Espagne#MeToo au cœur de la cérémonie annuelle du cinéma espagnol
Marquée par le scandale sexuel qui touche le cinéma espagnol, la 38e cérémonie des Goya a fait la part belle au film «Le Cercle des neiges».
![Le réalisateur espagnol Juan Antonio Bayona, à la cérémonie des Goya, samedi 10 février 2024 à Valladolid. Le réalisateur espagnol Juan Antonio Bayona, à la cérémonie des Goya, samedi 10 février 2024 à Valladolid.](https://media.lematin.ch/4/image/2024/02/11/c4b0dd99-90c9-48c1-8849-0a7f33e829f9.jpeg?auto=format%2Ccompress%2Cenhance&fit=max&w=1200&h=1200&rect=0%2C0%2C2048%2C1365&fp-x=0.5&fp-y=0.5003663003663004&s=3885fb3e138db59a3c9cd096fe71c94c)
Le réalisateur espagnol Juan Antonio Bayona, à la cérémonie des Goya, samedi 10 février 2024 à Valladolid.
AFPLa cérémonie des Goya, grand-messe annuelle du cinéma espagnol, a consacré samedi le film «Le Cercle des neiges», au moment où le secteur est secoué par les accusations de violences sexuelles à l’encontre d’une figure du cinéma indépendant.
Réalisé par Juan Antonio Bayona («Jurassic World: Fallen Kingdom», «The Impossible»), le long-métrage, qui a reçu le prix du meilleur film et du meilleur réalisateur, retrace l’odyssée des jeunes joueurs d’une équipe de rugby amateur uruguayenne, dont l’avion s’est écrasé dans la cordillère des Andes en 1972 alors qu’ils se rendaient au Chili.
La cérémonie, qui a également décerné le prix du meilleur film européen au film français «Anatomie d’une chute» et une récompense honorifique à l’actrice américaine Sigourney Weaver, a été marquée par le scandale sexuel qui touche l’Espagne.
#SeAcabo
«Il est urgent que nous exigions tous des garanties d’égalité, et cela passe par la condamnation de tous les abus et de la violence sexuelle», a déclaré en ouverture l’actrice et chanteuse Ana Belén qui présentait cet évènement, organisé cette année à Valladolid (nord-ouest).
«Ici aussi au cinéma, c’est terminé», a-t-elle clamé en clin d’œil au slogan #SeAcabo («c’est terminé») qui a marqué le soutien à la footballeuse Jenni Hermoso après le baiser forcé de l’ex-patron du football espagnol, Luis Rubiales.
«La violence sexuelle et les abus de pouvoir n’ont pas leur place dans le monde du cinéma et dans la société espagnole», a martelé l’Académie du cinéma espagnol, qui a mis ce sujet au centre du gala. Assurant les victimes de sa «solidarité», elle a également promis d’instaurer un «protocole» pour prévenir ces violences.
«L’engagement de tous»
«Nous devons être conscients que nous sommes en train de parler d’une violence structurelle qui exige l’engagement de tous», a souligné le premier ministre socialiste Pedro Sanchez, sur le tapis rouge de la cérémonie.
À la veille du gala, lors duquel Pedro Almodovar et Penélope Cruz remettent certains des prix, le ministre de la Culture Ernest Urtasun a annoncé la création d’une unité spécialisée dans la prise en charge des victimes de violences machistes dans le secteur culturel.
Ce #MeToo du cinéma espagnol a éclaté fin janvier avec la publication d’une enquête du quotidien «El País» dans laquelle trois femmes accusaient le cinéaste Carlos Vermut de violences sexuelles.
Vague d’indignation
Figure du cinéma indépendant, Carlos Vermut, de son vrai nom Carlos López del Rey, a remporté en 2014 le prix le plus prestigieux du festival de Saint-Sébastien, rendez-vous majeur du cinéma hispanophone, pour son deuxième long-métrage, «Magical Girl» («La niña de fuego»), encensé par la critique.
Les accusations à son encontre ont provoqué une vague d’indignation en Espagne, pays en pointe dans la lutte contre les violences de genre. Vermut a affirmé dans «El País» ne pas être «conscient d’avoir exercé de la violence sexuelle sur une femme», mais a reconnu avoir «étranglé des personnes mais de manière consentie».
Dans le sillage de cette affaire, un autre réalisateur espagnol, Armando Ravelo, a lui été accusé par une artiste de l’avoir «incitée» à avoir des relations sexuelles lorsqu’elle n’avait que 14 ans.