Justice vaudoiseD’avocate à prévenue: «Ma réputation est en jeu»
Dénoncée par un confrère, Me Gloria Capt va devoir répondre de calomnie, tentative de contrainte et violation du secret professionnel.


Après 30 ans d’expérience, Me Gloria Capt va se retrouver face à une Cour de justice dès le 17 janvier à Vevey, non pas comme avocate, mais comme accusée.
Jean-Paul GuinnardPasser du statut d’avocate à celui de prévenue, c’est bien ce qui arrive à Me Gloria Capt à la suite d’une série de plaintes pénales déposées par l’un de ses confrères. Ces dénonciations ne sont pas seulement dirigées contre l’ancienne municipale d’Yverdon (VD) et ancienne députée PLR de 62 ans (ndlr. qui se représente en mars 2022), mais également contre sa cliente, future ex-épouse du plaignant. Cette affaire se joue dans un contexte particulièrement émotionnel. Celui d’un divorce compliqué. Les infractions retenues à l’encontre des coaccusées ne sont pas anodines. Si une condamnation devait intervenir en janvier 2022, cela pourrait être lourd de conséquences pour la poursuite de la carrière de Me Capt.
Contribution jugée indue
L’acte d’accusation du procureur Hervé Nicod retient, pour la femme de robe, la calomnie, subsidiairement la diffamation, la tentative de contrainte et la violation du secret professionnel. Les mêmes charges pèsent sur la coprévenue, la dénonciation calomnieuse en sus, la violation du secret en moins. Les faits s’étendent de juin 2018 à novembre 2020. Il est reproché à la future divorcée d’avoir envoyé, sur conseil de Me Gloria Capt, un commandement de payer de 3500 francs pour des contributions d’entretien à son époux, alors qu’elle-même lui devait la même somme à titre de dépens dans le cadre de la procédure en cours. Le Parquet considère que la pression de la partie poursuivie ne s’est pas arrêtée là. Et accuse l’avocate vaudoise d’avoir écrit au Bâtonnier de l’Ordre des avocats pour tenter d’obtenir le versement de ce montant jugé indu.
Fausses allégations?
Le Ministère public affirme aussi que Me Gloria Capt, toujours d’entente avec sa cliente, a déposé une plainte pénale pour violation d’une obligation d’entretien en sachant le mari innocent. Et qu’elle a continué à propager de fausses allégations notamment en certifiant au Tribunal fédéral (TF) que Monsieur avait volontairement diminué ses revenus. Baisse qui serait en fait due à un burn-out, selon le procureur. Et puis il y a encore cette histoire d’e-mail retranché du dossier de divorce et toutefois produit par l’avocate lors de son audition par le Parquet. Ce dernier estime que, ce faisant, la prévenue a révélé un secret. Lors de cette même audition, Me Capt aurait porté atteinte au plaignant en maintenant que la somme de 3500 francs (ndlr. commandement de payer) était toujours due.
Impossibles jours-amende…
Le Ministère public ne se présentera pas aux débats et soumet ainsi ses propositions de sanctions dans son acte d’accusation. Pour Me Gloria Capt, une peine pécuniaire de 300 jours-amende à 3000 francs (ndlr. le maximum qu’octroie le Code pénal), soit 900 000 francs (!) avec sursis pendant deux ans et une amende de 10’000 francs. Surprenant puisque la quotité maximale des jours-amende ne peut plus excéder 180 jours depuis le 1er janvier 2018. Pour sa cliente, une peine pécuniaire de 50 jours-amende à 50 francs avec sursis pendant deux ans et une amende de 600 francs. Jointe par téléphone, l’avocate «ne pense pas avoir fait quelque chose de faux. J’ai fait mon métier et procédé à des actes classiques comme on le fait dans ce genre d’affaires».
«J’ai confiance en la justice»
«Je n’ai pas eu de comportement qui sorte de la norme. Très franchement, on n’est jamais sereine. Ça n’est pas agréable. Mais j’ai confiance en la justice. Si je suis condamnée, les avocats ont du souci à se faire. Ma réputation est en jeu», ajoute la femme de loi. Également contacté, l’avocat plaignant, futur ex-mari de la cliente de Me Capt, se limite à deux phrases: «Je ne fais aucun commentaire. C’est une affaire privée».
L’audience de police se tiendra dès le 17 janvier au Tribunal d’arrondissement de l’Est vaudois à Vevey. Deux jours ont été agendés.