FranceL’extrême droite se renforce sur fond de vague populiste en Europe
Comme plusieurs pays européens, la France connaît un renforcement et une banalisation de l’extrême droite, dont profite Marine Le Pen.
Comme plusieurs pays européens, la France connaît un renforcement et une banalisation de l’extrême droite, dont la dirigeante Marine Le Pen consolide la position dans la perspective de la présidentielle de 2027. Études et politologues constatent que le Rassemblement national (RN) apparaît de plus en plus comme une «alternative naturelle au macronisme» et soulignent le «contexte européen favorable» pour les partis d’extrême droite.
Sondages porteurs
Pour la première fois, les Français sont plus nombreux à considérer que le RN ne représente pas un danger pour la démocratie (45%) que l’inverse (41%), révélait jeudi un sondage de l’institut Verian. Et le nombre de sondés en désaccord avec les idées du parti d’extrême droite a chuté à 54%, soit le chiffre le plus bas depuis 1984, selon cette étude.
Marine le Pen a repris les rênes du parti en 2011 et mène pas à pas, depuis une décennie, une stratégie de «dédiabolisation», qui l’a conduite en à deux reprises en deuxième position de la présidentielle derrière Emmanuel Macron, en 2017 (33,90% des suffrages au 2e tour) et en 2022 (41,45%). Son parti a réalisé une percée majeure aux législatives ayant suivi la dernière élection, 88 députés RN siégeant désormais à l’Assemblée.
Principale force d’opposition
S’affichant comme proche des préoccupations des Français, notamment du pouvoir d’achat, profitant de la stratégie de «bruit et de fureur» menée par l’opposition de gauche radicale de Jean-Luc Mélenchon pour se poser en parti responsable, et jouant de l’émergence de l’ultra-radical Eric Zemmour pour recentrer son image, le RN se pose désormais en principale force d’opposition.
Pour Frédéric Dabi, directeur général de l’institut de sondages Ifop, il n’y a pas de doute: «Marine Le Pen est devenue aujourd’hui l’alternative naturelle au macronisme», a-t-il affirmé, lors de la présentation d’une étude réalisée par la Fondation Jean Jaurès, un cercle de réflexion proche de la gauche. Menée auprès de 9000 personnes, l’étude décortique «la société rêvée des électeurs» du RN pour en tirer les enseignements d’ici 2027.
Ce que veulent les Français
«En termes de positionnement et de valeurs, Marine Le Pen fait écho d’une manière extrêmement claire à ce que pensent et ce que veulent les Français», estime Antoine Bristielle de la Fondation. Et de donner comme exemple l’immigration: «66% des Français pensent qu’il y a trop d’étrangers en France et même plus d’un électeur du Parti socialiste sur deux».
La porosité grandit également entre la droite traditionnelle et l’extrême droite, constate Gilles Ivaldi, du Cevipof de Sciences Po. «Les idées de l’extrême droite infusent et se diffusent, elles se propagent dans les grands partis, on le voit en France ou en Allemagne», relève-t-il.
Lame de fond en Europe
De son côté, le politologue Raphaël Llorca est convaincu que l’on vit «dans un moment pré-Le Pen». La «centralité» actuelle de celle qui a échoué à trois reprises à la présidentielle constitue «quelque chose de nouveau». «N’importe quel événement qui surgit dans l’actualité est systématiquement interprété et cadré comme favorisant l’extrême droite, des émeutes urbaines à la crise alimentaire en passant même par la guerre» à Gaza, souligne-t-il.
Sarah Proust, élue socialiste parisienne, évoque, elle, la «lame de fond» au niveau européen. Plusieurs pays de l’UE, dont l’Italie, la Slovaquie, la Hongrie ou la Finlande, sont dirigés par des coalitions gouvernementales comptant un parti d’extrême droite dans leurs rangs. Les Pays-Bas pourraient rejoindre la liste avec la récente victoire aux législatives de Geert Wilders.
Dans ces conditions, Marine Le Pen est-elle en route vers l’Elysée? «Elle peut gagner compte tenu notamment de la nature de ses soutiens, de sa structure électorale qui est attrape-tout et qui s’apparente à celle d’un parti de gouvernement», explique Frédéric Dabi. Marine Le Pen devra toutefois composer avec la justice: vendredi, la dirigeante et son parti ont été renvoyés en procès dans l’enquête sur un système de détournement de fonds publics européens.
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