Qatar 2022«L’équipe de Suisse a perdu ce match dans le vestiaire déjà»
Coach mental professionnel, Romain Ducret analyse les raisons qui ont, selon lui, provoqué la déroute helvétique face au Portugal, mardi.
- par
- André Boschetti
L’équipe de Suisse voulait marquer l’histoire au Qatar. A sa manière, elle y est parvenue. Tous ceux qui s’intéressent un tant soit peu au football se souviendront très longtemps de ce huitième de finale contre le Portugal (1-6). Une déroute que Romain Ducret tente d’analyser. «Pour être honnête, je suis moi aussi encore un peu sous le choc, commence celui qui est coach mental professionnel. Jamais je ne me permettrai de juger qui que ce soit mais, d’un point de vue psychologique, j’ai l’impression que l’équipe de Suisse a perdu ce match dans le vestiaire, avant même de le commencer.»
Une douche froide
Le Fribourgeois détaille ensuite son analyse. «Je pense que lorsque Murat Yakin a annoncé au groupe le changement tactique qu’il voulait faire, cela a eu l’effet d’une douche froide pour les joueurs. Pour la plupart, ils ont probablement été déstabilisés au point de perdre leurs repères. Certains d’entre eux n’ont peut-être même pas compris ce que désirait leur coach.»
Grand amateur d’un sport qu’il a lui-même pratiqué, Romain Ducret ne manque pas non plus de souligner les mérites des adversaires. «Il ne faut pas oublier que le Portugal a aussi livré une superbe performance collective. Mais elle a été facilitée par des Suisses qui se sont très vite liquéfiés pour tomber dans un cercle vicieux qui les a amenés toujours plus bas. Une spirale négative qui engendre des émotions négatives. Et lorsque la confiance disparaît, même le geste le plus simple devient subitement compliqué. Maintenant, Murat Yakin connaît mieux la situation que nous et il devait avoir ses raisons pour changer d’approche.»
Une remise en question est impérative
À la question de savoir si cette débâcle laissera des séquelles au sein de l’équipe de Suisse, Romain Ducret répond sans hésitation. «Il y aura bien entendu des conséquences, prévient-il. Positives et négatives. Si les joueurs et le staff parviennent à faire leur examen de conscience et à se remettre en question, cet échec pourrait avoir un effet bénéfique, constituer une base solide pour repartir de l’avant. Mais si, au contraire, chacun rejette la faute sur l’autre en cherchant des coupables, il pourrait avoir de graves conséquences pour la suite. Dans cet ordre d’idées, d’après ce que j’ai lu et entendu, Yann Sommer et quelques autres ont tout de suite assumé l’échec en parlant d’une défaite collective, d’équipe. Ce qui n’a pas encore été le cas de Yakin. Pour que l’aventure puisse continuer dans de bonnes conditions, il est impératif à mes yeux que le coach prenne lui aussi sa part de responsabilité.»
«Tout ce qui s’est passé ces derniers jours, conclut Romain Ducret, montre que le sport est un truc génial. Après la belle performance réussie contre la Serbie et la qualification pour les huitièmes de finale, les émotions sont tout à coup montées tellement haut… pour retomber extrêmement bas après l’échec face au Portugal. En quelques heures seulement, tout a basculé d’un extrême à l’autre.»