FranceLa maison d’une Suissesse incendiée en Corse: «c’est inhumain»
Une famille suisse mais intimement liée à l’île de Beauté ne comprend absolument pas pourquoi elle a été ciblée.
- par
- Renaud Michiels
Deux nouvelles résidences secondaires ont été détruites par des incendies certainement volontaires sur la commune de Conca, en Corse-du-Sud. Elles étaient taguées des slogans «IFF» («I Francese Fora», les Français dehors) et «Fora», a annoncé le parquet ce jeudi. La nuit précédente, c’est la maison appartenant à des Suisses qui a été ciblée et brûlée. Or dans cette famille, c’est l’incompréhension la plus totale car elle se dit intimement liée à l’île.
Cet incendie a eu lieu dans la nuit de mardi à mercredi à Pianotolli, également en Corse-du-Sud. La villa a été dévastée mais il n’y a pas de blessés. Là aussi des tags ont été laissés: «IFF», «Liberta» ou «Per tè Yvan», en référence à Yvan Colonna. L’attaque a été signée par une «Action des jeunes pour la renaissance de la Corse», «AJRC».
«On n’identifie pas encore dans le paysage ce groupuscule, si ce n’est qu’il est apparu récemment», a commenté Nicolas Septe, procureur de la République d’Ajaccio, relate «Le Parisien». Une enquête pour destruction par incendie a été ouverte. Le procureur a précisé que les propriétaires suisses ne comprenaient absolument pas pourquoi ils avaient été ciblés par des revendications nationalistes.
«Parlu corsu tutti i ghjorni»
Cette maison appartient à la famille de Madeleine Istria, 89 ans, originaire de Corse et installée en Suisse. Elle l’a récemment léguée à sa fille, une biologiste qui travaille en Suisse, où elle vit avec son mari franco-suisse. Tous les membres de cette famille passaient des vacances dans leur résidence corse.
Mais les liens sont bien plus profonds, selon l’octogénaire. Très émue, elle a dit sa tristesse et son incompréhension à France 3. «Ma maison de famille est à Moca-Croce. J’ai passé mon Bac à Ajaccio, ma mère a été professeure à Ajaccio pendant vingt ans, et elle était adorée. Mes grands-mères étaient de Campile, Cacciaguerra; et de Zonza, Giudicelli. J’ai élevé mes enfants dans l’amour de la Corse. Parlu corsu tutti i ghjorni. Mes fils et ma fille ont appris le corse, tous mes petits enfants le comprennent et chantent le Dio Vi Salvi Regina à toutes les grandes manifestations», a-t-elle détaillé.
«Pourquoi une famille qui est Corse depuis si longtemps a-t-elle été attaquée? Ma fille, effectivement, elle est expatriée en Suisse. Est-ce vraiment un crime de partir loin, quand malheureusement en Corse il n’y a pas les structures pour son métier?» a interrogé Madeleine Istria. Et de lâcher: «Je ne reconnais plus mon pays. Je ne reconnais plus mon village, où tout le monde était sympathique, agréable, je ne sais plus ce qui se passe, c’est inhumain».