi que 93 matches en AHL). «Nous avions pu nous entraîner sur des patinoires de format NHL en Suisse (ndlr: au centre OYM, à Cham) mais j’ai eu besoin de pas mal de temps contre les Russes pour vraiment me remettre dedans et je pense que c’est exactement la même chose pour les joueurs, a expliqué Reto Berra. On a beaucoup moins de temps, il faut sans cesse rester en alerte. Il faut penser beaucoup plus vite et avoir un temps d’avance sur ce qui va se passer.»

Avec quatre mètres de moins en largeur, une zone neutre plus longue et donc moins de distance entre le but et la ligne bleue, mais aussi moins d’espaces derrière le filet et dans les coins de la patinoire, davantage de chaos, de contacts physiques et de scènes brûlantes devant la cage en découlent. Avec moins de place et de temps de réflexion, le dynamisme et la vitesse de réaction seront des atouts décisifs à Pékin.

Les duels devant le but sont plus fréquents sur une surface de jeu plus petite de type NHL.

Les duels devant le but sont plus fréquents sur une surface de jeu plus petite de type NHL. 

AFP

Russes et Finlandais avantagés

Mercredi contre les Russes, les Suisses ont eu droit à un test grandeur nature sur une surface de jeu qui ne leur est pas familière. Bien au contraire des Russes, tous issus d’un championnat de KHL qui a entamé l’uniformisation de la surface de ses patinoires vers le format NHL à court terme: seule une poignée des 24 clubs évolue encore sur la traditionnelle surface européenne de 30 m de large. Tous les autres jouent déjà sur une surface NHL ou de standard finlandais, soit une sorte d’entre-deux avec des pistes de 28 m de largeur. 

«C’est certain que cela demande un temps d’adaptation, a reconnu l’entraîneur national Patrick Fischer. Nous avons tous appris à jouer sur les grandes patinoires européennes». Pour le défenseur Romain Loeffel, la clé sur une petite patinoire est de «ne pas hésiter à simplifier son jeu», une recommandation également formulée par le sélectionneur national.

«On se retrouve tout de suite collé contre la bande.»

Romain Loeffel, défenseur suisse. 

L’arrière international du HC Lugano, qui a paru très à l’aise lors du premier match du tournoi olympique, précise: «Parfois, un puck dégagé via le plexiglas vaut bien mieux qu’un jeu posé auquel nous sommes habitués lorsque nous jouons en Suisse. Nous ne devons vraiment pas hésiter à simplifier notre jeu.» Pour les défenseurs, le challenge est encore plus corsé que pour les attaquants. Avec des espaces réduits derrière la cage (entre la ligne de but et la bande), les points de fuite se font rares. «On se retrouve tout de suite collé contre la bande, fait remarquer Loeffel. Avant d’être en possession du puck, il faut avoir enregistré toutes les options de passes».

Sur une patinoire moins large de quatre mètres, l’espace entre les cercles d’engagement et la bande est restreint.

Sur une patinoire moins large de quatre mètres, l’espace entre les cercles d’engagement et la bande est restreint. 

AFP

Mercredi, plusieurs défenseurs et attaquants ont par moments semblé en difficulté sans cette fraction de seconde supplémentaire pour prendre des décisions cohérentes. Les Suisses les plus en vue, par contre, ont été ceux qui avaient déjà joué en Amérique du Nord (à l’exception de Corvi): Haas, Andrighetto, Hofmann ainsi que la paire de défense Diaz/Müller. 

Chaque tir est dangereux

Contre la Tchéquie vendredi (9h40), les Suisses devront aussi changer quelques habitudes héritées des grandes surfaces de jeu. Le choix du chemin le plus direct vers le filet n’a pas été une évidence pour tous les attaquants suisses mercredi contre le ROC. «Les petites patinoires, c’est un autre jeu, fait remarquer Gaëtan Haas, deux saisons de NHL sous le capot avec les Edmonton Oilers entre 2019 et 2021. On doit se mettre en tête que chaque shoot peut-être dangereux dès le moment où l’on franchit la ligne bleue».

Grégory Hofmann espère profiter de sa vitesse pour faire la différence offensivement.

Grégory Hofmann espère profiter de sa vitesse pour faire la différence offensivement. 

AFP

La zone médiane étant plus grande, la distance entre la ligne bleue et le but en devient plus courte. «Nous devons encore davantage intégrer nos défenseurs en zone offensive, conseille le gardien Reto Berra. Envoyer des tirs du poignet de la ligne bleue, créer des écrans devant le but et générer de la confusion pour le gardien et la défense adverses.»

«Pour une équipe aussi rapide que la nôtre, ce format de patinoire peut devenir un atout.»

Christoph Bertschy, attaquant suisse

Une fois que les Suisses auront tous assimilé cette approche différente, le format NHL pourrait éventuellement devenir un avantage. C’est en tout cas de cette façon que l’attaquant du Lausanne HC, Christoph Bertschy, voit les choses. Sauf qu’avec deux autres matches de poule avant le premier match à élimination directe, le temps presse. «Pour un attaquant, l’avantage est que l’on se retrouve plus vite dans une zone d’où il est possible de créer du danger, note Bertschy, qui a transité par l’organisation du Minnesota Wild (neuf matches de NHL et 210 parties dans la filiale du Wild en AHL) entre 2015 et 2018. Pour une équipe aussi rapide que la nôtre, ce format de patinoire peut devenir un atout.»

Reste à voir si les Suisses, vendredi contre la Tchéquie à 9h40, se sentiront déjà un plus à l’aise avec moins d’espace autour d’eux. Le premier test, mercredi contre les Russes, . 

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