Journée de colère: Retraites: manifestations émaillées de tensions en France

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Journée de colèreRetraites: manifestations émaillées de tensions en France

La colère n’a pas faibli, ce lundi, alors que la journée s’est conclue par l’adoption définitive de la controversée réforme des retraites par l’Assemblée nationale.

Une photo prise ce lundi à Strasbourg.

Une photo prise ce lundi à Strasbourg.

AFP

Routes bloquées, transports perturbés, hall d’aéroport et campus occupés, stations-service à sec… La colère contre la réforme des retraites et le recours par le gouvernement au 49.3 n’a pas faibli lundi en France, alors que les deux motions de censure ont été rejetées dans la soirée par l’Assemblée nationale, provoquant de nouvelles tensions.

Poubelles renversées et brûlées, barricades, jets de projectiles sur les forces de l’ordre, fumigènes: l’adoption lundi de la réforme des retraites après le rejet de la motion de censure a provoqué de nombreuses manifestations émaillées d’incidents dans toute la France, ont constaté des journalistes de l’AFP.

Peu avant 22h30, 101 personnes avaient été interpellées à Paris au cours de ces incidents, selon une source policière. Après le rejet de la motion de censure, quelques centaines de personnes, rejointes par des députés de la France Insoumise (LFI), se sont d’abord rassemblées, non loin de l’Assemblée nationale, Place Vauban (VIIe arrondissement), avant d’être canalisées par les forces de l’ordre.

Les mêmes scènes se sont reproduites dans plusieurs grandes villes de France, comme à Strasbourg, où un gros millier de manifestants se sont d’abord rassemblés place Kléber, en plein centre-ville, sifflant et huant le rejet de la motion de censure avant d’allumer des fumigènes et de scander «nous aussi on va passer en force». Certains manifestants ont ensuite commis des dégradations: façade de banque caillassée, poubelles incendiées, panneaux publicitaires brisés…

À Dijon, environ 200 personnes ont manifesté. La manifestation a été dispersée vers 21h00 et la police a procédé à deux interpellations. À Lyon, environ 500 manifestants, dont beaucoup de jeunes, se sont rassemblés vers 20h30 place Guichard dans le 3e arrondissement et s’en sont pris aux forces de l’ordre. Un premier bilan de la préfecture a fait état de deux interpellations, tout comme à Saint-Étienne.

Les manifestants étaient plusieurs centaines à Lille devant la préfecture, où ils ont sifflé et hué en apprenant le rejet de la motion de censure. «Ça va péter», ont-ils scandé, «Louis XVI on l’a décapité, Macron on va recommencer». À Nantes la manifestation, qui a débuté dans le calme vers 18h00, s’est tendue en milieu de soirée. Même tension à Rennes, déjà secouée par de violentes manifestations ces dernières semaines. D’autres rassemblements ont eu lieu à Bordeaux, Limoges, Poitiers, ou encore à Rouen ou Brest.

«Amplifier les mobilisations»

«Rien n’entame la détermination des travailleurs», écrit la CGT dans un communiqué lundi soir. Le rejet de cette motion, «à quelques voix près, ne change rien!» écrit la Confédération. «Rien n’entame la détermination des travailleurs, privés d’emplois, jeunes et retraités à rejeter (…) la réforme des retraites que tout le monde, sans exception, juge injustifiée, injuste et brutale», poursuit le deuxième syndicat français.

La CGT appelle à «amplifier les mobilisations», et à «participer massivement aux grèves reconductibles et aux manifestations», le jeudi 23 mars «et après, si nécessaire». L’intersyndicale a appelé la semaine dernière à une nouvelle journée de grèves et de manifestation, la neuvième, le jeudi 23 mars.

Routes bloquées

Des manifestations sur des échangeurs routiers ou sur les rocades de plusieurs villes ont entraîné des ralentissements ou des blocages de la circulation. À Rennes, des feux de palettes ont été allumés sur la rocade sud, perturbant fortement le trafic jusqu’en fin de matinée avec des kilomètres de voitures et de camions à l’arrêt total dans les deux sens. Au sud de la ville, les accès au dépôt pétrolier de Vern-sur-Seich sont bloqués.

Près de Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais), une centaine de manifestants bloquent les trois accès au parc d’activités de l’Inquétrie. Des palettes ont été enflammées et aucun camion ne peut entrer ou sortir de cette zone qui comprend notamment un dépôt de bus scolaires et un parc de stockage de camions de ramassage des ordures. À Bordeaux, une opération escargot a été mise en place au centre-ville par la CGT-Energies.

Transports publics perturbés

La circulation des bus a été perturbée à Rennes sur certaines lignes, selon le gestionnaire du réseau Star. À Metz, des manifestants ont bloqué le dépôt des bus de l’agglomération, entraînant de très fortes perturbations, selon la régie locale.

Les aéroports de Tarbes-Lourdes et de Pau-Pyrénées ont été occupés par des manifestants, qui ont notamment effectué des coupures de courant. La Direction générale de l’aviation civile (DGAC) a demandé dès vendredi aux compagnies aériennes d’annuler 30% de leurs vols lundi à Paris-Orly et 20% à Marseille-Provence, en raison du mouvement de grève des contrôleurs aériens.

Côté SNCF, où la grève reconductible entre dans sa troisième semaine, circuleront mardi quatre TGV sur cinq, six Intercités sur dix et deux TER sur trois. Aucun train de nuit ne roulera. À Paris, le volume de déchets a encore légèrement baissé à 9300 tonnes, après un pic de 10’000 tonnes vendredi. La préfecture de police indique avoir permis à 115 camions-bennes de circuler lundi dans la capitale, ainsi que le déblocage de trois centres de tri de déchets en proche banlieue.

Carburants, énergie

La grève se durcit dans les raffineries et de nombreuses stations françaises sont à sec pour la première fois depuis le début du conflit. «Il n’y a plus aucun produit qui sort à cette heure» de l’ensemble des raffineries de France, que ce soit des six raffineries conventionnelles ou de la bioraffinerie de La Mède (Bouches-du-Rhône), selon Eric Sellini, élu national de la CGT Chimie.

Depuis lundi, la raffinerie TotalEnergies à Feyzin (Rhône) et celle d’Esso-ExxonMobil à Fos-sur-Mer ont de nouveau cessé les expéditions, selon la CGT, ce que confirment les directions des deux groupes. Selon l’UD-CGT Hautes-Alpes, plusieurs dizaines de grévistes bloquent la centrale de Serre-Ponçon depuis lundi matin. «Pas un kilowatt ne sort», selon un porte-parole. D’une puissance de 380 MW, la centrale est la plus puissante de PACA, avec une production annuelle d’environ 700 millions de KWH.

Manifestations

Les étudiants ont continué, lundi, à se mobiliser contre la réforme des retraites, avec une série d’actions allant du rassemblement au blocage, plusieurs centaines d’étudiants de l’Université Paris 1 ayant voté l’occupation du site de Tolbiac.

Le syndicat étudiant L’Alternative comptabilisait dans l’après-midi une cinquantaine d’universités et écoles mobilisées, avec des occupations de bâtiments universitaires dans de nombreuses villes. «Dans toutes les universités en France, ça monte, on passe un cap», a déclaré Éléonore Schmitt, une porte-parole de L’Alternative. Des piquets de grève et actions de mobilisation dans les lycées ont aussi émaillé le début des épreuves de spécialité du bac.

(AFP)

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