Coup de gueuleSuicide d’un hockeyeur: ça suffit!
Chris Simon, un vainqueur de la Coupe Stanley, s’est donné la mort. Il avait 52 ans. Il n’est pas le premier bagarreur à choisir de quitter ce monde. Aux Fédérations d’agir.
- par
- Emmanuel Favre
Il y a parfois des comportements étonnants autour des patinoires ou face à un écran, les doigts gourds sur un clavier, la réelle identité camouflée derrière un pseudo qui transpire la témérité, voire l’héroïsme.
Il y a une dizaine de jours, des tas de prétendus amoureux du jeu volaient au secours de Matt Rempe (21 ans) qu’on avait qualifié du «nouveau salopard du hockey mondial». L’attaquant canadien des Rangers de New York (NHL) présente une fiche de 10 matches, 4 combats, 54 minutes de pénalités, 4 parties de suspension et 2 adversaires envoyés à l’hôpital. Dont Jonas Siegenthaler, le défenseur zurichois des Devils du New Jersey, qui a subi une commotion cérébrale (et qui n’est pas prêt de revenir au jeu) après avoir rencontré le coude de Rempe.
Lundi, des millions de même prétendus amoureux du jeu pleuraient la mort de Chris Simon (52 ans), un Canadien qui avait disputé 820 matches dans la ligue professionnelle nord-américaine entre 1992 et 2008 et qui avait remporté la Coupe Stanley en 1996 alors qu’il portait le maillot de l’Avalanche du Colorado. La famille du défunt a précisé mercredi que Simon s’était donné la mort.
«La famille croit fermement, et en a été elle-même témoin, que Chris a été très affecté par l’ETC (ndlr: l’encéphalopathie traumatique chronique, une maladie dégénérative associée à une accumulation de coups à la tête et/ou de commotions cérébrales) et que malheureusement cela a entraîné sa mort», lit-on dans un communiqué envoyé par l’agent de l’ancien joueur.
121 combats, 1824 minutes de punition
Simon, qui avait porté le chandail de sept clubs de NHL, était surtout considéré comme un bagarreur. Il avait livré 121 combats, purgé 1824 minutes de punition et reçu 65 parties de suspension. En décembre 2007, il avait notamment été banni pour 30 parties après avoir donné un coup de patin à la jambe d’un adversaire.
Comment peut-on regretter (ce qui semble être le comportement le plus approprié) le suicide d’un ancien joueur et, en même temps, applaudir (ce qui semble être le comportement inapproprié) le palmarès de Rempe?
Une accumulation de coups à la tête est en effet susceptible de conduire à une mort prématurée. Ainsi que le rappelle le chroniqueur de Radio Canada Martin Leclerc, des chercheurs de l’Université Columbia ont révélé dans une étude publiée le printemps dernier «que les bagarreurs de la NHL mouraient approximativement 10 ans plus jeunes que leurs pairs ayant été repêchés au même rang, étant de taille similaire et ayant joué à la même position.» Pour cette étude, les chercheurs ont pris en compte le destin de 6039 hockeyeurs entre 1967 et 2022.
Une (trop) longue liste
La disparition de Simon n’est pas la première parmi d’anciens bagarreurs de la NHL. Au début des années 2010, quatre matadors (Bob Probert, Derek Boogaard, Wade Belak et Rick Rypien) sont décédés prématurément en l’espace d’un an. Et, comme le note Leclerc, dans les quatre cas, des examens ont révélé la présence d’ETC. En 2015. Steve Montador est décédé à 35 ans. Des chercheurs, qui ont examiné son cerveau, ont déterminé qu’il avait souffert d’ETC.
Pendant ce temps, les pontes du petit monde du hockey, dans toutes les ligues, dans toutes les Fédérations, refusent d’effectuer un lien entre les coups à la tête et les morts prématurées des bagarreurs.
Le reconnaître c’est s’exposer à des poursuites collectives dont le coût pourrait se chiffrer en milliards.
Pourtant un et un font bien deux.
C’est ridicule.
Comme c’est ridicule d'idolâtrer un Rempe.