Ski alpinAlexis Pinturault: «Dans le ski alpin, on est très bête!»
Le Français, qui a dû mettre un terme à sa saison après une violente chute vendredi passé à Wengen, est revenu sur son choc avant son opération prévue mardi prochain. Il en veut à la FIS.
- par
- Sylvain Bolt - Kitzbühel
Victime d’une grosse chute sur le saut du Silberhorn vendredi passé à Wengen, Alexis Pinturault a dû mettre un terme à saison. «Quand je réceptionne du saut, je sens tout de suite que mon genou lâche, qu’il y a un claquement comme j’avais pu avoir à la cheville il y a dix ans maintenant. J’ai tout de suite su que les choses n’étaient pas bonnes, a expliqué le Français dans un appel en visioconférence. J’ai eu beaucoup d’examens avec des hématomes au dos, au ventre, à la hanche, aux mains, aux poignets… Partout. La première nuit a été difficile, je n’arrivais même pas à trouver de position. Mais les plus gros problèmes étaient dans le genou gauche, avec un bon nombre de choses abîmées ou cassées qui nécessitent une opération chirurgicale.»
Le verdict de l’hôpital d’Interlaken a été sans appel: rupture des ligaments croisés antérieurs du genou gauche. L’opération devrait avoir lieu mardi prochain. À 32 ans, le vainqueur du gros Globe de cristal en 2021 est victime de sa première blessure sévère. «Une de mes plus grosses qualités est mon physique, ça m’a toujours préservé de la blessure. Après, il y a des accidents qui peuvent être malchanceux, même si l’on est bien préparé physiquement… Il y a toujours cette épée de Damoclès qui existe, déplore le skieur de Courchevel. À mon âge, on n’a plus envie que ça arrive. Mais il n'y a jamais de bon moment.»
Son accident, survenu quelques jours après la naissance de sa petite fille Olympe, a forcément fait naître des doutes dans l’esprit de «Pintu», quant à la suite de sa carrière. «Oui, ça m’a complètement traversé l’esprit. Je suis conscient des complications qu’il peut y avoir. Je suis conscient que ce n’est pas si simple de revenir et je ne sais pas si j’arriverai à revenir à mon meilleur niveau à l’avenir.»
Une surcharge malvenue
Le Français, qui s’était lancé le défi de remporter une descente de Coupe du monde, n’arrive pas à se projeter vers la suite de sa carrière sportive. «Pour l’instant, je me focalise uniquement sur ce que je dois faire pour l’opération. Dans la rééducation, je sais que j’en ai pour trois semaines, un mois avec du kiné, du renforcement, mais le travail de convalescence sera le plus important, a-t-il détaillé. À aucun moment je ne pense à l’éventualité de remonter sur les skis et quand. Tout cela viendra bien plus tard.»
Mais un des nombreux skieurs blessés sur le Lauberhorn cette année n’a pas caché son dépit: «Ce qui est sûr, c’est que dans le monde du ski alpin, on est très bête. Il n’y a que les idiots qui refont la même erreur, a relevé le champion du monde 2023 de combiné. Par rapport aux calendriers, on avait limité le nombre de courses, mais aujourd’hui on a une démultiplication avec des courses qu’on ajoute encore et encore, ce qui crée une surcharge. Nous, les athlètes, ne sommes pas contre plus de courses, mais contre une surcharge. Je ne sais pas si ma blessure est liée à ça, mais finir sur une longue descente à Wengen alors qu’on a eu deux entraînements, une descente courte et un super-G: on a clairement envie de balancer les athlètes à l’hôpital!»
Le récent père de famille, qui a vécu toutes les émotions en une semaine folle, souhaite que des mesures soient prises. «Les comités d'organisation, dont la Suisse, devraient dire: «On ne met pas une deuxième descente à Wengen». C'est pareil aujourd’hui à Kitzbühel. Il faut faire un vrai ménage, mais personne n’a envie de le faire, a expliqué le Français. Le système est gangrené dans une vieille manière de faire, avec une direction constituée de manière très archaïque, qui fait qu’on n’est pas entré dans le changement.»