HOCKEY SUR GLACE - Gauthier Descloux: «J’ai envie de tirer les autres vers le haut»

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HOCKEY SUR GLACEGauthier Descloux: «J’ai envie de tirer les autres vers le haut»

Le gardien de Ge/Servette, de retour de blessure, se livre avant le déplacement de vendredi à Fribourg. Il évoque son corps, sa tête et Julien Sprunger.

Simon Meier
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Simon Meier
Gauthier Descloux a appris à jongler avec son corps. Le voilà à nouveau en pleine forme pour défendre le filet des Aigles.

Gauthier Descloux a appris à jongler avec son corps. Le voilà à nouveau en pleine forme pour défendre le filet des Aigles.

Lucien Fortunati

Gauthier Descloux a retrouvé sa place devant le filet de Ge/Servette mardi soir à Davos, après deux mois et demi de tunnel qui ne lui ont pas fait que du mal. A l’heure d’aborder un week-end où il ne disputera qu’un des deux matches au programme (vendredi à Fribourg et samedi contre Berne), le gardien de 25 ans raconte sa convalescence, son retour au jeu et la suite des opérations.

Quel a été votre sentiment au moment de retrouver le parfum de la compétition?

Il y avait un mix entre un peu d’appréhension, de la bonne nervosité – j’aime avoir ce stress, c’est comme de l’essence, c’est ce qui fait marcher notre moteur. Il y avait beaucoup de motivation mais après, dans le sport, on ne sait jamais comment ça va se passer. Il y a pas mal de petits détails encore à ajuster, après deux mois et demi d’absence, mais en l’occurrence, ce n’était pas trop mal. 

«Quand je me blesse, tout s’arrête. Je vis comme une mini dépression: je n’arrive plus à me lever le matin, je n’ai plus d’objectif…»

Gauthier Descloux

Vu de l’extérieur, on a envie de dire que Gauthier Descloux n’a rien perdu pendant tout ce temps. Est-ce qu’il a gagné quelque chose?

D’abord, je ne dirais pas que je n’ai rien perdu. Il y aura encore deux-trois matches avant que je ne récupère mon meilleur niveau, et je m’en réjouis. Sinon, oui, il y a eu beaucoup de bon dans ma blessure. Je suis une personne qui aime le stress, c’est ce qui me fait me lever le matin. J’ai besoin de ce rythme et quand je me blesse, tout s’arrête. Je vis comme une espèce de mini dépression: je n’arrive plus à me lever le matin, je suis à la limite d’être en retard un peu partout, je n’ai plus d’objectif…

Comment se sortir de ça?

Quand je me suis blessé, j’ai directement senti que ça venait, alors je suis allé voir le préparateur physique, Gaëtan Brouillard et je lui ai dit: «Ecoute Gaëtan, j’ai besoin d’objectifs, je n’ai jamais été très fort du haut du corps, on va me faire des pec’ gros comme des maisons!» On a travaillé tous les matins, ça m’a fait des journées bien chargées. Je me suis fixé un objectif que j’ai atteint, ça m’a fait du bien à la tête. Ça a déteint sur ma façon de travailler en salle de muscu en général et sérieusement, je pense qu’au niveau force et condition physique, je suis aujourd’hui dans ma meilleure forme. Donc pour ça, merci à Gaëtan et à Mathieu Mouton, notre physiothérapeute, qui m’ont accompagné.

Vos pépins physiques vous incitent-ils à modifier votre style de jeu?

Non. Je ne suis pas une petite personne, avec mon mètre 80, mais je suis considéré comme un petit gardien dans le hockey. J’ai besoin de jouer avec cette vitesse, cette intensité. C’est ce qui a fait mon succès, donc je ne vais pas l’effacer. Après, oui, on peut diminuer les charges à l’entraînement, trouver ce juste milieu entre se donner à fond pour progresser tous les jours et ne pas trop en faire pour garder le corps dans une zone de performance.

Comment a-t-il réagi à ce premier match, votre corps?

Tous les gens qui ont déjà eu une déchirure ou une grosse blessure savent que quand on revient, même si on est prêt et que tout tient, il faut encore composer avec la douleur pendant deux ou trois mois. Il faut s’habituer mentalement, oublier, parce qu’il y a aussi quelques appréhensions dans la tête. J’ai un style de jeu extrêmement intense, basé sur la vitesse de déplacement. Je multiplie les «à genoux-debout» et j’ai pas mal de bleus - mes genoux avaient oublié à quel point cela faisait mal, mais ils vont se réhabituer, pas de souci. 

