Corée du SudLibération conditionnelle du patron de facto de Samsung
Lee Jae-yong, vice-président de Samsung Electronics, condamné en janvier à deux ans et demi de prison pour corruption, a quitté sa prison de Séoul vendredi.
L’héritier et patron de facto de Samsung, Lee Jae-yong, est sorti de prison vendredi après avoir bénéficié d’une libération conditionnelle, a constaté l’AFP à Séoul. «J’ai causé trop de soucis aux gens. Je suis vraiment désolé», a déclaré devant son centre de détention dans le sud de Séoul le vice-président de Samsung Electronics, 53 ans, condamné en janvier à deux ans et demi de prison pour corruption.
La libération conditionnelle de Lee Jae-yong avait été annoncée lundi par le ministre sud-coréen de la Justice qui avait invoqué «la situation économique nationale due à la pandémie prolongée de coronavirus».
Officiellement, Lee Jae-yong – 202e personne la plus riche du monde selon Forbes, avec une fortune s’élevant à 11,4 milliards de dollars – est le vice-président de Samsung Electronics, premier fabricant au monde de smartphones et de puces mémoire. Mais dans les faits, il est celui qui a repris le flambeau à la tête du conglomérat depuis que son père Lee Kun-hee, l’artisan du décollage mondial du groupe, s’est mis en retrait en raison de problèmes de santé. Le patriarche est décédé en octobre.
Scandale de corruption
Lee Jae-yong avait été condamné en janvier dans le retentissant scandale de corruption qui avait entraîné la destitution, puis l’incarcération, de l’ex-présidente sud-coréenne Park Geun-hye. Les appels à sa libération anticipée s’étaient multipliés ces derniers mois, émanant à la fois de responsables politiques et de chefs d’entreprise, inquiets des conséquences de la pandémie de coronavirus sur l’économie sud-coréenne, la 12e de la planète. Cette remise en liberté visait à apaiser les inquiétudes concernant le processus décisionnel de Samsung.
Samsung est de loin le plus grand des «chaebols», ces empires industriels familiaux du pays. Son chiffre d’affaires global représente un cinquième du PIB sud-coréen, et est donc crucial pour la santé économique du pays.
La Corée du Sud accorde traditionnellement des grâces à cette époque de l’année, alors qu’elle célèbre le Jour de l’Indépendance le 15 août. Le ministère de la Justice a indiqué que cette année, 810 personnes bénéficieront d’une libération conditionnelle.
La décision en faveur de Lee Jae-yong a été prise «en fonction de divers facteurs, dont le sentiment de la population et son comportement en prison», avait déclaré lundi le ministre de la Justice aux journalistes. Selon des médias sud-coréens, Lee Jae-yong a été un «prisonnier modèle», et un changement de règlement entré en vigueur en août permet de réduire la durée de la peine que les prisonniers doivent purger pour avoir droit à la libération conditionnelle.
Accointances troubles
Son incarcération n’a toutefois pas nui aux performances du groupe qui a annoncé fin juillet un bond de plus de 70% de son bénéfice net au deuxième trimestre du fait de la hausse des prix des puces liée à la très forte demande en temps de pandémie.
Lee Jae-yong, qui faisait l’objet d’un nouveau procès dans l’affaire à tiroirs qui avait entraîné la destitution en 2017 de l’ex-présidente Park Geun-hye, puis son incarcération, a été reconnu coupable de corruption et de détournements de fonds. Dans cette affaire, il avait été en 2017 condamné à cinq ans de prison pour corruption, détournement de fonds et autres délits. En appel, la plupart des poursuites pour corruption avaient été écartées et Lee Jae-yong avait écopé d’une peine de prison avec sursis. Mais la Cour suprême avait ensuite ordonné un nouveau procès.
L’affaire porte sur des millions de dollars que le groupe avait versé à la confidente de l’ombre de la présidente, Choi Soon-sil. Des pots-de-vin qui étaient selon l’accusation destinés à faciliter la passation de pouvoir à la tête du conglomérat, alors que Lee Kun-hee était alité après une attaque cardiaque en 2014. La Cour suprême a définitivement confirmé jeudi dernier la condamnation de l’ex-présidente Park à 20 ans de prison.
Ce scandale avait souligné une fois de plus les accointances troubles entre le pouvoir sud-coréen et les grandes familles qui contrôlent les «chaebols», ces conglomérats à l’origine du prodigieux redressement du pays après la Guerre de Corée.
À plusieurs reprises par le passé, de grands patrons sud-coréens, condamnés pour corruption ou fraude fiscale, ont bénéficié de réductions de peines ou de grâces présidentielles, à l’image de l’ancien patron de Samsung Lee Kun-hee, condamné deux fois puis gracié en reconnaissance de «sa contribution à l’économie nationale».