Cours d’eau suissesGare aux effets indirects des mesures contre le changement climatique
Une étude de l’Institut fédéral des sciences et technologies de l’eau met en lumière que «les effets indirects du changement climatique non seulement amplifient les effets directs, mais peuvent même les dépasser à court terme».
Une étude publiée récemment par l’Institut fédéral des sciences et technologies de l’eau (Eawag) montre que le changement climatique n’est pas le seul responsable des effets sur les cours d’eau, mais que «les actions anthropiques (ndlr: faites par l’être humain) pour réagir à ce dernier sont au moins aussi décisives».
Pour leur étude, les scientifiques ont comparé les effets directs du changement climatique (voir encadré) et les effets indirects des actions anthropiques sur la qualité et l’écologie des cours d’eau. Ils ont constaté «que les effets indirects non seulement amplifient les effets directs, mais peuvent même les dépasser à court terme», explique l’Eawag dans un communiqué de presse.
Pour atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050, la Suisse accélère le passage aux énergies renouvelables – dont l’énergie hydraulique. Mais «ce qui est bon en matière d’émissions de gaz à effet de serre a pourtant des répercussions négatives sur les systèmes aquatiques, car si le débit de l’eau baisse en aval des centrales hydrauliques, la rivière se réchauffe et il y a un risque que son lit s’assèche à certains endroits. De plus, les barrages et les centrales hydrauliques représentent des obstacles infranchissables pour les organismes aquatiques», dévoile Morgane Brosse, biologiste de l’évolution et auteure principale de l’étude de l’Eawag.
Pas question toutefois pour la biologiste d’arrêter d’agir. «Mais il faut analyser soigneusement les effets des mesures afin que nos actes n’empirent pas la situation», nuance-t-elle. Elle s’explique plus en détail.
Pour l’agriculture, «il faut que les nouvelles cultures soient non seulement évaluées en fonction de leur niche climatique et de leur capacité à pousser, mais aussi en fonction de leur consommation d’eau et de l’empreinte des engrais et pesticides dans les cours d’eau de manière à éviter que les nouvelles pratiques aient des effets négatifs supplémentaires sur les systèmes aquatiques», affirme-t-elle.
Quant à l’énergie hydraulique, «il apparaît de plus en plus clairement que si elle est renouvelable, son utilisation à outrance est dans de nombreux cas non durable. Or, quand l’eau est utilisée jusqu’à la dernière goutte, la biodiversité est la première victime», poursuit-elle. À ses yeux, il est nécessaire d’optimiser l’utilisation des lacs de retenue «de manière non seulement à produire de l’électricité, mais aussi à utiliser l’eau stockée pour supporter les périodes de sécheresse». Elle est convaincue que «des solutions gagnantes à la fois pour la protection du climat et pour la biodiversité peuvent être trouvées».