SalvadorL’état d’urgence instauré après une vague d’homicides
En 24 heures, le petit pays d’Amérique centrale déplore 62 meurtres. Pour endiguer le fléau, l’état d’urgence a été instauré cette nuit par le parlement.
Le Parlement du Salvador, à la demande du président Nayib Bukele, a approuvé dimanche l’instauration de l’état d’urgence pour un mois dans ce petit pays d’Amérique centrale afin de lutter contre la violence des gangs criminels, accusés d’avoir commis 62 meurtres en 24 heures.
Le décret, approuvé par une large majorité du Parlement, dispose «qu’un régime d’urgence est déclaré sur l’ensemble du territoire national en raison de graves troubles à l'ordre public par des groupes criminels».
Il restreint la liberté de réunion, l’inviolabilité de la correspondance et des communications, le droit à voir un avocat en détention et autorise les arrestations sans mandat. Nayib Bukele a également décrété «l’alerte maximale» dans toutes les prisons.
«Toutes les cellules seront fermées 24H sur 24H et 7 jours sur 7, personne n’est autorisé à en sortir», a tweeté le président. «C’est un message adressé aux gangs: à cause de vos agissements, vos gars ne verront pas un rayon de soleil».
Cet état d’urgence «permettra à notre gouvernement de protéger la vie des Salvadoriens et de faire face à la criminalité», a assuré le président de l’Assemblée législative Ernesto Castro, sur Twitter.
Le président Bukele a précisé que pour «la vaste majorité des gens, la vie continuera comme avant (...) à moins que vous ne soyez membre d’un gang ou soyez considéré comme suspect par les autorités».Munis de fusils d’assaut et équipés de gilets pare-balles, des policiers et des militaires patrouillent les rues tout en procédant à des arrestations.
Selon le bilan officiel, le département central de La Libertad a enregistré depuis vendredi douze homicides, suivi par la capitale San Salvador et par le département d’Ahuachapan (ouest), avec neuf meurtres chacun. Le reste est réparti dans les onze autres départements du pays. La police et l’armée du Salvador ont lancé samedi une opération contre la Mara Salvatrucha, un des plus dangereux gangs du pays.
Plusieurs chefs du gang ont été arrêtés et sont accusés d’être «responsables des homicides recensés ces dernières heures», a indiqué la police. Les autorités ont précisé dimanche soir que «plus de 600 membres de gangs» ont été arrêtés.
«Rebond des homicides»
Selon la Constitution salvadorienne, l’état d’urgence peut être mis en place «en cas de guerre, d’invasion du territoire, de rébellion, de sédition, de catastrophe, d’épidémie ou d’autre calamité générale, ou de graves perturbations de l’ordre public». Le chef de l’Etat a demandé au bureau du procureur de traiter avec la même «efficacité» tous les cas de membres de gangs, prévenant qu’il garderait un oeil sur «les juges qui favorisent les criminels».
«Nous ne reculerons pas dans cette guerre contre les gangs, nous ne nous reposerons pas tant que les criminels responsables de ces actes ne seront pas capturés et traduits en justice», a tweeté la police. La Mara Salvatrucha, Barrio 18 et d’autres gangs vivant principalement du trafic de drogue et de l’extorsion comptent environ 70’000 membres au Salvador, dont plus de 17’000 sont incarcérés, selon les autorités.
L’ONG Human Rights Watch suit «avec inquiétude la grave augmentation des homicides» au Salvador, a fait savoir Juan Pappier, chercheur au sein de la division Amériques de l’organisation. «Il est urgent que le gouvernement protège la population avec des mesures durables qui respectent les droits de l’homme. La politique de sécurité doit toujours s’inscrire dans le cadre de l’Etat de droit», a-t-il ajouté.
Le président salvadorien, âgé de 40 ans et au pouvoir depuis 2019, bénéficie d’une forte popularité due notamment à ses promesses de lutter contre le crime organisé. Mais ses penchants autoritaires lui valent des critiques véhémentes de ses opposants et de la communauté internationale.
Le Salvador a recensé 1140 homicides en 2021 -soit 18 pour 100’000 habitants-, le chiffre le plus bas depuis la fin de la guerre civile en 1992.