FootballLa mission d’audit accable Noël Le Graët
Les «dérives de comportement» du président de la Fédération française «sont incompatibles avec l’exercice des fonctions et l’exigence d’exemplarité qui lui est attachée», selon la synthèse de la mission d’audit sur la FFF, consultée par l’AFP.
Le document de l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (IGESR), daté de mercredi, pointe des «prises de position publiques déplacées», «le comportement inapproprié (...) vis-à-vis des femmes» notamment à travers des «SMS ambigus pour certains et à caractère clairement sexuel pour d’autres», et «invite les instances fédérales à examiner cette situation en application des dispositions statutaires».
«Les auditions conduites par la mission ont mis en évidence que le caractère déplacé et injurieux des propos de M. Le Graët peut être accentué par la consommation excessive d’alcool», écrivent encore les inspecteurs, après quatre mois et demi d’enquête et plus de cent témoignages recueillis.
Ils affirment avoir pris en compte les observations formulées par ses avocats après l’envoi d’un pré-rapport, le 30 janvier, mais assurent que «le sens général» du rapport définitif, rendu mercredi, «ne s’en est pas trouvé modifié». En conséquence, ils considèrent toujours que le dirigeant de la FFF «ne dispose plus de la légitimité nécessaire pour administrer et représenter le football français».
«Le statu quo est impossible» pour Le Graët (ministre des Sports)
«Le statu quo est impossible» concernant Noël Le Graët, président de la Fédération française de football qui n’a plus «la légitimité nécessaire pour administrer et représenter» le football tricolore, a déclaré mercredi la ministre des Sports Amélie Oudéa-Castéra.
Le dirigeant de la FFF depuis 2011 «est un homme de décision, j’espère qu’il prendra les bonnes pour la Fédération, mais aussi pour lui-même. D’autres voies existent s’il ne le fait pas», a dit la ministre lors d’une conférence de presse suivant la conclusion de la mission d’audit sur les «dysfonctionnements» dans la plus grande fédération sportive de France.
«Compte tenu des manquements en matière de gouvernance, de son comportement gravement inapproprié envers les femmes, je ne peux que faire mienne la conclusion du rapport: il ne dispose plus de la légitimité nécessaire pour administrer et représenter le football français».
Mme Oudéa-Castéra a refusé elle-même d’appeler à la démission du dirigeant de 81 ans, évoquant «l’autonomie des fédérations» et le rôle à jouer désormais par le comité exécutif de la FFF, présidé par Noël Le Graët.
«Tout cela appartient aux membres des instances. L’Etat a joué tout son rôle, rien que son rôle», a-t-elle assuré. L’audit, «ce n’est pas quelque chose que la ministre des Sports a choisi de faire. Nous avons réagi dans l’urgence à des révélations médiatiques choquantes».
La ministre a affirmé n’avoir «pas échangé spécifiquement» avec le président de la FFF. «Il lui appartient dans les jours qui viennent de prendre le recul, d’échanger avec les autres membres du comex. C’est un timing qui leur appartient. Ce n’est plus mon calendrier», a-t-elle insisté.
«Il est important que cette fédération puisse rebondir et mener à bien les chantiers qui l’attendent. Il est extrêmement important que le Comex joue pleinement son rôle, que les deux institutions -- le Comité National d’Ethique et la Haute Autorité du Football -- aient ce rôle de gardien, de garde fou, cette autorité morale. Il est important qu’on ait des instances fortes, avec des contrepouvoirs, de la collégialité».
Les auditeurs reconnaissent que Le Graët «jouissait d’une image très positive dans le monde du football, après avoir redressé les finances de la FFF et modernisé son organisation au service d’une dynamique sportive positive», avant que l’usage «très centralisé» du pouvoir ne débouche sur «des dysfonctionnements et des logiques claniques». La synthèse souligne par ailleurs «les méthodes brutales et le comportement jugé erratique» de la directrice générale Florence Hardouin, mise à pied en janvier, qui «ne lui permettent plus d’exercer une autorité reconnue».
Les «compétences affirmées» de la DG sont certes reconnues mais son «autonomie décisionnelle» a «dérivé vers un isolement inquiétant pour l’institution», affirme le document, en pointant la relation devenue «toxique» entre Le Graët et Hardouin. Celle-ci affirme par ailleurs «avoir souffert du comportement inapproprié» du dirigeant de 81 ans.
Le comité exécutif, sorte de gouvernement de la FFF, est aussi pointé du doigt. Le fonctionnement de l’instance, décrite comme «un lieu de constats et de consensus», «illustre une faiblesse d’exercice démocratique» car les projets internes sont «peu ou pas débattus», est-il écrit.