«Le Genève qui joue juste, même s’il ne termine pas 6e, peut être un prétendant au titre.»

Gauthier Descloux

Comment envisagez-vous cette dernière ligne droite de saison régulière?

Avec cette 6e place, on a vraiment un bel objectif devant nous. C’est presque plus intéressant que des play-off, la passe qu’on vit. C’est quelque chose d’unique, on joue bien, on gagne nos matches et on se rend compte qu’on a vraiment nos chances, à condition que les planètes s’alignent. On sait que si nous faisons les choses bien, si nous soignons la manière, que nous soyons en play-off ou pré-play-off, nous serons l’équipe que personne ne voudra affronter. Le Genève qui joue juste, même s’il ne termine pas 6e, peut être un prétendant au titre.

Comment vivez-vous le retour en prêt de Dominic Nyffeler, qui disputera un des deux matches du week-end? Content de pouvoir souffler ou frustré de ne pas jouer tout le temps?

C’est un mélange. C’est une histoire de perception, j’ai travaillé ça avec mon coach mental. Le fait que je me dise «ah, merde, c’est lui qui va jouer», en fait, c’est bien. Ce n’est pas mauvais, ni contre lui, ça veut dire que j’ai faim et que ma tête est au bon endroit. Un instinct de compétiteur vient me gratter, mais c’est aussi important d’accepter que je suis un gardien qui a besoin d’intensité donc, aussi, parfois de repos. Je sais que dans le hockey moderne, avoir deux gardiens est un impératif pour qu’une équipe marche. Pour l’équipe comme pour moi, c’est uniquement du positif. Dans notre milieu, il ne sert à rien d’être jaloux parce que ça ruine tout. J’ai envie d’être quelqu'un qui tire les autres vers le haut.

En ce jeudi midi, savez-vous qui de Nyffeler ou de vous sera sur la glace vendredi soir à Fribourg?

Je sais que je vais jouer un des deux matches du week-end (ndlr: réception de Berne samedi), mais je ne sais pas encore lequel – et Dominic jouera l’autre. 

«J’ai beaucoup de respect pour ces sportifs qui savent vivre une rivalité saine. En ce sens, Julien Sprunger est une personne exceptionnelle.»

Gauthier Descloux

Un match à Fribourg, pour vous, ça n’est pas neutre…

Oui, c’est toujours très spécial et émotionnel pour moi. Je viens de Fribourg, même si ce n’est plus tellement le Fribourg que je voyais quand j’étais petit avec mon oncle. Je suis content pour eux du succès qu’ils ont cette année, c’est l’équipe la plus régulière du championnat et ils méritent leur place de leader. Mais on veut jouer notre jeu et leur rendre la monnaie de leur pièce. Eux doivent aussi se réjouir de nous affronter, parce qu’ils ont beaucoup à prouver contre nous. Et moi, je retrouverai des joueurs qui étaient déjà là quand j’étais petit et qui étaient un peu mes héros.

Racontez-nous…

Je suis un peu désolé pour les Genevois, mais je ne l’ai jamais caché. Je suis Servettien de cœur, Genève est ma ville mais Fribourg, ce sont mes origines. J’ai grandi avec ces gars comme héros, à l’image de Julien Sprunger, qui s’est d’ailleurs toujours extrêmement bien comporté avec moi comme adversaire. J’ai beaucoup de respect pour ces sportifs qui savent vivre une rivalité saine et qui, une fois le match fini, viennent te taper sur la jambière avec un mot sympa. En ce sens, Julien est une personne exceptionnelle à mes yeux.

Vous risquez de froisser certains en disant cela, non?

Je sais qu’il n’est pas très apprécié aux Vernets (sourire), c’est d’ailleurs le rôle de notre public de ne pas l’apprécier et ils le font très bien. Même quand ils ont du respect pour quelqu’un, nos supporters ne le laissent pas paraître et j’aime bien ça, parce que ça fait partie du match. Mais dès que c’est fini, on baisse la garde. Quand je m’étais blessé la saison passée en play-off, Julien (Sprunger) était directement venu voir comment ça allait. Ce sont des gens qui, sur le plan sportif comme sur le plan humain, te donnent envie de jouer encore mieux.

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