Open d’AustralieCommentaire: le temps file, même pour Novak Djokovic
Le commentaire de notre journaliste après l’élimination en demi-finales de Novak Djokovic face à Jannik Sinner, vendredi.
- par
- Jérémy Santallo
Il nous a tellement habitué à tout rafler, à revenir des ténèbres les plus sombres (Wimbledon 2019, expulsion d’Australie, exclusion de l’US Open), que le séisme de sa sortie de route à Melbourne est à la hauteur de la légende qu’il a écrite (24 titres en Grand Chelem) et de l’héritage surhumain qu’il va laisser lorsqu’il aura rangé sa raquette.
Pour la deuxième fois en six mois, Novak Djokovic a fait son âge, estourbi dans une rencontre au meilleur des 5 sets. Il y avait eu cette défaite en finale contre Carlos Alcaraz à Wimbledon – 6-4 au 5e. Il y a désormais celle en demi-finale de cet Open d’Australie. Mais là, contrairement à l’été dernier, le Serbe a semblé terriblement impuissant devant le chef d’œuvre de Jannik Sinner, un contreur trop fort pour lui. Vendredi, le meilleur relanceur du monde n’était pas celui que l’on croit et c’était assez fascinant à observer, même à la TV.
Bien qu’il faille accorder un immense crédit au joueur italien, qui arrive enfin à maturité, cette élimination de Djokovic interroge. Pas au niveau auquel il s’est lui-même habitué, le Serbe a traversé ce tournoi dans la douleur. En raison du poignet qui le faisait souffrir après une année 2023 harassante? De ce rhume attrapé en début de quinzaine? De ces abdominaux qu’il a touchés au cours de la demi-finale? Classe, Djokovic n’a cherché aucune excuse face aux journalistes et a applaudi la performance majuscule de Sinner.
Faut-il voir le début d’une passation de pouvoir entre le No 1 mondial et la nouvelle génération? Peut-être qu’il y a un peu de cela. Même lui n’a pas été contre cette idée, se contentant de dire que ce n’était pas «nécessairement le début de la fin». Il fut une époque pas si lointaine où il aurait peut-être rappelé qu’il avait gagné trois Grand Chelems la saison passée et qu’il restait l’homme à déboulonner aux quatre coins de la planète.
Tout au long du tournoi, Djokovic a semblé différent, par ses difficultés sur le court mais aussi en-dehors, lui qui trouve de plus en plus déchirant de quitter sa famille. Lassitude? L’avenir nous le dira, lui qui attaquera, une fois n’est pas coutume, Roland-Garros sans avoir triomphé en Australie.
Vendredi, ovationné par sa Rod Laver Arena, le décuple vainqueur à Melbourne Park avait quelque chose de profondément humain. Et ça non plus, on n’y était pas habitué.