SuisseDéclarer les erreurs médicales devrait devenir une obligation
La fondation pour la sécurité des patients monte au front pour éviter les «never events» dans les hôpitaux.

Les erreurs graves en salle d’opération ne sont pas recensées
GettyC’est le cauchemar de tous les patients qui doivent subir une intervention: qu’une mauvaise partie du corps soit opérée. À l’image de cette terrible mésaventure qui est arrivée à une femme au Tessin: elle aurait dû se faire enlever une petite tumeur à un mamelon, elle s’est retrouvée au réveil avec l’ablation de ses deux seins. Le praticien avait confondu son opération avec celle d’une autre patiente… C’est ce que l’on appelle un «never event», soit un événement qui n’aurait jamais dû se produire, qui aurait pu être évité et qui occasionne un préjudice au patient.
Selon une enquête nationale réalisée par la fondation Sécurité des patients Suisse, les «never events», rares à l’échelle d’un établissement, sont relativement fréquents dans le système de santé, dans son ensemble. Selon les experts, il pourrait même y en avoir une centaine chaque année en Suisse. Un chiffre toutefois difficile à établir, personne ne sachant combien d’incidents se produisent réellement. Pourquoi? Parce que les hôpitaux ne sont pas obligés de les signaler.
Registre national réclamé
C’est la raison pour laquelle la Fondation a décidé de monter au front, afin que ces cas soient enregistrés en Suisse, explique le Tages-Anzeiger ce jeudi. «Comment pouvons-nous savoir si notre système de santé est sûr si personne n’enregistre ces incidents», interroge David Schwappach, directeur de la Fondation et professeur à l’Institut de médecine sociale et préventive de l’Université de Berne. Du coup, il réclame la création d’un registre central pour recenser tous les cas en Suisse. La Fondation organisera à cet effet les 18 et 19 novembre prochain, à Zurich, un congrès international sur la sécurité des patients.
Mais David Schwappach se refuse à critiquer le personnel soignant. «Tout le monde fait des erreurs, surtout en cas de stress. Et les personnes concernées en souffrent souvent elles-mêmes beaucoup», affirme-t-il. Pour lui, il s’agit surtout de détecter les sources d’erreur les plus fréquentes, comme des emballages de médicaments trop similaires, afin de rendre le système plus sûr. En outre, les cas doivent être rapportés de manière anonyme, afin de protéger les médecins.
Un tiers des hôpitaux n’a pas de directive
En août 2019, la Fondation pour la sécurité des patients avait réalisé une étude sur les erreurs médicales auprès des gestionnaires des risques et de la qualité dans les hôpitaux de soins aigus. Et les résultats étaient pour le moins alarmants: 30% des hôpitaux ne disposaient en effet pas de directives en cas de «never event». Et seuls 45% des gestionnaires de risques ont déclaré être informés de manière formelle en cas d’incident. Mais l’importance du sujet avait été soulignée par beaucoup. Une grande partie des participants (46%) estimaient que les hôpitaux accordaient trop peu d’attention au relevé systématique, à l’analyse (34%) et à la prévention (40%) des cas.