Pays-Bas«On pourra peut-être bientôt fumer de la bonne weed néerlandaise»
Bréda et Tilbourg sont les deux premières villes néerlandaises à participer à l’expérimentation de vente légale de cannabis, à la grande joie des coffeeshops et consommateurs locaux.
Dans l’arrière-boutique de «De Baron», un coffee-shop de Bréda, dans le sud des Pays-Bas, le maître des lieux fait défiler sur son ordinateur des images de marijuana sur un site de commande américain, rêvant de l’expérimentation de vente de cannabis légal à laquelle il s’apprête à participer.
«Je l’ai goûtée, elle était géniale»
Comme dans tous les coffee shops de Bréda et de Tilbourg distante de 25 km à l’est, le magasin de Rick Brand, 61 ans, sera autorisé à la mi-décembre à vendre des variétés de cette drogue dite douce dont la production sera contrôlée par l’Etat. Contrairement à l’idée abondamment véhiculée à l’étranger, la vente de cannabis aux Pays-Bas n’est pas légale: depuis les années 1970, elle est seulement «tolérée», et depuis 1996 jusqu’à un certain seuil – chaque coffee-shop ne pouvant ni en détenir une réserve de plus de 500 grammes, ni en vendre plus de cinq grammes par jour à un même client - sa production et sa fourniture restant, elles, interdites.
«Celui-là est super aromatique, il sent très bon», assure Rick Brand, pointant du doigt l’une des nombreuses variétés de cannabis cataloguées sur un site aux Etats-Unis, où la commande et la vente de cannabis est légale dans plusieurs Etats. Le commerçant est en contact avec une société, à une trentaine de kilomètres de Bréda et sélectionnée par les autorités, qui se prépare depuis plusieurs années à la légalisation de la culture du cannabis. «Le producteur légal produit cette variété-là et celle-ci aussi, je l’ai goûtée, elle était géniale», se réjouit-il, désignant deux articles aux noms de «Runtz» et de «Wedding Cake». «Mais il ne peut pas encore la livrer», regrette-t-il auprès de l’AFP.
Un produit «100% pur»
Commerçant de marijuana depuis 32 ans, Rick Brand en est persuadé: en pouvant se faire livrer par des fournisseurs autorisés par l’Etat, il sera bientôt en mesure de proposer à ses clients des produits de meilleure qualité. Selon lui, l’illégalité frappant la production et la fourniture de cannabis l’empêche, pour l’instant encore, de faire contrôler par un laboratoire ce que contient exactement ce qu’il vend. Avec l’expérimentation, il espère pouvoir vendre du «cannabis 100% pur». «Car dans celui que l’on nous proposait jusqu’à maintenant, il y a parfois des pesticides, mais aussi des agents alourdissants, en fait, on ne sait pas vraiment», explique-t-il, sans ajouter de détails sur ses fournisseurs actuels.
De l’autre côté de la porte de service, ses clients achètent des boules verdâtres, que certains consomment immédiatement dans une pièce où sont servies des boissons sans alcool, et où flotte une odeur reconnaissable. «Je viens souvent ici», déclare Souad, 35 ans, un joint à la main, qui ne souhaite pas que son nom de famille soit divulgué. Il attend, lui aussi, avec impatience le début de l’expérimentation. «Nous allons peut-être bientôt pouvoir fumer de la bonne herbe néerlandaise d’origine», dit-il à l’AFP.
Partis politiques partagés
Bréda et Tilbourg sont les deux premières villes à participer à l’expérimentation d’une durée d’au moins quatre ans. Elles seront plus tard rejointes par huit autres communes. A partir de décembre, deux producteurs sélectionnés par l’Etat seront autorisés à fournir les établissements des deux localités. Deux des quatre partis de la coalition sortante, les chrétiens-démocrates et une formation protestante sont opposés à la légalisation. La droite libérale du Premier ministre démissionnaire Mark Rutte, elle, dit vouloir attendre les résultats de l’expérimentation, promise dans un accord gouvernemental depuis 2017, pour se prononcer.