Football - La Suisse sait exporter ses talents dans le top 5 européen

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FootballLa Suisse sait exporter ses talents dans le top 5 européen

Dans un rapport du CIES, on apprend que le championnat suisse a empoché 381 millions d’euros des championnats du «Big 5» entre 2012 et 2021. Mais à quoi rime vraiment ce montant?

Thibaud Oberli
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Thibaud Oberli
Selon le site Tranfermarkt, le transfert le plus cher depuis un club suisse vers un club du «Big 5» a eu lieu en juillet 2016. Il s’agissait du départ de Breel Embolo du FC Bâle vers Schalke 04 pour la coquette somme de 26,5 millions d’euros.  Manuel Akanji (21,5 mio), Mohamed Elyounoussi (18 mio), Mohamed Salah (16,5 mio) et Matheus Cunha (15 mio) complètent le top 5.

Selon le site Tranfermarkt, le transfert le plus cher depuis un club suisse vers un club du «Big 5» a eu lieu en juillet 2016. Il s’agissait du départ de Breel Embolo du FC Bâle vers Schalke 04 pour la coquette somme de 26,5 millions d’euros. Manuel Akanji (21,5 mio), Mohamed Elyounoussi (18 mio), Mohamed Salah (16,5 mio) et Matheus Cunha (15 mio) complètent le top 5.

AFP

La Suisse est le 12e pays qui a empoché le plus d’argent en indemnités de transferts depuis les clubs des 5 plus grands championnats européens. Du côté comptable, le montant empoché s’élève à 381 millions d’euros, soit une moyenne de 42 millions par année entre 2012 et 2021, selon une étude de l’Observatoire du football du CIES de l’Université de Neuchâtel. Celle-ci s’est penchée sur l’économie des transferts du «Big 5» et les impacts de la pandémie sur celle-ci. Une donnée brute difficile à interpréter, mais qui permet de questionner la place du football suisse dans la constellation internationale. Pour y voir plus clair, nous en avons parlé avec Lorenzo Falbo, agent de joueur depuis 2005 et formateur dans le milieu du management sportif:

Le classement des partenaires du Big-5 selon le montant empoché entre 2012 et 2021, sans les deux premières lignes, occupées par le Portugal (2’089 mio) et la deuxième division anglaise (1994 mio).

Le classement des partenaires du Big-5 selon le montant empoché entre 2012 et 2021, sans les deux premières lignes, occupées par le Portugal (2’089 mio) et la deuxième division anglaise (1994 mio).

Rapport mensuel de l’Observatoire du football CIES n°67 - Septembre 2021

Lorenzo Falbo, qu'est-ce que vous évoque intuitivement ce montant de 381 millions?

Ce chiffre me paraît tout à fait logique et correct. Chaque année, peut-être excepté cette saison, il y a des ventes du marché suisse vers ces championnats. Correct dans le sens où chaque année, il y a deux à cinq joueurs qui partent de Super League vers ces championnats étrangers. Ce sont Bâle et YB qui ont fourni le plus de joueurs pour atteindre ces 381 millions, mais de temps en temps, ils partent des autres clubs. Par exemple Sion a vendu Matheus Cunha à Leipzig, Ruben Vargas à Augsburg de Lucerne ou encore Darian Males du même club vers l’Inter Milan.

Ce chiffre représente-t-il la majeure partie des indemnités touchées en Suisse? Certains joueurs partent hors du «Big 5».

Hors «Big 5», il y a peu de transferts depuis la Suisse vers l’étranger et lorsqu’ils ont lieu, ce sont pour des sommes assez dérisoires. Il y a bien peut-être quelques transferts vers la Russie, mais dans une proportion anecdotique. À mon sens, ce chiffre de 381 millions reflète bien la situation.

Cela place la Suisse comme le 12e bénéficiaire/partenaire international des clubs du «Big 5». La Suisse serait un bon terreau pour progresser ou plutôt un championnat de transition pour les joueurs extra-européens?

Les deux cas de figure existent. D’un côté certains Suisses qui vont performer en Super League et qui seront engagés à l’étranger mais ça peut-être aussi, et ça l’est souvent, un tremplin pour les jeunes joueurs étrangers. Cette année, Arthur Cabral en est un bon exemple. Ces jeunes étrangers qui viennent faire leur première expérience. Matheus Cunha est de nouveau un exemple parlant. Il a signé cet été à l’Atlético Madrid, il était parti du FC Sion en 2018 (ndlr: environ 15 millions déboursés par Leipzig) et avant cela, il évoluait en D2 brésilienne. Ces deux propositions reflètent ce qu’est notre championnat: une rampe de lancement pour beaucoup de joueurs extracommunautaires qui arrivent pour une première expérience en Europe, et aussi pour les jeunes suisses les plus performants qui peuvent ensuite partir à l’étranger après une ou quelques saisons en Super League. Cela reflète bien le panorama.

Deux clubs sont les principaux pourvoyeurs de joueurs, mais est-ce que le championnat dans son ensemble en bénéficie?

Sur ce point, je dirais plutôt non. C’est une des problématiques actuelles. Le fossé entre Young Boys et Bâle et les autres clubs se creuse. Finalement, cette manne bénéficie beaucoup à ces clubs-là, mais très peu aux autres clubs suisses. Ils peuvent toutefois tirer un avantage dans le fait que cela attire les regards et que le football suisse est de plus en plus observé. Malheureusement, le Covid est passé par-là, mais cette dynamique antérieure permet d’imaginer que d’autres clubs puissent vendre leurs joueurs à l’étranger. Les vendre en direct, car il arrive souvent que ces clubs vendent des joueurs à YB ou Bâle, et ce sont ensuite ces deux acteurs qui effectuent les grosses ventes à l’étranger. Donc l’exposition du championnat pourra peut-être donner plus de possibilités aux clubs d’effectuer des transactions directes.

Ces ventes directes, c’est une tendance que vous observez? Quelles évolutions sont imaginables?

Le championnat suisse est de plus en plus observé, cela est une évidence. Il y a encore quelques années, les clubs espagnols ne venaient pas prospecter en Suisse, ce qu’ils font maintenant. Les Allemands, par tradition, y sont depuis longtemps. Les Italiens sont aussi davantage présents, tout comme les Français, comme en témoignent les départs des Suisses dans cette direction (ndlr: Dan Ndoye et Jordan Lotomba à Nice, Jonas Omlin à Montpellier, Elie Youan à Nantes) avec des réussites diverses. Cette tendance bénéficie au championnat suisse dans le sens où les clubs moyens arriveront peut-être à vendre leurs joueurs à l’étranger. Mais arriveront-ils à les vendre au même montant que YB et Bâle? Ces deux clubs ne bradent pas leurs joueurs! C’est important et c’est pour cela que la somme dont on parle est relativement élevée. Les joueurs ne sont pas vendus au rabais, les dirigeants attendent la bonne offre et ils sont intransigeants là-dessus. Par exemple, Christian Fassnacht a encore reçu des offres cet été, mais Young Boys ne l’a pas laissé partir, parce qu’ils sont qualifiés pour la Ligue des champions. Par rapport à cela, les clubs sont cohérents.

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