Sommet Afrique-France – A Montpellier, la jeunesse africaine interpelle Macron

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Sommet Afrique-FranceÀ Montpellier, la jeunesse africaine interpelle Macron

Au sommet Afrique-France, la jeunesse africaine a partagé ses attentes et frustrations sur la démocratie et la relation avec la France

Emmanuel Macron à son arrivée à Montpellier.

Emmanuel Macron à son arrivée à Montpellier.

AFP

Venus de tout le continent, de jeunes Africains ont exprimé sans fard, vendredi, leurs attentes et frustrations sur la démocratie et la relation avec la France, interpellant directement le président Emmanuel Macron lors d’un sommet inédit à Montpellier (sud) qui privilégiait la parole de la société civile.

Arrivé en fin de matinée, Emmanuel Macron, hôte et unique président de ce sommet sans chefs d’État, est passé de table ronde en table ronde, avant une plénière prévue dans l’après-midi. Sur le stand consacré aux restitutions d’œuvres pillées, le chef de l’État a annoncé que la France redonnerait, fin octobre, au Bénin, 26 œuvres d’art provenant du «Trésor de Béhanzin», pillé au palais d’Abomey en 1892 pendant les guerres coloniales.

Il respecte ainsi un engagement pris en novembre 2018, dans le cadre de cette «nouvelle relation» que la France entend nouer avec le continent et dont les restitutions constituent un des points saillants.

Lors de sa déambulation, le président a été interpellé à plusieurs reprises. «Je n’en peux plus de voir la jeunesse africaine mourir dans la mer» Méditerranée pour gagner l’Europe, lui a lancé une femme. Un jeune Guinéen l’a ensuite exhorté à «soutenir la transition guinéenne», après le putsch qui a renversé le président Alpha Condé en septembre, dont M. Macron a convenu que «le troisième mandat n’était pas opportun».

Espoir d’«un nouveau départ»

Ce sommet Afrique-France a voulu donner la parole à la société civile et, pour la première fois depuis 1973, excluait les chefs d’États du continent. Venus du Burkina Faso, du Mali, de République démocratique du Congo, du Maroc… les jeunes invités avaient beaucoup de choses à dire à la France, concernant l’héritage colonial, la politique des visas ou l’aide au développement. Dès l’ouverture du sommet, auquel ont été conviées quelque 3000 personnes, la table ronde «Engagement citoyen et démocratie» a ainsi attiré de nombreux spectateurs et intervenants.

«Nous avons l’espoir que Montpellier soit un nouveau départ. Qu’on écoute le terrain africain, la jeunesse africaine, elle a des choses à dire au monde et à la France», a lancé Bakary Sambe, directeur du Timbuktu Institute. Évoquant la décision récente de Paris de réduire drastiquement le nombre de visas pour les Algériens, les Marocains et les Tunisiens, Mehdi Alioua, professeur de Sciences politiques à Rabat, a déploré une «punition collective» et dénoncé la politique des visas comme un «système d’humiliation (et) de vexation», sous les applaudissements de l’assistance.

Qu’on écoute le terrain africain, la jeunesse africaine, elle a des choses à dire au monde et à la France.

Bakary Sambe, directeur du Timbuktu Institute

La question de la mobilité reste une préoccupation très importante de la jeunesse africaine, qui n’a pas vu se concrétiser les promesses du président Emmanuel Macron, quatre ans après son discours de Ouagadougou. Autre sujet très abordé, l’état de la démocratie sur le continent africain, et l’«ingérence française».

«Nous sommes coincés entre un discours condescendant occidental qui veut éduquer les Africains et un discours de nos gouvernements affirmant que les Occidentaux veulent imposer leurs valeurs», a déploré une jeune étudiante de l’université Aix-Marseille, Habiba Issa Moussa, d’origine nigérienne.

«Les questions essentielles ici, ce n’est pas l’entrepreneuriat ou le sport – largement évoquées au sommet de Montpellier, ndlr-, c’est la politique!» a lancé pour sa part la burkinabè Sibila Saminatou Ouedraogo, fustigeant «la relation de dépendance» de l’Afrique à la France.

Dans l’après-midi, le président Macron devait débattre avec un panel de douze jeunes Africaines, sélectionnées à l’issue des dialogues menés pendant des mois, à travers le continent, par l’intellectuel camerounais Achille Mbembe, chargé de préparer le sommet.

«J’aimerais vraiment y croire», a déclaré à l’AFP David Maenda Kithoko, réfugié politique de RDC en France. «Mais j’ai beaucoup de doutes. Concernant la relation entre la France et l’Afrique, il y a beaucoup de grands mots d’une part, et un manque de courage de l’autre», a déploré le jeune militant.

À l’issue du sommet, le président français, probable candidat à sa réélection dans sept mois, pourrait faire d’autres annonces, s’appuyant sur les propositions d’Achille Mbembe. Parmi elles, la création d’un Fonds destiné à soutenir les initiatives de promotion de la démocratie, des programmes permettant une plus grande mobilité étudiante, ou la mise en place d’un «forum euro-africain sur les migrations».

Le tout dans un contexte particulièrement délicat. L’influence de la France dans son ancien précarré est de plus en plus disputée, particulièrement par la Russie. Et Paris est en crise ouverte avec deux de ses anciennes colonies, le Mali et l’Algérie.

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