Taxé de raciste et insulté, Chappatte se défend

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Le dessinateur de presse a été vivement critiqué pour un dessin que certains ont jugé islamophobe. Il s’est expliqué.

Renaud Michiels
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Renaud Michiels
«Le comble pour un dessinateur, c’est de devoir expliquer un dessin», se désole Patrick Chappatte.

«Le comble pour un dessinateur, c’est de devoir expliquer un dessin», se désole Patrick Chappatte.

AFP

Le dessinateur de presse Patrick Chappatte s’est donné une règle: ses dessins disent ce qu’il a à dire. Pas besoin, ensuite, de les expliquer ou de se justifier. Et encore moins de débattre sur les réseaux sociaux. Le Genevois vient cependant de faire une exception car, comme il l’a écrit ce week-end sur son site, «je me suis fait copieusement traiter de raciste, ou d’islamophobe, ou les deux sur Twitter».

En cause, un dessin de juin dernier sur la décision de la Cour suprême américaine de supprimer le droit constitutionnel fédéral à l’avortement. Chappatte avait alors présenté les juges sous les traits de talibans.

Ce dessin était paru dans «Le Temps» le 25 juin puis Chappatte l’avait publié sur ses deux comptes twitter, en français et en anglais. Et c’est surtout sur le compte anglophone qu’il dit avoir «été la cible d’un «shitstorm» numérique».

Pour beaucoup, ce dessin était raciste, islamophobe. «Pourquoi aller chercher encore des musulmans pour caricaturer ce qui concerne les États-Unis, pays chrétien assumé?» lui a-t-on demandé. D’autres se sont montrés bien moins polis. «Ceci est juste raciste et islamophobe», «T’es raciste», «Fuck you racist bullshit» ou encore «Sale merde!» a-t-il reçu, détaille-t-il, ainsi que quelques menaces de mort…

Face à ce déluge qui a duré quelques jours, Chappatte n’a pas répondu en ligne.  «Débattre sur Twitter? Autant vouloir parlementer avec un train qui vous arrive dans la figure», commente-t-il. Mais maintenant que le «shitstorm» est passé, il a décidé de s’expliquer, même si ça semble le désoler – «le comble pour un dessinateur, c’est de devoir expliquer un dessin». glisse-t-il.

Chappatte tient à souligner que son dessin n’a rien d’islamophobe. Et veut donner son avis sur la mécanique parfois en œuvre sur les réseaux sociaux.

«Un poison qui ronge nos sociétés»

«Ce dessin est un miroir tendu aux États-Unis, à leurs obsessions de politique étrangère et à leurs croisades morales: vous êtes finalement ces extrémistes que vous prétendez combattre», détaille-t-il. Et d’ajouter: «Quand je dessine un mollah iranien ou un chef taliban, je ne vois pas le musulman, mais avant tout un leader théocratique conservateur.» «Ce dessin ne parle pas du tout de l’islam et encore moins des musulmans», a-t-il aussi résumé mardi à «Forum», sur la RTS.

Le dessinateur critique encore le «réflexe victimaire» de personnes qui l’ont attaqué, ceux qui reconnaissent «avant tout une «victime», un musulman essentialisé, là où je désigne le «dominant», le chef Taliban.»

Chappatte, enfin, note que Twitter est un «amplificateur de bruit». Et il n’est pas surpris par les insultes et dérapages. «Rien d’accidentel: c’est le modèle économique même des réseaux sociaux. La culture du clash sur Twitter infuse nos relations sociales et le discours civique. C’est un poison qui ronge lentement nos sociétés», dénonce-t-il.

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