OlympismeAmbiance glaciale autour de l’antidopage aux Jeux de Tokyo
L’Agence mondiale antidopage et le Tribunal arbitral du sport se livrent à des joutes écrites. Les deux entités s’accusent mutuellement de travail mal effectué en marge des JO de Tokyo, l’été dernier.
- par
- Rebecca Garcia
Il n’y a pas un mot plus haut que l’autre, les formules de courtoisies sont bien présentes, pourtant il règne une froideur notable dans les écrits que s’envoient l’Agence mondiale antidopage (AMA/WADA en anglais) et le Tribunal arbitral du sport (TAS). Les deux entités ont échangé sur les procédures de lutte contre le dopage à Tokyo. L’un accuse l’autre d’avoir mal accompli ou géré certaines tâches. Alors même que la moindre erreur peut rapidement ternir des Jeux olympiques censés véhiculer les valeurs de sports propres et justes.
L’Agence mondiale antidopage s’est fendue d’un rapport de 45 pages pour délivrer des recommandations en vue des prochains JO. Elle évoque «un niveau de connaissance insuffisant de certains membres de la Chambre antidopage du Tribunal arbitral du sport», en insistant sur leur prétendue non-maîtrise de la jurisprudence et du fardeau de la preuve. «Pour les futurs jeux, l’équipe d’observation de l’AMA recommande à la Chambre antidopage du TAS de comprendre des membres davantage familiers avec le Code mondial antidopage, les règles, ou qu’ils aient accès à un entraînement ou un enseignement sur le sujet avant les jeux.»
Le document réclame également l’inclusion des membres de l’Agence dans certaines communications. Elle évoque trois audiences qui ont mené à des suspensions provisoires pendant les jeux. L’AMA affirme n’avoir reçu que l’un de ces rendez-vous. C’est une autre source qui lui a permis d’assister à un second cas, tandis que le dernier est totalement passé à la trappe.
Le Tribunal arbitral du sport réfute ces accusations. Il a répondu directement à chaque point de discorde dans un communiqué paru jeudi. Il estime que tout le monde a été informé des cas traités par sa Chambre antidopage. Entre le moment où un athlète est soupçonné de dopage et celui où il est effectivement suspendu, la procédure est extrêmement longue et rigoureuse. Or, il faut parfois aller vite.
À Tokyo, l’un d’entre eux devait concourir le jour même de son analyse sanguine illicite, ce qui a lancé une audience par téléphone. Le cas a été réglé en trois heures et s’inscrit dans une situation exceptionnelle qui ne comprend – toujours selon le TAS – aucun vice de procédure.
La qualification des membres chargés de statuer sur le dopage n’est pas non plus remise en question par le TAS, qui parle d’une sélection d’arbitres qualifiés. «Avec tout le respect pour ce dénommé «manque de connaissance» de la part des arbitres de la Chambre antidopage du TAS, une telle affirmation paraît être basée sur une observation subjective d’un employé du département légal de l’Agence mondiale antidopage et n’a à aucun moment été évoquée directement avec la Chambre du TAS.»
L’organe judiciaire fustige autant le fond que la forme, en regrettant qu’aucun des problèmes mentionnés n’ait été évoqué directement à Tokyo. «Cela aurait été plus facile que d’attendre la publication du rapport 6 mois plus tard», ajoute le communiqué.
Les liens entre l’Agence mondiale antidopage et le Tribunal arbitral du sport apparaissent comme tendus à l’aube d’une nouvelle quinzaine olympique. Ces acteurs de l’ombre de ce monde sportif risquent de devoir se mettre rapidement d’accord pour lutter ensemble contre les tricheurs.