Procès de Jean-Marc ReiserSes ex décrivent un homme «violent», «possessif» et «manipulateur»
D’anciennes compagnes de Jean-Marc Reiser, qui comparaît devant la cour d’assises du Haut-Rhin pour l’assassinat en 2018 de Sophie Le Tan, ont témoigné mercredi.
«Ca a été trois semaines et demie de calvaire». Isabelle M. se souvient de l’été 1986. Etudiante de 21 ans, elle avait décroché un emploi, pour six semaines, à La Poste à Strasbourg, où travaillait Jean-Marc Reiser. Très vite, l’homme, plus âgé de quelques années, tente de se rapprocher. «Il avait un tempérament harceleur, moi j’étais jeune, j’avais du mal à dire non. Il m’a eue à l’usure, j’étais une proie facile».
Une relation débute, elle va durer moins d’un mois, mais traumatisera durablement la témoin. «Il était très insistant pour qu’on reste tout le temps ensemble, j’ai commencé à être isolée de mes amis», se rappelle celle qui est aujourd’hui âgée de 59 ans. Lorsqu’elle ne se présente pas à un rendez-vous, il va la chercher dans sa chambre d’étudiante, l’emmène en forêt, la frappe. «Je me mets en boule au sol, il me tape avec son pied, il est furieux, veut que je pleure... je me dis qu’il va me tuer».
«Je ne pensais pas que ça l’avait marquée autant»
Après l’été, ses études l’amènent à Brest, elle loge en cité universitaire. «J’habitais en rez-de-chaussée, une nuit, j’entends quelqu’un marcher sur le gravillon, ça recommence (...) Il fait son apparition, il est toujours là, en train de me harceler».
Même s’il finit par disparaître de sa vie, elle mettra du temps à oublier cet épisode traumatisant. «Pendant une dizaine d’années, quand je marchais, je me retournais tout le temps, je me disais: «Où est-ce qu’il est, quand est-ce qu’il va me surprendre?» Ca a mis dix ans à me quitter». Et 39 ans après, devoir venir témoigner une nouvelle fois devant un tribunal lui pèse. «Je dois remuer des choses très pénibles, très douloureuses», dit-elle, évoquant un épisode qui lui «coûte très très cher».
Invité à prendre la parole après ces déclarations, Jean-Marc Reiser reconnaît qu’il a «quelquefois du mal à (s)e contrôler» quand il est «dans un état de colère». Il admet avoir «peut-être un peu rudoyé» la témoin à l’époque. Il faut l’insistance de la présidente de la cour, Christine Schlumberger, pour qu’il finisse par exprimer quelques «regrets»: «Je ne pensais pas que ça l’avait marquée autant».
10 ans de couple et une fille ensemble
Une autre ancienne compagne de l’accusé, Joëlle F., se présente ensuite à la barre. Ils ont eu une petite fille ensemble, en 1992, leur relation a duré 10 ans, mais elle parle de lui en disant «Monsieur Reiser», sans lui lancer un regard. «Ce n’était pas le couple parfait», euphémise-t-elle, évoquant «le travail de manipulation» qui la coupe de son entourage, et les violences régulières, ce mazagran reçu «dans le dos», cette assiette «dans la figure».
Leur couple s’est défait lorsque Jean-Marc Reiser a été incarcéré en 1997 pour viol et agression sexuelle, mais le contact n’a vraiment été rompu qu’à partir de 2018, et la disparition de Sophie Le Tan. Lorsqu’elle apprend son implication dans la disparition de la jeune étudiante, «c’était comme une évidence». «J’ai vu un menteur, un affabulateur. Il s’est foutu de moi».
Dans son box, Jean-Marc Reiser, qui se souvient des demandes précédentes de la présidente, exprime des remords. «Je voulais m’excuser auprès d’elle pour tous les torts que j’ai pu lui faire subir», dit-il d’une voix neutre. «Ca ne sert à rien de faire des excuses», lui rétorque la mère de sa fille, se tournant vers lui pour la première fois. «Il aurait mieux valu s’abstenir de faire qu’on se retrouve dans ces conditions.»