CommentaireLa fin d’une législature qui fut très bourgeoise
La session d’automne s’achève sur un clivage gauche-droite très marqué aux Chambres fédérales. Résultat: trois référendums sont lancés à gauche.
- par
- Eric Felley
Ce vendredi matin, les Chambres fédérales ont procédé aux votes finaux qui marquent la fin de la session d’automne, et cette fois aussi de la 51e législature (qui se termine officiellement le 3 décembre). Les parlementaires ont adopté 21 objets traités durant cette session. Celle-ci a été à l’image de ces quatre années marquées par la pandémie, la guerre en Ukraine, la crise de l’électricité et la fin abrupte de Credit Suisse.
Mais politiquement, ce qui a marqué cette législature est l’évolution du rôle de pivot de l’ex-PDC entre l’UDC et le PLR d’un côté, et le PS, les Verts et les Vert’libéraux de l’autre. Il s’est fortement réduit. Devenu le Centre, le parti de Gerhard Pfister n’a jamais été aussi à droite dans ses votes au Parlement. À part sur l’immigration et la politique extérieure, l’UDC, le PLR et le PDC ont nettement resserré leurs boulons. Très souvent leurs groupes s’expriment de manière compacte dans des votes considérés comme «stratégiques» pour faire barrage à la gauche.
Ce fut le cas lors de cette dernière session notamment pour le développement des autoroutes, pour les objets affaiblissant les locataires, dans la maîtrise des coûts de la santé ou pour l’allégement de la réglementation pour les entreprises. C’est pourquoi trois référendums sont annoncés: l’un contre l’extension des routes nationales et les deux autres contres les objets concernant le droit du bail. Le peuple devra probablement trancher en 2024.
Quand le peuple corrige sa droite
Si le trio bourgeois parvient à imposer sa loi au Parlement, il connaît des fortunes diverses devant le peuple. Ces quatre dernières années, la gauche a gagné contre la loi sur la chasse en 2020, pour l’initiative des soins infirmiers forts en 2021, pour l’initiative contre la publicité du tabac en 2022, contre la déduction des frais de garde par référendum en 2020, contre l’abaissement du droit de timbre en 2022 et contre la suppression de l’impôt anticipé pour les sociétés en 2022, deux fois par référendum. Si la gauche y avait cru un tout petit peu plus, elle aurait pu faire échouer en 2020 l’achat des F-35 américains, qui sont passés à 50,1%, soit 8500 voix.
C’est là un des paradoxes de la population suisse, qui choisit tous les quatre ans une majorité de droite. Celle-ci est toutefois désavouée dans les urnes, quand elle prend des décisions, que l’on pourrait qualifier d’injustes d’un point de vue économique. Quand le trio bourgeois charge trop le bateau en faveur des classes favorisées, il se prend un râteau. Ce pourrait être le cas dans cette dernière session au sujet du renforcement des droits des propriétaires contre les locataires. Si on y ajoute le ressentiment face à la baisse du pouvoir d’achat ou l’augmentation des primes, le terrain est miné pour ces deux lois contestées.
Quoi qu’il en soit, cette dernière session aura permis à ceux qui sont encore indécis pour les élections fédérales du 22 octobre prochain de choisir définitivement leur camp en fonction de leurs intérêts. Ou contre leurs intérêts, comme cela arrive aussi.