FranceLa disparition d’une jeune femme élucidée 36 ans après
Jeudi, la justice affirme avoir mis la main sur le potentiel meurtrier d’une femme de 25 ans, disparue en mai 1986 à Pontcharra, en France.
La disparition inexpliquée d’une jeune femme, survenue il y a trente-six ans près de Grenoble, a été «enfin élucidée», et un homme de 56 ans a été mis en examen pour «enlèvement, séquestration et meurtre» après être passé aux aveux, a annoncé jeudi le Parquet de Grenoble.
Âgée de 25 ans et mère de deux enfants, Marie-Thérèse B. avait disparu sans laisser de traces le 22 mai 1986 à Pontcharra (Isère), alors qu’elle distribuait des journaux. Sa voiture avait été retrouvée le soir près d’une maison délabrée. Les clés du véhicule étaient toujours sur le tableau de bord et son sac se trouvait sur le siège avant. Malgré des recherches poussées menées durant dix jours par la gendarmerie avec l’aide, notamment, d’un hélicoptère, la jeune femme était restée introuvable.
«Persévérance des familles»
L’enquête, qui avait fait l’objet d’un non-lieu en novembre 1987, avait été rouverte en 2020, notamment grâce à «la persévérance des familles» et à la «volonté» des enquêteurs, a déclaré Éric Vaillant, procureur de la République de Grenoble lors d’un point presse. Le suspect habitait à proximité à l’époque, il avait été soupçonné puis relâché. Interpellé sur la base de nouveaux éléments, il «a reconnu l’avoir tuée», pendant sa garde à vue et devant le juge d’instruction, a-t-il précisé. Le meurtrier présumé «collabore à ce stade» avec les enquêteurs, mais le corps de la disparue n’a pas encore été retrouvé, a-t-il dit.
Le mobile déclaré serait un «litige» pour un problème de stationnement et «à ce stade (sans) aucune connotation sexuelle», a précisé son adjoint Boris Duffau. Le profil violent du suspect avait à l’époque déjà «attiré l’attention des enquêteurs», qui avait levé sa garde à vue faute d’éléments «suffisamment probants». Il avait notamment été condamné à deux reprises pour des agressions contre des femmes, la première fois en 1985 quand il avait 14 ans.
«Ça fait trente-six ans que je suis en prison»
Les proches de la victime avaient «toujours eu la conviction que la personne mise en examen était l’assassin», a déclaré Me Bernard Boulloud, l’avocat de la famille B., en faisant part du «grand soulagement» de ses clients. «Ça fait trente-six ans que je suis en prison. Maintenant la porte s’ouvre, c’est lui qui va y aller, peut-être pas pour longtemps», a-t-il dit, en citant le mari de la victime.
La justice pourrait en effet se heurter à un problème de prescription si les enquêteurs ne parviennent pas à établir la charge d’enlèvement-séquestration, le crime de meurtre étant prescrit au bout de dix ans, a souligné Éric Vaillant, prédisant un «débat juridique complexe» sur ce point.
Le procureur s’est néanmoins félicité de l’élucidation de ce cold case, le deuxième à Grenoble en moins d’un an après celle de l’affaire Marinescu en juin 2021. Dans cette affaire, un homme avait été mis en examen et incarcéré vingt-huit ans après les faits, pour l’assassinat de sa femme et le meurtre et viol de sa fille, retrouvées égorgées en 1993 près de Grenoble.
«Expérience précieuse»
Ce résultat est «d’abord la conséquence de la persévérance des familles aidées par leurs avocats et les associations des familles de disparus», qui a été «parfaitement relayée par la volonté de la justice et des services d’enquête de faire toute la vérité sur ces affaires anciennes», a-t-il souligné.
Le procureur a aussi loué «l’expérience précieuse» accumulée par la gendarmerie de Grenoble dans l’analyse des dossiers criminels anciens, notamment en lien avec l’affaire Nordahl Lelandais. Cet ancien militaire a été condamné le 18 février à la réclusion criminelle à perpétuité pour le meurtre de la petite Maëlys en août 2017, alors qu’il purgeait déjà une peine de 20 ans de prison pour le meurtre d’un jeune caporal quelques mois plus tôt.